Quand le bâtiment va mal, le marché de l’acier trinque

C'est l'un des effets secondaires des mutations du marché de l'immobilier : selon une étude publiée dans le Lebanon Brief de la Blom Bank, la demande locale d'acier a baissé de 27 %, à 260 000 tonnes. Car plus de 70 % de cette demande provient du secteur de la construction ; le reste étant absorbé par diverses activités industrielles, dont la fabrication de générateurs électriques ou de climatiseurs. Or, du fait de la conjoncture politico-sécuritaire, les indicateurs de l'activité de construction ont été en berne en 2014. Les livraisons de ciment ont ainsi baissé de 5,3 %, à 5,53 millions de tonnes. Quant à la surface des permis de construire octroyés par l'administration libanaise, si elle a augmenté de 4,8 % par rapport à 2013, cette année-là avait connu une chute drastique à cet égard (-19 %). Surtout, l'obtention d'un permis – valable huit ans – ne permet pas réellement d'anticiper de nouveaux projets immobiliers à court terme. Enfin, les promoteurs tendent de plus en plus à s'orienter vers la construction de petites surfaces pour s'adapter au marché.

Autant de mauvaises nouvelles pour les cinq grands acteurs d'un marché de l'acier estimé à environ 150 millions de dollars par an. À savoir les sociétés Demco Steel, al-Moussawi Trading Company for Steel and Building Material, la Société libanaise pour les métaux, la Société Jean Yared et Fils et Zeenni Steel Industries. Toutes importent l'intégralité de l'acier qu'elles revendent sur le marché local, dans la mesure où la production libanaise est nulle. Ce, selon l'étude, pour deux raisons principales : d'abord, l'absence de gisements de minerai de fer – le composant principal de l'acier – dans le pays ; et d'autre part les désavantages comparatifs potentiels qu'auraient à subir d'éventuels producteurs libanais face à leurs concurrents régionaux, du fait des prix élevés de l'énergie notamment.

Dumping chinois
Le Liban importe essentiellement trois types de produits : des barres utilisées dans la construction (75 %), de l'acier laminé, utilisé dans l'industrie (20 %) et des tubes et des tuyaux utilisés dans la plomberie (3 %). Or, du fait de la baisse de la demande, leurs importations d'acier ont sérieusement décéléré, en dépit de la baisse des prix sur le marché mondial. Leur croissance n'a été que de 0,95 % en 2014, à environ 1,4 million de tonnes, contre des hausses respectives de 5,97 et 5,74 % en 2012 et 2013. En valeur, elles ont en revanche baissé de 4,82 % en rythme annuel, à 879,4 millions de dollars en 2014. Les réexportations de cet acier ont, elles, augmenté de 59 %, à 24 624 tonnes en 2014, principalement vers le marché syrien.

Selon la société al-Moussaoui, citée par l'étude, le prix de la tonne d'acier pour la construction a baissé de 700 dollars en 2013 à 400 dollars en 2014, principalement en raison d'une explosion des exportations chinoises. Confronté à une nette réduction de sa demande intérieure, la Chine – de très loin le plus gros producteur mondial (49 %), devant le Japon (7 %) et les États-Unis (5 %) – a vu les volumes de ses exportations bondir de 51 % l'an dernier, selon la Fédération chinoise des producteurs d'acier. Une tendance qui s'est confirmée au Liban : la part des importations en provenance de Chine étant passée de 34,77 % en 2013 à 67,88 % en 2014. L'Ukraine et la Turquie suivant avec respectivement 13,28 % et 7,12 % du total des importations. D'après le directeur des ventes de Demco Steel, César Pharaon, cité par l'étude, les autres déterminants du prix de l'acier sont celui du minerai de fer et, dans une moindre mesure, le prix du pétrole puisque la Chine utilise essentiellement du gaz et du charbon dans ses procédés de fabrication.

Lire aussi
Les professionnels de l'immobilier parient sur la « positive attitude »

Le secteur immobilier tente de résister, malgré les nombreux aléas