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Économie - Exposition Dream

Le secteur immobilier tente de résister, malgré les nombreux aléas

Vacance présidentielle, conflit en Syrie, nouvelle phase d'instabilité en Irak... le secteur de la construction semble faire fi de la conjoncture locale et régionale.

Le secteur de la construction au Liban semble faire fi de la conjoncture locale et régionale.

Malgré les crises locales et voisines, et un net ralentissement de l'activité économique générale, le secteur immobilier au Liban semble ne pas manquer de souffle, comme en témoignent ces chantiers qui poussent un peu partout dans le pays et ce paysage, encore d'actualité, de grues grimpant toujours plus haut dans le ciel de la capitale.
Si l'exécution de certains projets a été ralentie par la conjoncture actuelle, tandis que d'autres ont été carrément mis en suspens, en raison de l'incertitude politique et sécuritaire, les projets en route et dans les délais demeurent majoritaires.
« Nous sommes habitués à de telles situations et nous avons appris à nous y adapter, particulièrement pendant les crises majeures qui ont ravagé la région et le Liban. Nous n'avons jamais cessé de travailler dans ce pays », souligne Georges Chehwane, PDG du groupe Plus Holding.
Optimiste, à l'instar de nombreux constructeurs et promoteurs, il mise sur une normalisation progressive de la situation au Liban. « Il existe comme une volonté internationale de garder le pays à l'écart des conflits actuels qui secouent la région et d'en faire un lieu sûr et stable (...) », ajoute-t-il.
Cette stabilité, cruciale pour l'économie en général et le secteur de la construction en particulier, avait pointé son nez au cours des premiers mois de l'année, avec la formation d'un nouveau cabinet consensuel, au terme de dix mois d'impasse politique, avant que le pays ne sombre dans un nouvel épisode d'incertitude, celui du vide présidentiel.

L'embellie, une brève parenthèse ?
L'accalmie des premiers mois s'était d'ailleurs reflétée sur le secteur immobilier qui a repris quelques couleurs, après trois années de baisse consécutive, dénotant un regain d'intérêt de la part des investisseurs. « Le secteur immobilier est très sensible à l'évolution de la conjoncture. Un moindre signal positif le fait rebondir », souligne à cet égard Samer Bissat, le directeur du projet Waterfront City, l'immense projet immobilier construit par le groupe Majid al-Futtaim à la marina de Dbayé. Un avis partagé par Philippe Tabet, directeur général de Har Properties, qui vient de lancer le projet « Allée des arts » à Gemmayzé. « Le secteur a besoin d'un déclencheur, une bonne nouvelle. Les fondamentaux sont bons. Nous n'avons pas un marché spéculatif », souligne-t-il.
Signe de reprise, sous l'impulsion de la formation d'un nouveau gouvernement, les ventes immobilières ont augmenté de 16 % sur les trois premiers mois de l'année, à 15 834 transactions, selon le registre foncier, après avoir reculé de 19 % au premier trimestre de 2013 et de 3,4 % durant la même période de 2012.
Effet de volume plutôt que de prix, la valeur globale des transactions immobilières a ainsi grimpé à 2,1 milliards de dollars fin mars, en hausse de 36 % par rapport au 1,5 milliard de dollars enregistrés au cours du même trimestre de l'année dernière.
Quant aux permis de construire, ils ont porté sur une surface de 3,4 millions de mètres carrés, en hausse de 18 % sur un an. Ces chiffres contrastent avec une baisse de 21 % au premier trimestre de 2013 et de 3,1 % au cours de la même période de 2012. Enfin, autre indicateur de relance : les livraisons de ciment, qui ont totalisé 793 000 tonnes au cours des deux premiers mois de 2014, en hausse de 14,5 % sur un an.
« Le marché foncier au Liban fait preuve d'une résilience face à la situation sécuritaire et politique, et ce grâce à plusieurs facteurs, parmi lesquels la superficie du pays et la rareté des terrains valables pour la construction. Il faut, en outre, satisfaire un nombre assez important de résidents, compte tenu de la densité populaire, ainsi que la demande des expatriés qui raffolent toujours d'avoir un pied-à-terre au
Liban », souligne Georges Chehwane.
Selon lui, « les Libanais vivant à l'étranger continuent d'être un pilier majeur de la demande immobilière. Ils désirent tous s'approprier une maison au Liban même s'ils n'y vivent pas ». « Selon certaines estimations, 75 % des appartements coûtant plus de 400 000 dollars sont achetés par des expatriés », souligne le PDG de Plus Holding.
Cet appétit parmi les Libanais hors Liban « n'est toutefois plus le même », tempère Massaad Farès, PDG de Prime Consult, « même s'il est en amélioration » par rapport aux mois précédents. L'engouement de ces derniers a en effet reculé depuis 2011 en raison de l'instabilité résultant du conflit syrien.
Preuve d'un repli, les transferts d'émigrés, un indicateur des liens financiers entre les résidents à l'étranger et leur pays d'origine, ont récemment été revus à la baisse par la Banque mondiale, à 7,2 milliards de dollars en 2013 et 6,9 milliards en 2012, contre des estimations initiales de 7,6 et 7,3 milliards respectivement.
« La demande des expatriés est fortement liée à la situation sécuritaire. Ces derniers reportent leur décision d'achat, dans l'attente de jours meilleurs », souligne Philippe Tabet.
Quant aux résidents du Golfe, qui représentaient une part conséquente de la demande étrangère, ils ont déserté le marché local, après l'interdiction de plusieurs pays à leurs ressortissants de se rendre au Liban. Cela s'est d'ailleurs reflété sur la demande pour les grandes surfaces et les appartements valant plusieurs millions de dollars.
« La demande pour les unités dont le prix évolue jusqu'à 500 000 dollars demeure satisfaisante et les transactions sont régulières. Le marché des appartements et bureaux variant entre 1 million et 1,5 million de dollars est également acceptable, mais le segment des unités au-delà de cette fourchette de prix est en stagnation », précise Massaad Farès.
Selon le registre foncier, 235 transactions immobilières ont été réalisées par des étrangers au premier trimestre de 2014 par rapport à 219 pour le même trimestre de l'an dernier. Si, dans l'absolu, ces chiffres reflètent une amélioration, la réalité est différente, en termes relatifs, le nombre de transactions immobilières réalisées par des étrangers représentant 1,5 % du total des transactions fin mars 2014, contre 1,6 % un an plus tôt et 1,9 % au premier trimestre de 2012.
La demande interne reste donc le principal levier du secteur à l'heure actuelle.
Selon Samer Bissat, 70 % des appartements déjà livrés du projet Waterfront City ont été vendus, dont 85 % à des Libanais. « Parmi ces derniers, 90 % résident au Liban », précise-t-il.

« Business as usual »
Face à une demande mitigée, marquée par un affaiblissement du pouvoir d'achat des résidents, une attitude de wait and see de la part des expatriés et des Arabes du Golfe, l'offre immobilière se maintient, dans l'espoir d'un regain de dynamisme, en s'orientant davantage vers les petites surfaces pour séduire des clients locaux en quête de prix abordables. Dans l'ensemble, les projets immobiliers se poursuivent donc, même si certains investisseurs ont décidé de suspendre leur activité ou de mettre la clé sous la porte. L'épisode le plus réputé de la ville reste celui du grand projet Bella Casa lancé par Mena Capital en mai 2012, qui a récemment été suspendu jusqu'à nouvel ordre. Situé dans le secteur Adlié, ce projet de trois tours résidentielles dans le nouveau « Soho » de Beyrouth devait être livré au cours de l'été 2015. Au bout d'un an et demi, les ventes n'ont toutefois pas dépassé 20 % des 180 appartements mis sur le marché, et ce en dépit d'une baisse de 15 % des prix, poussant ainsi la société à suspendre le projet. Pour d'autres compagnies immobilières, le climat, certes entaché des multiples incertitudes liées à la vacance présidentielle et aux récents évènements en Irak, reste plutôt au « business as usual ».
« Nos projets sont en constante évolution et l'activité de construction suit le calendrier prévu depuis leur lancement. À présent, le taux de vente propre au projet "Sama Beirut" a atteint 40 % tandis que 60 % du projet "Point A" a déjà été vendu », souligne Massaad Farès. « Nous travaillons, en outre, sur un nouveau projet à Achrafieh qui sera bientôt lancé sur le marché et sur le développement de projets en dehors de la capitale », ajoute-t-il. « Sama Beirut », lancé en août 2009 avec un coût global de 200 millions de dollars, comporte 80 appartements et 11 étages de bureaux qui seront livrés sur le marché en octobre 2015. Quant au « Point A », lancé en 2010 et dont le coût s'élève à 30 millions de dollars, il comporte 14 étages de bureaux qui seront livrés en août 2016.
Même son de cloche « optimiste » du côté de Plus Properties. La société possède aujourd'hui 21 immeubles distribués sur sept projets, dont deux à Yarzé, deux à Monteverde, deux à Solidere et un projet à Bhersaf (Tilal Bhersaf). « Tous ces projets sont dans leur phase finale, tandis que nos ventes ont atteint 65 % du stock total, qui comporte 226 appartements et 27 magasins », indique Georges Chehwane.
Le projet Waterfront City ne peine pas non plus à trouver des acquéreurs. Un quart des 1 800 à 2 000 unités résidentielles ont déjà été écoulées, alors qu'une grande partie du mégaprojet est encore en cours de construction. Celui-ci porte, entre autres, sur la construction d'un quartier d'affaires composé de 12 immeubles au total, baptisé Business Park. « Sur les deux immeubles déjà construits, 85 % des bureaux ont été vendus jusque-là », précise Samer Bissat.
Le scénario n'est pas différent pour le groupe Har Properties. « Nous avons des projets dont le coût total tourne autour de 50 millions de dollars. Le projet Aya à Mar Mikhaël est déjà vendu à hauteur de 75 %, tandis que 40 % des appartements de Upark, à la corniche du Fleuve, ont été vendus. Enfin, le lancement du nouveau projet "Allée des arts" a été une franche réussite. Nous avons déjà placé 30 % du projet en une semaine », conclut Philippe Tabet.

Malgré les crises locales et voisines, et un net ralentissement de l'activité économique générale, le secteur immobilier au Liban semble ne pas manquer de souffle, comme en témoignent ces chantiers qui poussent un peu partout dans le pays et ce paysage, encore d'actualité, de grues grimpant toujours plus haut dans le ciel de la capitale.Si l'exécution de certains projets a été ralentie...

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