Marcel Carton, otage au Liban pendant plus de trois ans pendant la guerre civile, est mort jeudi à l'âge de 90 ans, a révélé Nice Matin.
Fonctionnaire du ministère français des Affaires étrangères en poste au Liban, Marcel Carton avait été kidnappé par le jihad islamique le 22 mars 1985, non loin de l'ambassade de France où il travaillait. Il ne sera libéré que le 4 mai 1988 en compagnie d'un de ses collègues à l'ambassade, Marcel Fontaine (kidnappé avec lui), et du journaliste Jean-Paul Kauffmann. Le chercheur Michel Seurat sera aussi détenu avec les trois hommes, mais mourra en détention en mars 1986.
Marcel Carton est né à Lattaquié, ville syrienne où servait son père, Noël Carton, militaire de carrière. Sa mère, Sophie Sultan, est Libanaise. Il fait ses études chez les frères des Écoles Chrétiennes à Beyrouth. Pendant la Seconde Guerre mondiale, il s'engage comme volontaire, en août 1944. Il rentre au Liban en 1946 et intègre l'ambassade de France.
Rétrospective de l'Institut national audiovisuel (INA)
En mai 1999, Marcel Carton était revenu sur ses années de captivité lors d'une interview accordée à la Revue du Liban.
"Depuis ma libération, je ne me lasse pas d'admirer la nature. Imaginez un peu de vivre 1.138 jours enfermé dans des sous-sols, des appartements calfeutrés, fermés hermétiquement, sans fenêtres. On ne voyait rien, on ne savait plus ce qu'étaient la verdure, le soleil, les fleurs, la vie extérieure", racontait-il.
"Une fois, on nous a ligotés les poignets derrière le dos, couchés par terre, sur le ventre, la tête contre le mur en nous prévenant : +On attend des ordres très importants dans les trois heures qui suivent. On recevra un message qui nous indiquera si on vous tue ou si on vous laisse en vie... +. Vous ne pouvez vous imaginer dans quel état nous étions ; nous n'arrivions même plus à avoir peur... On priait seulement, on ne s'arrêtait pas de prier", disait-il encore à la Revue du Liban.
Pour M. Carton, le plus dur, lors de cette détention, a été l'absence de nouvelles de sa famille. "Je n'avais aucune nouvelle de ma femme et de mon fils. J'ai reçu deux fois par Radio France International des messages de mes filles. Mais rien de mon épouse et de mon fils. Ma femme avait eu une crise d'angine de poitrine et je me demandais si elle était en vie", déclarait-il au mensuel libanais.
Les traits creusés, Marcel Carton était apparu très éprouvé dans une vidéo diffusée au cours de sa détention. "Je survis comme un rat malade, exténué, qui a perdu son instinct vital", y déclarait cet homme à la santé fragile.
Mais vint enfin le jour de la libération (vidéo ici). "Jusqu’au moment où l’on m’a mis dans l’avion, le 4 mai 1988, je n’ai pas cru à ma libération. J’étais très affaibli et n’arrivais pas à marcher, ni à monter l’escalier. Je remerciais Dieu, mais j’étais très triste pour Thomas Sutherland qui est resté prisonnier jusqu’en 1991".
"C'est la fin d'un cauchemar", confiera-t-il à sa libération le 4 mai 1988, après trois ans, un mois et 13 jours de captivité.
Malgré tout, Marcel Carton dira avoir pardonné à ses geôliers. "J'ai compris que c'étaient des primitifs sans culture, des fanatiques aveugles. Dieu m'a écouté et m'a sauvé. Je vis, c'est l'essentiel".
Marcel Carton était officier de la Légion d'honneur, officier de l'Ordre du mérite et officier de l'Ordre national du cèdre. Il était marié à une Libanaise et père de quatre enfants. Il sera enterré lundi à Nice, où il habitait.
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Ne pas oublier que "jihad islamique" était, à l'époque, un pseudonyme du Hezbllah.
18 h 16, le 01 mars 2014