Si la séance ministérielle de jeudi dernier a fait office de répétition générale couplée d'une démonstration de force tranquille, ce ne sera vraisemblablement pas le cas mardi prochain. De source informée, on estime que le Conseil des ministres qui se tiendra la semaine prochaine sera décisif. D'autant que l'intention à peine voilée du Premier ministre Tammam Salam de démissionner a suscité hier un tollé diplomatico-politique susceptible de faire réfléchir à deux fois ce dernier avant de claquer la porte du Sérail. Le téléphone de Tammam Salam n'a pas arrêté de sonner hier. Il a en effet été contacté par les ambassadeurs arabes et occidentaux qui lui ont tous demandé de tenir bon.
Car le Premier ministre le sait, il n'a objectivement d'autre choix que de rester et de résister. Même si, subjectivement, il est compréhensible d'être tenté de jeter l'éponge, comme l'a affirmé hier le très compatissant ministre de l'Information Ramzi Jreige : « Je crains qu'il ne prenne une décision difficile qui lui permettra de préserver sa dignité. »
De source informée, on estime que le prochain Conseil des ministres sera décisif. L'exécutif sera soit redynamisé une fois pour toute, soit il sombrera dans un coma végétatif qui promet d'être long.
Jeudi dernier, les ministres présents à la réunion n'ont fait que ressasser ce que Tammam Salam savait déjà. Conscient du cercle vicieux dans lequel il est en train de s'enferrer, et le pays avec lui, il a donc agité le carton rouge de la démission, dans le but d'effrayer l'ensemble des 24 ministres présents ou du moins une bonne partie d'entre eux. Il espère ainsi récolter le soutien actif et la coopération des ministres du chef du mouvement Amal Nabih Berry, du chef du Parti socialiste progressiste Walid Joumblatt et du courant du Futur. À cet égard, la mésentente Berry-Aoun pourrait lui être utile pour débloquer la situation. De plus, les résultats des tractations tripartites de Djeddah entre le chef du parti des Forces libanaises Samir Geagea, Walid Joumblatt et Saad Hariri devraient également transparaître dans les jours qui viennent. D'autre part, la visite à Téhéran du ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius, le 29 juillet courant, et durant laquelle il devrait évoquer le dossier libanais, notamment la vacance présidentielle, serait également de nature à influer sur les prises de position des différents camps politiques.
En attendant, le bloc aouniste continue de réclamer « un retour au mécanisme de prise de décision qui avait été adopté par le passé dans la lignée de la Constitution et des lois », comme l'a martelé une nouvelle fois le député Farid el-Khazen. Du côté du bloc du Hezbollah, on évoquait jeudi dans un communiqué paru quelques heures seulement après une réunion ministérielle totalement stérile « la déliquescence de l'État ». Hier, c'est le mufti jaafari Ahmad Kabalan qui est à son tour monté au créneau en s'en prenant avec une violence verbale notable à la classe politique du pays qu'il estime uniquement préoccupée par « le pouvoir, les postes, les acquis et les ambitions » personnelles. Il a ainsi reproché aux autorités d'avoir « lamentablement échoué », ajoutant qu'il n'y a « plus d'hommes au Liban ». Son prêche du vendredi s'est ainsi terminé sur un appel à la révolte lancé au citoyen.
Le drame, c'est que les raisons de se révolter ne manquent pas, surtout à l'heure où les tonnes d'ordures ménagères croupissent sous le soleil de juillet à chaque coin de rue, et ce sur la majeure partie du territoire libanais. Le drame encore, c'est l'absence totale d'alternative, dans le cas où le dernier verrou institutionnel que représente encore tant bien que mal le Sérail viendrait à sauter, parce que justement le palais présidentiel de Baabda est vide. Et c'est conscient de la gravité de la situation que le patriarche maronite, le cardinal Béchara Raï, a appelé hier les différentes composantes politiques chrétiennes à nommer leurs candidats respectifs sans tarder, dans l'espoir peut-être d'un prochain déblocage de l'élection présidentielle.
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LES BOYCOTTEURS SONT " BIL MIRSAD" À CHAQUE BIFURCATION DU CHEMIN...ET... C'EST CE QU'ILS ATTENDENT POUR VIDER COMPLÈTEMENT TOUTES LES INSTITUTIONS DU PAYS... NE LEUR DONNEZ PAS CETTE CHANCE !
10 h 50, le 26 juillet 2015