La France a mis en garde samedi contre toute "complaisance" à l'égard de Téhéran, refusant de lier l'épineux dossier nucléaire à la participation iranienne à la lutte contre le groupe Etat islamique (EI).
"Si l'Iran souhaite lutter contre Daech (acronyme pour l'EI), c'est bien parce que ce groupe peut constituer une menace contre ses propres intérêts", a déclaré le ministre français de la Défense Jean-Yves Le Drian lors du "Dialogue de Manama", un forum annuel organisé par l'Institut international d'études stratégiques (IISS).
"Espérer un appui accru de l'Iran à nos efforts contre Daech en échange d'une complaisance de notre part sur les violations par Téhéran de ses engagements en matière de non-prolifération serait une erreur profonde", a-t-il souligné.
A cet égard, le responsable français a réaffirmé la fermeté des grandes puissances sur le dossier nucléaire iranien: "Notre détermination collective à lutter contre les tentatives de Téhéran d'accéder à toute capacité nucléaire militaire demeure entière" et "il n'est pas possible d'envisager la sécurité régionale autrement".
(Lire aussi : Guerre contre l'EI : Téhéran incontournable "pour le meilleur et pour le pire")
Mardi dernier, le Pentagone a révélé que des chasseurs-bombardiers iraniens, des F-4 Phantom, avaient mené des raids aériens contre des positions de l'EI dans l'est de l'Irak, près de la frontière iranienne.
Le lendemain, le secrétaire d'Etat américain John Kerry avait jugé que toute frappe de l'Iran contre l'EI aurait "au final" un effet "positif".
Sur le dossier nucléaire, l'Iran et les grandes puissances viennent de manquer une occasion de conclure un accord, mais Washington et Téhéran ont assuré que rien n'était perdu, la négociation se trouvant à nouveau prolongée de sept mois.
Comme un expert iranien, Seyed Hossein Mousavian, interpellait M. Le Drian en affirmant que rien ne prouvait que l'Iran cherchait à acquérir l'arme nucléaire, le ministre a répondu: "Non, je le sais pas. L'AIEA (Agence internationale de l'énergie atomique) ne le sait pas non plus". Et d'ajouter: "le meilleur moyen pour garantir votre interpellation, c'est d'aboutir à un accord lorsque le processus ira à son terme dans six mois. Merci d'y contribuer. Ce que nous souhaitons".
La 10e édition du "Dialogue de Manama" s'est ouverte vendredi soir à Bahreïn et se poursuivra jusqu'à dimanche, en présence de délégations du monde entier comprenant des ministres de la Défense, des Affaires étrangères, des militaires, des diplomates et des experts en matière de sécurité.
La lutte internationale contre l'EI et la politique régionale de l'Iran ont largement dominé les débats de ce forum organisé chaque année à Bahreïn.
(Repère : Nucléaire iranien : plus de dix ans de crise)
Méfiance
Cheikh Khaled ben Ahmed Al Khalifa, ministre des Affaires étrangères de ce petit royaume du Golfe qui abrite la Ve Flotte américaine, s'en est pris à Téhéran.
"Certains Etats régionaux caressent l'ambition de dominer l'ensemble de la région ou autant qu'ils le peuvent", a-t-il affirmé, en déplorant que ces visées aboutissent à la "méfiance" et à un "manque de coopération et d'information" dans le contexte de la lutte contre les groupes jihadistes en Irak et en Syrie. "Nous ne pouvons nous permettre d'être sélectifs dans le choix de nos alliés", a déclaré son homologue irakien Ibrahim Al Jaafari, dont le pays est proche de Téhéran.
(Pour mémoire : Au-dessus de l'Irak, Américains et Iraniens s'évitent soigneusement)
Le secrétaire d'Etat britannique aux Affaires étrangères Philip Hammond a reconnu que l'Iran était "un voisin difficile, mais important. Trop gros pour être ignoré" car ce pays est un "facteur vital pour l'avenir de la sécurité dans le Golfe".
Concernant l'épineux dossier nucléaire, M. Hammond a estimé que la communauté internationale devait "choisir la persévérance au lieu de la commodité": ne rien céder sur l'enrichissement de l'uranium, au lieu de "succomber à la tentation de faire des concessions imprudentes".
De son côté, le ministre égyptien des Affaires étrangères Sameh Choukri, interrogé sur les ambitions de la nouvelle Egypte, a déclaré que Le Caire souhaitait "s'impliquer davantage" dans les affaires régionales après les turbulences de ces quatre dernières années. Cependant, a-t-il ajouté, "nous n'avons pas besoin de créer de nouvelle entité ou d'architecture" régionale, la Ligue arabe et le Conseil de coopération du Golfe remplissant selon lui ces fonctions.
Lire aussi
Quand les cartes et les alliances se redessinent au Moyen-Orient, le commentaire d'Anthony Samrani
Les défis des États-Unis au Moyen-Orient
Khamenei : "Nous n'avons aucun problème avec l'Amérique, mais avec les demandes tyranniques"
"Si l'Iran souhaite lutter contre Daech (acronyme pour l'EI), c'est bien parce que ce groupe peut constituer une menace contre ses propres intérêts", a déclaré le...
commentaires (4)
Et qui donc demande à paris de lier ces 2 dossiers?? Paris se pose des questions et se donne des réponses.. et des airs..tout seul. Paris peut aller se faire voir chez le turque erdogan glou-glou efendi ou chez le arabes démoncrates des oligarchiques familles du golfe pétrolifère; ses amis démocrates.
Ali Farhat
22 h 14, le 06 décembre 2014