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« Nous avons assisté à un grand jour pour la démocratie en Afghanistan » - Présidentielle

« Nous avons assisté à un grand jour pour la démocratie en Afghanistan »

C'est la première passation des pouvoirs d'un président afghan démocratiquement élu à un autre ; les favoris évoquent tous des « problèmes ».

Zohra Bensemra/Reuters

« Problèmes », « irrégularités » voire « fraudes graves » : les trois candidats favoris de l'élection présidentielle afghane ont relativisé hier le succès du scrutin organisé samedi, tout en saluant l'entrain des électeurs qui ont voté en nombre malgré les menaces des talibans : plus de 50 %, selon plusieurs sources, un taux qui était à 30 % en 2009, mais qui sera probablement revu à la baisse...

À Kaboul comme dans les autres grandes villes du pays, Kandahar (Sud), Hérat (Ouest) ou encore Jalalabad (Est), les Afghans ont participé avec enthousiasme au premier tour de cette élection qui doit désigner le successeur de Hamid Karzaï.

Bizarrement et heureusement, l'élection s'est déroulée dans le calme et les autorités afghanes ont fait état d'une « participation énorme » : « Nous avons assisté à un grand jour pour la démocratie en Afghanistan », a estimé hier Zalmai Rassoul, l'un des trois favoris, lors d'une conférence de presse à Kaboul. Mais « manifestement, il y a eu des problèmes à certains endroits », a ajouté cet ancien ministre des Affaires étrangères, considéré comme le candidat du président Karzaï. « Ces problèmes ont été transmis à la Commission électorale des plaintes(ECC) et il est de son devoir d'y répondre pour que le vote ne soit pas faussé. Un président élu avec des fraudes ne sera pas accepté par l'Afghanistan », a-t-il dit, sans fournir de précision sur la nature de ces « problèmes ».

Même son de cloche du côté de son adversaire Ashraf Ghani, un ancien ministre des Finances. « Des informations font état de fraudes graves dans plusieurs endroits. Tout a été répertorié et sera transmis pour enquête à l'ECC », a-t-il déclaré sur Twitter.

(Repère : Guerres, élections et incertitudes: l'Afghanistan depuis 1979)

Enfin Abdullah Abdullah, le troisième favori de cette élection qui compte au total huit candidats, a qualifié le scrutin de « grand succès », mais estimé qu'elle n'avait pas été « exempte d'irrégularités ». Lors de la précédente élection présidentielle, en 2009, M. Abdullah, arrivé deuxième du premier tour, s'était retiré en dénonçant des fraudes massives, entraînant la réélection de facto de M. Karzaï.

Le défi
Samedi, de longues files d'attente d'électeurs enthousiastes s'étaient formées devant les bureaux de vote et parfois sous une pluie battante. Les images d'Afghans montrant fièrement leurs doigts marqués d'encre, prouvant qu'ils avaient voté, ont abondamment circulé sur les réseaux sociaux, comme un geste de défi aux talibans. « Je suis venue voter pour quelqu'un qui peut apporter une paix durable au pays. Je veux que mon vote soit une claque au visage des talibans », a déclaré Laila Neyazi, une femme au foyer de 48 ans couverte d'une burqa.

Peu après le vote, la communauté internationale a salué la mobilisation des électeurs afghans, signe selon elle des progrès accomplis par le pays depuis la chute des talibans en 2001. Le Conseil de sécurité de l'ONU a ainsi loué le « courage des Afghans qui ont voté malgré les menaces et les intimidations des talibans et d'autres groupes extrémistes ou terroristes ». Le président américain Barack Obama a salué ce vote : « Au nom du peuple américain, je félicite les millions d'Afghans qui ont participé de manière enthousiaste à l'élection historique. Ce scrutin est essentiel pour assurer l'avenir démocratique de l'Afghanistan et la poursuite de l'aide internationale. Nous comptons sur les instances électorales afghanes pour qu'elles mènent à bien leurs devoirs dans les semaines à venir et qu'elles annoncent les résultats », a-t-il espéré dans un communiqué.

(Lire aussi : Rose, gris ou noir : trois scénarios possibles après la présidentielle)

Le secrétaire général de l'OTAN, Anders Fogh Rasmussen, a quant à lui salué « le travail remarquable » des forces afghanes qui « pour la première fois ont mené l'ensemble des opérations de sécurité, avec un soutien minimal de la part de l'ISAF », la Force internationale de l'OTAN. « Il s'agit d'élections véritablement menées par les Afghans, dont la sécurité a été assurée par les Afghans, pour l'avenir des Afghans », a-t-il conclu.
Les résultats préliminaires du premier tour seront connus le 24 avril, avant un possible deuxième tour le 28 mai.

Bombe artisanale
Si le déchaînement de violence promis par les talibans n'a pas eu lieu, plusieurs incidents ont été signalés et les informations remontaient petit à petit hier.
« La journée (de samedi) a été intense pour nous », a dit Emanuele Nannini, un responsable de l'ONG Emergency, qui gère trois hôpitaux dans le pays, à Kaboul et dans les provinces du Panshir (Nord) et du Helmand (Sud). « Près de trente patients victimes de blessures liées au conflit ont été admis dans nos hôpitaux (...). C'est un nombre très élevé à ce moment de l'année », a-t-il souligné.
Hier, les autorités électorales afghanes procédaient à la collecte et au dépouillement des bulletins de vote, délicate opération qui pourrait faire l'objet de multiples contestations. Un camion transportant des urnes de vote a été détruit dans la journée par une bombe artisanale dans la province de Kunduz. « L'explosion a fait trois morts, dont un membre de la Commission électorale indépendante, un policier et un chauffeur », selon la police locale.

« Problèmes », « irrégularités » voire « fraudes graves » : les trois candidats favoris de l'élection présidentielle afghane ont relativisé hier le succès du scrutin organisé samedi, tout en saluant l'entrain des électeurs qui ont voté en nombre malgré les menaces des talibans : plus de 50 %, selon plusieurs sources, un taux qui était à 30 % en 2009, mais qui sera...