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Culture - Cimaises

Bagatelle, auberge espagnole ou art ludico-poétique ?

Plus d'une quinzaine d'artistes aux inspirations diverses exposent à la galerie Tanit de Munich, sœur jumelle allemande de celle sise à Mar Mikhaël à Beyrouth. Pour cet amusant « Jardin de bagatelle » (titre de l'expo ! ) au « front row », deux Libanais : Mona Hatoum et Ghassan Zard. Petite promenade sous les frondaisons d'un univers au sérieux discutable...

Ghassan Zard, une sculpture en bois et métal.

Au 45 Maximillianstrasse, pour un espace de 220 m2, avec fenêtres donnant sur une rangée d'arbres centenaires aux branchages touffus, la galerie Tanit offre une palette d'œuvres pointues. Une vingtaine d'opus approximativement, originaux (comprendre qui ont du toupet!) et «rigolots» ajoute, très pince-sans-rire, la maîtresse de céans, Naïla Kettaneh Kunigk.
Brochettes d'artistes de tous horizons. Cela va de l'Allemagne profonde bien entendu à New York, en passant par la Suisse, la France, l'Écosse, Cuba, la Belgique, l'Iran et le Liban. À ce tableau de présentation, aux couleurs relativement internationales, s'inscrivent les noms de Ricardo Brey, Rosemarie Trockel, Lionel Estève, Urs Luthi, Marcel Odenbach, Mona Hatoum, Ghassan Zard, Van Eetvelde Sautour, Michel François, Laurent Grasso, Martin Assig, Charles Sandison, Curtis Anderson, Wim Delvoye, Hossein Valamanesh et Tony Oursler.
Humour, poésie, pied de nez aux conventions, témoignage, dénonciation de l'horreur au quotidien, rêve et fantasme, modernité à la légèreté de plume... voilà autant de thèmes abordés de manières différentes où l'harmonie le dispute au non-formalisme. Une œuvre d'artiste, c'est toujours une pensée en raccourci. Une notion de prémonition, de pressentiment, d'alerte, de vision. Pour certains, cela est aussi une provocation, une fumisterie, un non-sens érigé en objet d'intérêt ou incidemment de décoration. Mélange sulfureux de l'art contemporain qui ne recule devant aucune sophistication ou aucune prosaïque simplicité. Débat d'idées, d'attitudes, de comportement, de savoir-faire...
Brancusien est l'œuf, avec moineau posé sur ses pattes fragiles, en matières à la fois dures et malléables, du Cubain Ricardo Brey sur son trépied en bois pour recevoir le visiteur. L'œil s'égare dès lors sur le carré en plexiglas de Rosemarie Trockel, ainsi que son dollar de sable (!) en une défense et illustration de la vanité de la société. Urs Luthi (que les amateurs d'art ont pu découvrir il y a un an à Beyrouth, grâce justement à une expo organisée par la galerie Tanit) essaye de trouver sa voie dans le dédale de la vie, en une juxtaposition d'images colorées...
À côté de lui, Mona Hatoum, toujours percutante, place au mur une passoire bouchée (photo ci-contre). Pas de sortie, pas d'issue. Le drame palestinien et ses séquelles grondent en ces trous hermétiquement cloutés... Totémique et phallique est ce massif tronc de bois poli clair de Ghassan Zard avec matraque à tête de massue et clips en fer plantés comme dans une chair jamais apaisée. Un douloureux souvenir d'un artiste qui n'oublie pas sa peau de dentiste ?
Toujours est-il que ce qui vient de l'Orient entre ces murs est fort comme un coup de poing. Avec la rage et la violence jamais contenues...
Sans titre, comme une bluette à côté d'un assourdissant coup de timbale, est le voisinage de la vaporeuse transparence du collage étoilé, en ton pastel, de Lionel Estève. Plus corsée et d'une approche plus agressive est cette nuit après une tempête de Marcel Odenbach où papier, encre et photocopie font, en une hallucinante méticulosité, d'inquiétants mélanges. Une forêt qui en cache une autre pour dénoncer les horreurs de la guerre. À travers un bout de branche verdoyant qui dévoile des images de tyrans et de torture sur coupures de presse greffées sur le bois noueux...
Et ainsi s'égrènent ces œuvres qui semblent parties de rien, mais où germe l'idée d'une révolte, d'une contestation, d'un témoignage, d'une prise de conscience, d'un sursaut de liberté. Tel ce fatras de « arte povera » utilisé en toute humilité et toute efficacité par l'Iranien Hossein Valamanesh. Une bouilloire avec une bougie qui brûle le manche du chauffe-eau, quelques écuelles et plats en terre cuite avec grains de sable et éléments de la terre sur une natte. Le tout exposé en tout dénuement et toute simplicité. Pour les nomades de tous crins. Frugalité contre opulence. Modestie contre fanfaronnade. Exclusion de la consommation contre frénésie des produits !
Pourquoi « Jardin de bagatelle » pour parrainer ces objets d'art qui n'en coûtent pas moins une bagatelle ? C'est par référence non au parfum de Guerlain dont ce lieu est devenu une image de marque, mais à la frivolité de Marie-Antoinette qui défie le comte d'Artois. De construire un château avec jardin d'un domaine qu'il vient d'acquérir, en un temps record ! ... « Bagatelle » dira ce dernier. Le pari est soutenu et les jardins fleurissent, mais la bagatelle coûte quand même des millions...
Par analogie, les artistes, partis de leurs idées et expérimentant matériaux et mélanges, érigent un monde entre rêve et réalité. Mais à prix d'or. Pensez un peu: ces œuvres décryptées coûtent. La fourchette va de 3500 à 130000 euros. Avouez, n'est-ce pas déraisonnable? Pour, entre autres, une bouilloire ou une passoire? Pour une babiole, c'est une vraie folie!
Mais l'art moderne est ainsi: une bourse aux courbes sans foi ni loi! C'est comme un acte de foi: il faut y adhérer sans comprendre! Alors peut-être on comprend ce que bagatelle veut dire...

Au 45 Maximillianstrasse, pour un espace de 220 m2, avec fenêtres donnant sur une rangée d'arbres centenaires aux branchages touffus, la galerie Tanit offre une palette d'œuvres pointues. Une vingtaine d'opus approximativement, originaux (comprendre qui ont du toupet!) et «rigolots» ajoute, très pince-sans-rire, la maîtresse de céans, Naïla Kettaneh Kunigk.Brochettes...

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