À peine l'épisode de Hayda Haki du 9 juin diffusé, que Adel Karam s'est attiré comme jamais les foudres du public lorsqu'il a choisi comme sujet de sa satire un candidat qui a présenté le brevet libanais à 62 ans. Sa « profonde » estime pour le vieil élève a certes été exprimée publiquement, mais entre deux railleries, comme s'il cherchait à se dédouaner d'avance. Mais cela n'a pas suffi à le sauver d'un procès impitoyable sur les réseaux sociaux.
Le chroniqueur a commencé sa diatribe en disant que son proverbe préféré était mieux vaut tard que jamais. Il a enchaîné en reprenant le reportage diffusé lors du JT de la MTV et qui retraçait le parcours du candidat libre, Abdallah Taleb, qui voulait à tout prix obtenir ce diplôme. Il s'est ensuite adressé à ce candidat à travers les caméras par une série de questions, en « le ridiculisant », selon une large tranche de ses admirateurs, pourtant fervents. « N'est-ce pas encore tôt, Abdallah ? Vous allez obtenir votre diplôme un an avant votre retraite, cela en vaut-il la peine ? » s'est interrogé Adel Karam, visiblement très amusé. Pire encore, lorsque l'animateur demande à M. Taleb s'il comptait suivre des études secondaires et quand, au juste, il le ferait... « À 90 ans? » a-t-il lancé, particulièrement ironique.
La majorité de l'opinion publique a été profondément choquée. Les critiques ont plu sur ce chroniqueur-comédien qui bénéficiait avant ce « faux pas » d'une immunité populaire indéniable. Face à un public qui pouffait de rire, habitué à cet humoriste qui ne se prend pas au sérieux et qui essaie constamment d'extirper le comique ou le léger des situations les plus dramatiques, M. Karam a irrité des milliers de téléspectateurs. Sans le vouloir, à en croire ses défenseurs. Sauf que la machine s'est très vite emballée : des Libanais de la diaspora et des étrangers se sont déchaînés sur les réseaux sociaux, tirant à boulets rouges contre l'équipe de Hayda Haki, qui s'est moquée sans ambages du droit à l'éducation à tout âge. Les internautes ont qualifié la tirade de Adel Karam d'indécente et de déplacée, voire « humiliante » pour ce « grand monsieur qui a déjà montré son courage en renversant les clichés si chers à la société libanaise, et la barrière de la différence d'âge pour réaliser un rêve qui lui est cher depuis tout petit ».
Toute la République a ainsi compati avec le candidat sexagénaire présentant ses examens officiels à Marjeyoun, au Liban-Sud. « Ce monsieur représente toute une génération qui a été empêchée de poursuivre ses études pour une raison ou une autre et qui tient à le faire contre et malgré tout. Tous nos respects, M. Taleb », a-t-on pu lire ici et là sur Facebook.
En revanche, d'autres internautes ont décuplé leurs efforts pour dépassionner l'affaire, et ont choisi de prendre la défense du chroniqueur. « Tout cela ne mérite pas d'être autant dramatisé. Adel Karam voulait juste faire sourire les téléspectateurs sans offenser le candidat, n'exagérons pas les choses... »
Au final, M. Karam a présenté ses excuses à Abdallah Taleb à travers un tweet, l'assurant de ses bonnes intentions et de son respect. L'animateur croyait ainsi mettre un terme au conflit, mais les réactions ont envahi de nouveau à la seconde même les réseaux sociaux. L'animateur a été attaqué frontalement et les internautes ont jugé que ses excuses n'ont aucune valeur. « M. Taleb ne va pas accepter tes excuses et ne les veut même pas », lit-on en réaction au petit mot posté sur le compte de M. Karam.
« La satire est une raillerie, plus ou moins indignée, qui critique les défauts, les abus ou les crimes d'un homme ou d'une époque. L'objectif de la satire reste donc de provoquer le rire, le sourire (en coin) par la moquerie et Adel a fait son travail », écrit un internaute.
« Oui, mais ici, la situation ne s'y prête pas, M. Taleb mérite tous les respects pour sa persévérance et son exploit, il ne commet pas d'abus, encore moins un crime, et ne présente aucun défaut, au contraire... C'est de la pure moquerie contre l'exploit d'un monsieur, à son insu et en son absence », rétorque un autre utilisateur de Facebook.
Toujours est-il que cette affaire montre la difficulté d'une émission de satire et sa fragilité dans le choix des sujets et des critiques, qui peuvent froisser la sensibilité des téléspectateurs. Comme dans une arène à l'époque romaine, ceux-ci, à tout moment, peuvent baisser leur pouce et retirer sa légitimité à leur star favorite si elle les déçoit.
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correction oblige : Encore une fois bravo Mr karam pour avoir (car je suis jeune)developper l'esprit de l'autocritique qui fait si défaut au libanais et surtout de bien donner l'exemple de ce qui se passe RÉELLEMENT chez les jeunes !! Je voudrais rajouter ici qlq chose de technique, du moment que ce Mr a accepter d'etre filmer son image devient "propriete" public... s'il ne voulait pas etre connu et ne voulant pas attirer l'attention sur lui il n'y aurai pas eu tout se tapage. maintenant une notion de ce
14 h 50, le 20 juin 2015