Rechercher
Rechercher

Nos Lecteurs ont la Parole - Abdel Hamid EL-AHDAB

Raymond Eddé, ce géant en cette époque de nains

En souvenir de Raymond Eddé, nous sommes invités à prier, rattraper le Royaume du rêve ...
Raymond Eddé n'est pas là. Il est absent depuis plus de quinze ans. Absent en nos consciences, absent en nos cœurs, absent en notre lutte pour la liberté.
Je me rends en sa demeure et je la trouve vide. Elle n'est plus l'antre de l'inspiration !
C'est toi, Amid, qui a commué la nuit en jour, qui a fait de la terre une fête, un festival !
Toi qui étais toujours en colère contre le mal et la bêtise, vois comment les politiciens se sont mués en moutons. Tu avançais, toi, sur un chemin semé d'épines et de bris de verre. Nos dignes politiciens dorment, eux, sur du velours et leurs discours sont aussi brillants que les tenues des danseuses !
Tu as fait le possible pour faire renaître ton Liban et le protéger. Tu as combattu l'accord du Caire et demandé la venue d'une force internationale bien avant qu'ils ne l'envoient dix ans pus tard. Tu as renforcé la sécurité en arrêtant « al-Takmil », à Basta. Tu as rendu la peine de mort obligatoire en matière d'homicide volontaire et tu as actionné la potence et fait régner la sécurité en notre Liban, alors qu'en leur Liban, la condamnation à cette peine a été refilée à la Chambre des députés.
Tu as assuré à notre Liban la prospérité par l'instauration de la loi sur le secret bancaire, puis la loi sur les loyers qui a excepté les immeubles de luxe et fait fleurir du coup les investissements immobiliers à Beyrouth.
Tu étais le railleur le plus sarcastique de leur Liban, celui du « kol we chkor », du président « demi-manches, demi-langue, demi-cervelle ». Tous admiraient ton courage, ta fermeté, ton patriotisme. Béchir Gemayel a lui-même combattu avec tes idées. Il est venu te voir à Paris pour te dire que tu avais raison, mais tu l'as rabroué et refusé d'entendre ses louanges. Tu n'as jamais accepté de rencontrer Michel Aoun parce que tu as su à quoi t'en tenir avec cet homme, avant nous tous.
Ils ont trois fois tenté de t'assassiner. Les Kataëb une fois et les Syriens deux fois.
Le dernier jour de ta vie, tu m'as dit : « Je regrette de m'être querellé avec Fouad Chéhab. Cet homme était le premier des patriotes et le premier bâtisseur de l'État. La faille du chéhabisme n'était pas le Deuxième Bureau mais l'arrogance dont il faisait montre et qui a porté les gens à élire un Michel Sessine et à en faire un leader.
Lorsque Alia el-Solh, qui est un autre Raymond Eddé (par le courage et le grand patriotisme qui la caractérisent), est venue te remettre un chèque de dix millions de dollars provenant des pays du Golfe, tu l'as déchiré et tu es entré dans une vive colère. Tu savais que Alia, qui n'est plus et qui a sûrement trouvé sa place au ciel, connaissait ta probité mais voulait néanmoins renforcer ta résistance parce que la politique est toujours une guerre, mais tu t'es cependant mis en colère parce qu'un Raymond Eddé ne se sert pas, dans sa guerre, de chèques. Saëb Bey avait une place importante dans ton cœur mais tu n'as pas caché ta colère lorsqu'il a tardé à annoncer son boycott des élections organisées par Assad au Liban. Tu l'avais appelé à Genève, après l'annonce de son boycott, pour lui dire «Ma bi saëb ella Saëb ».
Tu as toujours cru, Amid, que le travail politique est un travail religieux, cultuel, ayant ses rites, ses cérémonies et toujours empreint de pureté, et tu n'as jamais compris comment la politique nationale peut sortir du tuyau des narguilés et du craquement des grains des chapelets. Tu étais grand en cette époque de nains !
Après toi, Amid, est venu leur Liban marqué par la laideur, les scandales, la trahison, les assassinats... où la virilité a disparu et où les politiciens ont tous été formés à l'école des bars et des moukhabarat. Ils occupent tous des postes de macaques et chassent les mouches dans les cafés ! !
Amid, le temps a pris un coup de vieux alors que tu es demeuré jeune !
Tous les oiseaux ont une demeure à l'exception de ceux qui font de la liberté leur métier. Ils sont seuls à mourir hors de leurs patries.
Raymond Eddé ne meurt pas parce que la liberté ne meurt pas. Il demeurera, dans notre esprit, le symbole de la fierté et de la dignité du Liban.

Avocat

En souvenir de Raymond Eddé, nous sommes invités à prier, rattraper le Royaume du rêve ...Raymond Eddé n'est pas là. Il est absent depuis plus de quinze ans. Absent en nos consciences, absent en nos cœurs, absent en notre lutte pour la liberté.Je me rends en sa demeure et je la trouve vide. Elle n'est plus l'antre de l'inspiration !C'est toi, Amid, qui a commué la nuit en...

commentaires (3)

Exactement. Je le disais l'autre jour, Raymond Eddé, un géant, et à présent on est en pleine ère des nains. Merci Me Abdel Hamid El-Ahdab.

Halim Abou Chacra

17 h 30, le 15 mai 2015

Tous les commentaires

Commentaires (3)

  • Exactement. Je le disais l'autre jour, Raymond Eddé, un géant, et à présent on est en pleine ère des nains. Merci Me Abdel Hamid El-Ahdab.

    Halim Abou Chacra

    17 h 30, le 15 mai 2015

  • Le Ämîd Sain nous est proche. Il est en tout cas tout ce qu’on met au plus haut : sa scrupuleuse analyse de cette situation dont la complexité dérangeante n'est jamais niée, son refus énergique d'être dupe de ces autres et sûr de soi-même, 1 honnêteté intellectuelle à l’opposé d’une inaccessible objectivité jamais démentie. Aussi sa faculté, quand la situation l'exigeait, de faire sourdre l'émotion sans laquelle les tragédies humaines se dessècheraient. Mais sans pour autant s'abandonner à l'émotivité, qui altère et qui, parfois, corrompt. Sur ce plan toujours si humain et si Sain, c'est fou ce que la tendresse revient sans cesse dans l'évocation de ce Sain Ämîd. Et c'est bien qu'il ne soit pas seulement une abstraction sèche puisque le voici, même dans la situation actuelle et même après son décès, emblématique. Un Saint pourtant si souvent décrié, insulté, condamné et pas seulement par ses ennemis Malsains et Satanés. Par hygiène et aussi pour prévenir la virulence de leurs inévitables attaques, il ne faut jamais cesser de bien rappeler, lorsqu'il arrive qu’on parle d’eux, qu’on estime en général que ce monde Malsain est un enfer, un abîme de trahisons et d’iniquité. Que c’est même la locomotive du mensonge ! Que, et pour rester dans la nuance, on ne comprend pas qu'une main si Saine et si pure telle celle du Ämîd ait pu toucher un de ces veules Malsains Satanés sans, naturellement, avoir une convulsion de dégoût et de rejet.

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    16 h 19, le 15 mai 2015

  • N'EN FAISONS PAS UN SAINT... MAIS IL ÉTAIT UN VRAI ET BON LIBANAIS !

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 13, le 15 mai 2015

Retour en haut