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Liban - Crise des déchets

Scepticisme et méfiance à l’égard du plan de sortie de crise

Le projet Chehayeb accepté comme un pis-aller, en raison de l'urgence. Grogne des habitants de Naamé et de Aramoun.

Sukleen continuera le ramassage des ordures et le balayage des rues, et participera au grand nettoyage des ordures amoncelées au cours des deux derniers mois.

Les acteurs de la société civile et l'opinion publique au Liban ont accueilli avec scepticisme et réserve le plan du gouvernement pour mettre fin à la crise des déchets. Un plan accepté par l'opinion faute de mieux, après deux mois d'amoncellement des détritus dans les rues.
Ce plan prévoit, en gros, la réhabilitation de deux déchetteries, au Akkar et à Masnaa, à la frontière orientale, pour que la responsabilité du traitement des déchets soit ensuite transférée aux municipalités sur l'ensemble du territoire libanais.
La première initiative du plan présenté par le ministre de l'Agriculture Akram Chehayeb sera de rouvrir la déchetterie de Naamé pendant une semaine seulement. Y devront être rapidement déversées les montagnes d'ordures qui se sont accumulées dans Beyrouth et ses faubourgs ainsi qu'au Mont-Liban deux mois durant.
Il faut s'attendre, sur ce plan, à ce qu'une véritable noria de camions se forme, entre Beyrouth et Naamé, pour que le délai de sept jours, estimé suffisant par le ministre, soit respecté. Ce n'est pas gagné d'avance, bien que M. Chehayeb s'y soit solennellement engagé. Le ministre s'en expliquera d'ailleurs lundi, devant la commission parlementaire de l'Environnement, présidée par Marwan Hamadé.


(Lire aussi : « La proposition n'est ni logique ni écologique », affirment des activistes)

 

Naamé refuse net
La municipalité de Naamé a réagi sans tarder à ce plan, affirmant dans un communiqué qu'elle refuse net que sa décharge soit rouverte, « ne serait-ce que pour une seule heure ». Par ailleurs, la proposition a suscité de très vives oppositions de la part des résidents de Naamé et de Aramoun vivant aux abords du site. Descendus en colère dans la rue, ces derniers ont commencé à établir des piquets de vigilance aux abords de la décharge. Des menaces ont été formulées en public par certains d'entre eux contre les chauffeurs des camions de Sukleen. « Ces derniers viendront ici à leurs risques et périls, a dit l'un d'eux. Si les autorités cherchent à nous forcer la main, nous réagirons en conséquence... » a lancé un jeune homme vêtu du cherwal druze et de la calotte blanche.
La levée de boucliers des habitants de Aramoun et de Naamé est due, de toute évidence, à une crise de confiance entre la population et les députés et ministres qui la représentent. C'est que la population locale, abreuvée de promesses, n'en peut plus. Toutefois, selon une source proche du ministre, la réaction en flèche de Naamé contre le plan Chehayeb serait plus politique que viscérale. La population conditionnerait son acceptation du plan Chehayeb à son acceptation par les municipalités où sont situées les deux déchetteries pressenties pour en prendre la relève.

Le plan Chehayeb prévoit, nous l'avons dit plus haut, le réaménagement de deux déchetteries, l'une à Masnaa, près de la frontière avec la Syrie, l'autre à Akkar. Celles-ci sont déjà utilisées comme des déchetteries locales, mais le gouvernement compte les réhabiliter pour qu'elles reçoivent les ordures de Beyrouth et du Mont-Liban, où se concentre plus de la moitié de la population libanaise et qui, contrairement aux autres régions, ne disposent plus de décharges, si l'on excepte celle de Dora-Bourj Hammoud, fermée depuis 1998 pour cause de saturation. En outre, à moyen et long terme, l'usine de traitement des ordures de Saïda, qui dessert la ville en ce moment, serait mise à contribution pour traiter des ordures ménagères venues du reste du pays (dans les limites de ses capacités), et une étude de faisabilité serait lancée pour réaménager le dépotoir de Dora- Bourj Hammoud et le remettre en service.

 

(Lire aussi : Il reste à convaincre Naamé de rouvrir sa déchetterie)

 

Des appâts de 100 millions de dollars
Le plan s'est immédiatement heurté à l'hostilité d'une partie de la population du Akkar, de la Békaa et de Saïda. Un collectif se présentant sous l'appellation « Akkar n'est pas un dépotoir » a d'ores et déjà rejeté cette initiative, alors même que, bien maladroitement, pour faire accepter le plan, un appât de 100 millions de dollars pour le développement de cette région a été promis par le gouvernement.
Tout aussi maladroitement, on apprenait hier de la bouche de M. Chehayeb que le gouvernement avait, lors de sa réunion de mercredi, décidé d'accorder 100 autres millions de dollars au développement de la Békaa. Une source gouvernementale précise toutefois que « cela n'avait rien à voir avec le plan d'aménagement d'une déchetterie dans cette région ». Vraiment ?

Par ailleurs, les municipalités de Saïda (Sud), Anjar, Majdel Anjar et Soueyri (Békaa) ont toutes publié des communiqués hostiles au plan Chehayeb. La municipalité de Saïda réclame, notamment, qu'on mette à la disposition de l'usine (privée) un dépotoir pour les matières inertes. Les autres municipalités redoutent de voir polluer une nappe d'eau alimentant la région.
Les deux déchetteries devront être fermées d'ici à 18 mois, prévoit le plan Chehayeb, lorsque les municipalités de chaque région seront en principe capables de traiter leurs propres déchets. Le plan ne détaille pas toutefois le mode de gestion des déchets qui sera adopté par ces municipalités, un détail que les experts considèrent comme l'un des points faibles du projet.

Les militants de « Vous puez ! », qui doivent encore réagir officiellement à ce plan, ont d'ores et déjà douté du sérieux du gouvernement. « Nous approuvons le transfert des responsabilités aux municipalités, mais ce point n'est pas détaillé de manière claire et transparente », a déclaré à l'AFP Lucien Bou Rjeily, membre de la campagne « Vous puez ! ». « Ce sont des solutions partielles. »
Même des membres la commission ad hoc présidée par le ministre de l'Agriculture se sont montrés prudents. « Après 18 mois, si les municipalités ne sont pas prêtes, les ordures seront de nouveau dans la rue », a prévenu l'un d'eux, Bassam Kantar.

 

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Les acteurs de la société civile et l'opinion publique au Liban ont accueilli avec scepticisme et réserve le plan du gouvernement pour mettre fin à la crise des déchets. Un plan accepté par l'opinion faute de mieux, après deux mois d'amoncellement des détritus dans les rues.Ce plan prévoit, en gros, la réhabilitation de deux déchetteries, au Akkar et à Masnaa, à la frontière...

commentaires (1)

Scandaleuse photo ...pas un seul des ouvriers n'ont un masque ...!

M.V.

07 h 15, le 11 septembre 2015

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Commentaires (1)

  • Scandaleuse photo ...pas un seul des ouvriers n'ont un masque ...!

    M.V.

    07 h 15, le 11 septembre 2015

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