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À La Une - Charlie Hebdo

Si un journal libanais publie une caricature du prophète, il sera déféré devant la justice

Aucun exemplaire de l'édition du jour de Charlie Hebdo dans les kiosques.

Une pancarte présentée lors d'un rassemblement en solidarité de Charlie Hebdo, le 11 janvier 2015 à Beyrouth. REUTERS/ Jamal Said

Alors que la presse internationale est divisée sur le fait de publier ou non des caricatures du prophète, le débat est tranché au Liban : aucun média n'a publié, en gros plan du moins, la une de l'édition du jour de Charlie Hebdo. Le magazine lui-même n'est pas disponible au Liban.

Pour son premier numéro depuis l'attaque meurtrière perpétrée mercredi dernier contre la rédaction, le magazine satirique a publié en une une caricature du prophète, sur fond vert, couleur de l'islam. Mahomet, la larme à l’œil, porte une panneau sur lequel est écrit "Je suis Charlie", son visage étant surmonté du message "Tout est pardonné".

Si un organe de presse libanais avait publié cette une, cela "n'aurait pas échappé" à la censure, affirme une source haut placée au sein du bureau censure de la Sûreté générale (SG). "Toute atteinte à la religion et à sa dignité est censurée", affirme-t-elle à L'Orient-Le Jour.

 

(Dans le décret-loi n° 2 873, promulgué le 16/12/1959 et notamment son article 9 relatif à la direction de surveillance des imprimés, il est indiqué que la censure agit notamment sur base du respect des sentiments et des sensibilités des citoyens, et pour éviter d'attiser les dissensions racistes et religieuses et que des indications d'application ont été adoptées pour organiser la censure et apporter des éclaircissements aux principes mentionnés dans les lois en vigueur notamment en ce qui concerne ce qui nuit aux religions et appelle à l'adoration de Satan) Plus d'informations ici

 

Que serait-il arrivé si un organe de presse libanais avait décidé de publier la une de Charlie Hebdo sur laquelle figure une caricature du prophète ? "L'organe en question aurait immédiatement été déféré devant le tribunal des imprimés afin d'analyser le dossier", précise la source qui souligne que des sanctions pouvant aller jusqu'à la "fermeture" de l'organe peuvent être envisagées. "La décision finale revient au ministre de l'Intérieur", précise néanmoins la source.

Pour Ayman Mehanna, directeur de l'ONG SKeyes pour la liberté de la presse, tout est question d'interprétation. "La loi sur les imprimés interdit la publication de ce qui incite à la discorde confessionnelle et porte atteinte à la religion ou au culte. Le code pénal interdit également tout ce qui porte atteinte à l'entité divine, explique-t-il. A partir de là, tout est ouvert à interprétation". 

 

"Des peines de trois à six ans de prison"

Pierre el-Khoury, professeur et avocat spécialisé en droit des médias et des nouvelles technologies, rappelle lui que la liberté d'expression et de la presse est inscrite dans la Constitution libanaise (Art. 13 "La liberté d'exprimer sa pensée par la parole ou par la plume, la liberté de la presse, la liberté de réunions et la liberté d'association sont garanties dans les limites fixées par la loi").

En matière juridique, les organes de presse écrite tombent sous le coup de la loi sur les imprimés, qui date du 14 septembre 1962, à laquelle sont venus s'ajouter certains textes de lois, dont le décret-loi 104 du 30 juin 1977 sur les imprimés qui énumère les "interdictions de publier".

Dans l'affaire des caricatures, en cas de publication d'un dessin représentant le prophète, certains pourraient invoquer une atteinte aux bonnes mœurs, une diffamation, une atteinte à l'ordre public, précise Me Khoury.

La diffamation, la calomnie et l'injure sont listés dans l'article 20, chapitre 5 de la partie 1 de la loi sur les imprimés, avec des peines prévues de 3 mois à un an de prison. Dans l'article 75 du chapitre 2 de la partie 3, il est écrit que les marchands de journaux n'ont pas le droit de proposer un contenu contraire aux bonnes mœurs ou portant atteinte au sentiment national ou religieux ou à l'union nationale.

Dans le décret-loi 104, il est stipulé que l'injure et la diffamation sont considérées comme particulièrement graves si elles ont pour objet les ministres, les membres du Parlement, les fonctionnaires et les groupes de personnes en raison de leur origine, de leur appartenance à une ethnie, race ou religion. Le décret-loi 104 prévoit également une peine de détention préventive dans les cas concernant l'atteinte à la dignité du président de la République par la diffamation, l'injure ou l'outrage ou tout ce qui peut constituer un outrage envers les religions et troubler la paix publique ou susciter des dissensions confessionnelle. (source : rapport sur la censure au Liban établi en mars 2003 par l'ONG Nouveaux droits de l'homme au Liban, qui a un statut consultatif auprès des Nations Unies)

L'affaire de la publication peut également tomber sous le coup de l'article 473 du code pénal libanais qui réprime le blasphème public du nom de Dieu, et l'article 474 qui punit l'outrage public à l'un des cultes célébrés en public ou l'incitation au mépris de ces derniers.

Ces articles ont été invoqués à plusieurs reprises dans le cadre de plaintes contre le virtuose libanais du oud, Marcel Khalifé. Ce dernier a été poursuivi en 1996, 1999 et 2003, pour sa chanson Je suis Joseph, Oh Père, écrite par le poète palestinien Mahmoud Darwiche, rappelle M. el-Khoury. M. Khalifé était accusé d'insulter les valeurs religieuses en incluant deux lignes de versets d'un chapitre du Coran. Le procureur reprochait à l'artiste d'"insulter les valeurs religieuses en utilisant un verset du Saint Coran sur Joseph dans une chanson". Le chanteur et compositeur risquait entre six mois à trois ans de prison pour insulte publique de la religion (article 474 du Code pénal libanais) et un mois à un an de prison pour blasphème (article 473 du Code pénal). Ghada Abou Karroum, la juge chargé du procès, avait rejeté la demande du procureur, et déclaré le chanteur innocent.

En rupture de stock à travers la France quelques heures seulement après avoir été massivement distribué dans les points de vente, le premier numéro post-attentat de Charlie Hebdo n'est pas disponible au Liban, a confirmé à L'Orient-Le Jour un responsable au sein de la société Messageries du Moyen-Orient de la Presse et du Livre (MMO), qui importe notamment des titres de la presse étrangère. "Nous n'avons pas le titre dans nos commandes. Nous avons contacté l'éditeur de l'hebdomadaire, mais celui-ci n'avait aucun numéro prévu à l'export à destination de Beyrouth", indique la source au sein des MMO. Les Messageries n'ont d'ailleurs jamais importé de "Charlie Hebdo" à destination du marché libanais, et ce en raison du "faible rendement" du journal avant l'attentat, ajoute la source. Propos confirmés par la source au sein de la Sûreté générale, qui affirme n'avoir jamais enregistré d'entrée de numéros de Charlie Hebdo au Liban.

 

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Alors que la presse internationale est divisée sur le fait de publier ou non des caricatures du prophète, le débat est tranché au Liban : aucun média n'a publié, en gros plan du moins, la une de l'édition du jour de Charlie Hebdo. Le magazine lui-même n'est pas disponible au Liban.
Pour son premier numéro depuis l'attaque meurtrière perpétrée mercredi dernier contre la rédaction, le...

commentaires (10)

une kestion? pq etre destabiliser par des dessins (caricature) d'ailleurs le mot meme caricature veut dire deformer la realite, si et seulement si vous etes convaincu de la force de votre foie?

Bery tus

15 h 50, le 15 janvier 2015

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Commentaires (10)

  • une kestion? pq etre destabiliser par des dessins (caricature) d'ailleurs le mot meme caricature veut dire deformer la realite, si et seulement si vous etes convaincu de la force de votre foie?

    Bery tus

    15 h 50, le 15 janvier 2015

  • SI UN ARTISTE TRÈS DOUÉ RENCONTRE MOHAMMED DANS SON RÊVE, CE SONT DES CHOSES QUI PEUVENT ARRIVER NON ? IL N'A PAS LE DROIT DE REPRODUIRE CE QU'IL A VU ? SON PORTRAIT .

    Gebran Eid

    13 h 16, le 15 janvier 2015

  • Et dire qu'il s'agit d'un dessein qui, en l'occurrence, n'a rien d'offensant ! Au contraire. le prophète est montré magnanime. Il pardonne.

    Halim Abou Chacra

    12 h 56, le 15 janvier 2015

  • je suis surpris de cette censure obscurantiste ...pourquoi censuré la caricature ou la photo ...d'un homme prophète d'une religion , que personne n'a vu depuis au moins 1300 ans ...? les écrits religieux prescrivent 'ils ce genre de chose...?

    M.V.

    12 h 42, le 15 janvier 2015

  • Printer, qui dessine pour olj vient de passer sur l'écran d'un des majeurs répaires sionisistes en france, f-24 qui espérait écouter autre chose, il vient de dire que lui, sachant certaines sensibilités et les blessures qu'il aurait pu causer à beaucoup de lecteurs dans leur spiritualité intime, il n'aurait jamais fait des dessins sur le prophète vénéré et iconoclaste de l'Islam et qu'il s'agit là d'une limite morale et intellectuelle que le dessinateur meme doit se poser avant meme que cela ne soit débatu sur d'autres plans comme la "Liberté d'expression". Nous apprenons aussi par un message éclair (!?) que le comique controversé Dieudonné vient d'etre arreté par la police française (certainement sur ordres du démocratique criminel natanyahou qui vient de passer sa troupe en revue à paris) pour avoir dépassé d'un "mot" les limites de la déscence etc... Bonjour la liberté d'expression avec laquelle on bassine les oreilles, hein? Valls et la gente sionisée réussiront peut-etre à en faire un héro.

    Ali Farhat

    03 h 48, le 15 janvier 2015

  • J' ai une question pour tous ceux qui se sentent offusqués face à la caricature du prophète. Si je prend la photo de Haïfa Wehbe et que j'indique voici ma chère femme. Cela ne fera pas de Haïfa Wehbe mon épouse (domage:)) et tout le monde sait que c'est faux sauf les imbécile. Alors qu on dessine ou caricaturiste un personnage et on dit c le prophète on sait bien que c'est faux, faux pas dramatiser

    Afla-Tony

    20 h 42, le 14 janvier 2015

  • Liban, phare culturel du Moyen-Orient ... ! Et mon c** c'est du poulet !

    Remy Martin

    19 h 44, le 14 janvier 2015

  • SI UN JOURNAL LIBANAIS PUBLIE DE TELLES PROVOCATIONS... FAUT MÊME PAS EN PENSER... Où EST LA LOGIQUE DES CHOSES ? IL METTRA LE PAYS EN FEU ET EN SANG !!!

    LA LIBRE EXPRESSION

    19 h 30, le 14 janvier 2015

  • Comparez ce que ces commandos salafowahabites ont fait à Charlie Hebdo et ce que votre équipe de Marines a fait à Oussama ben Laden. Des deux côtés, ils étaient entraînés à tuer. Des deux côtés, ils ont tué des gens désarmés au nom de leur cause. Ben Laden avait été accusé d’un crime sérieux, qu’il niait. Aucun procès n’a eu lieu. Aucun verdict n’a été rendu. Les dessinateurs avaient eux aussi été accusés d’un crime sérieux — du moins c’est ainsi que les islamistes radicaux le voyaient. Des deux côtés, ils ont abattu des innocents qui n’avaient été accusés de rien”. Quelle est la différence ?. On met Dieudonne en garde a vue et les dirigeants francais et occicons frequentent des tenants de l'ideologie wahabite sans etre inquiete , ou est la difference ?

    FRIK-A-FRAK

    18 h 49, le 14 janvier 2015

  • Caricaturer le prophete est donc un crime, mais TUER. DECAPITER, VIOLER au nom de ce meme prohete est halal?? Allez expliquer tout ca...

    IMB a SPO

    18 h 35, le 14 janvier 2015

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