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Moyen Orient et Monde - Égypte

Dans le Sinaï, les jihadistes « voulaient s’emparer de Cheikh Zouweid », comme Daech de Mossoul

En menant une vague d'attentats de grande envergure contre l'armée, l'EI a montré sa capacité à agir au grand jour. Et malgré l'offensive de l'armée égyptienne, l'organisation prospère. Antoine Basbous, directeur de l'Observatoire des pays arabes (OPA) et auteur de l'ouvrage « Le tsunami arabe », dresse un état des lieux pour « L'Orient-Le Jour ».

Un porte-parole militaire a publié sur sa page Facebook des dizaines de photos montrant les cadavres ensanglantés de « terroristes ».

Après deux ans de campagne, l'armée égyptienne n'a pas réussi à déloger le groupe État islamique (EI) au Sinaï, une péninsule historiquement instable où les jihadistes profitent du relief accidenté et du soutien d'une partie de la population. L'EI a démontré mercredi sa capacité à agir au grand jour en menant une vague d'attaques sans précédent contre plusieurs positions de l'armée. Elles ont fait 70 morts dans la localité de Cheikh Zouweid dans le nord du Sinaï selon des responsables, tandis que le bilan de l'armée s'établissait à 17 soldats tués et 100 jihadistes abattus.
Ces affrontements et attaques dans le Sinaï « sont inédits et uniques à la fois par leur intensité, leur nombre, leur qualité et leur force de frappe », a déclaré à l'AFP Mathieu Guidère, spécialiste français des mouvements jihadistes. « L'armée égyptienne au Sinaï est dépassée et n'est pas bien préparée à affronter une guérilla islamiste très organisée et bien entraînée », précise-t-il.


Mais pour le politologue Antoine Basbous, joint par L'Orient-Le Jour, les jihadistes avaient comme programme de conquérir Cheikh Zouweid, de la même manière que Daech (acronyme de l'organisation État islamique) a pris Mossoul en Irak. En outre, il s'agirait plus « d'une véritable armée que d'une guérilla », estime le politologue. « C'est quelque chose de très puissant et de très structuré ; au point de se demander s'il n'y a pas d'éléments fugitifs de l'armée, des dissidents qui auraient rejoint cette organisation, comme ce fut le cas à l'automne 2013, quand un bâtiment militaire avait été la cible d'un attentat à Rafah. Des officiers égyptiens étaient dans la combine », poursuit-il.

 

(Lire aussi : « Si l'on ne fait que de la répression, la lutte antiterroriste ne peut pas fonctionner »)

 

Soutien des tribus
Ces derniers mois, les attaques les plus meurtrières au Sinaï ont été revendiquées par le groupe Ansar Beït al-Maqdess, qui a fait allégeance à l'EI en novembre et dont le dirigeant est l'énigmatique chef religieux Abou Oussama al-Masri.
Péninsule d'environ 60 000 km² entre la Méditerranée et la mer Rouge, le Sinaï a longtemps été un territoire disputé, notamment avec Israël, avant d'être rendu en 1982 à l'Égypte, qui y a développé le tourisme autour de la station balnéaire de Charm el-Cheikh sur la mer Rouge.
Dans la province du Sinaï, plusieurs factions jihadistes sont présentes : « les forces traditionnelles jihadistes héritières de la Jamaa islamiya, du Jihad islamique des années Sadate, qui ont soit embrassé el-Qaëda, soit l'EI », rappelle M. Basbous. « Celles-ci ont un terrain doublement favorable. D'une part, elles sont à proximité de Gaza avec ses 2 000 tunnels, qui ont été détruits, et d'autre part, dans un environnement tribal qui conteste l'État, et qui considère que celui-ci vole les richesses du Sinaï en exploitant ses ressources touristiques sans qu'il y ait développement. La combinaison de ces deux facteurs fait que le Nord-Sinaï est devenu un sanctuaire terroriste avéré qui attire non seulement des jihadistes mais tous les déçus des Frères musulmans qui se radicalisent », poursuit le politologue. En outre, les jihadistes se sentent « comme un poisson dans l'eau » au sein de « la population locale, composée de nomades et de tribaux qui entretiennent de bonnes relations avec eux », souligne M. Basbous.


Après les affrontements des derniers jours, l'Égypte s'est dit déterminée à éradiquer les jihadistes dans la péninsule du Sinaï. Le président Abdel Fattah al-Sissi a promis une législation antiterroriste plus dure et dès mercredi, le gouvernement a approuvé une nouvelle loi qui doit « offrir une justice rapide et venger nos martyrs », selon un communiqué. Puis, dans la nuit de mercredi à hier, l'armée a affirmé dans un communiqué être « déterminée à arracher les racines du terrorisme noir ».

 

 

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