Cela aurait été, à la limite, Salim Salhab ou même, oui même Nabil Nicolas à la Santé, Chakib Cortbaoui à la Justice, Ghassan Moukheiber aux Affaires sociales, voire Ghassan Rahbani (...) à la Culture, que l'on aurait pu, en faisant un énorme effort intellectuel, comprendre, pas accepter : juste vaguement comprendre, cet acharnement hystérique et mono-obsessionnel à ne donner le ministère de l'Énergie qu'à Gebrane Bassil. À refuser jusqu'aux Affaires étrangères et n'importe quel autre portefeuille pour que le gendre vénéré conserve son califat.
Ce n'est pas tant cet übercaprice qui choque. Depuis que le monde est monde, le népotisme bourgeonne, plus ou moins ostentatoire, plus ou moins scandaleux. Quoique : dans le cas Bassil, même les papes Alexandre VI, Paul III ou Urbain VIII auraient levé un sourcil circonspect. Ou sifflé d'admiration. Ce qui reste particulièrement énorme, les limites de l'obscène n'ayant jamais été poussées aussi loin, c'est la justification de cet entêtement. C'est toute cette littérature aounienne qui scande chaque intervention publique du chef du CPL et de ses lieutenants depuis quelques jours.
Ce qui est inouï, c'est cette façon d'asséner le plus sérieusement du monde que si l'Énergie ne revient pas, pour deux, douze ou cent mois, à Gebrane Bassil, eh bien c'est toute la communauté chrétienne qui se retrouvera bafouée, v(i)olée, nanisée, et avec elle le onzième commandement apocryphe que Moïse a oublié de noter ; c'est la Charte, la Constitution, Taëf, Doha et tutti quanti qui en prendront plein la gueule : l'excellent Edmond Rabbath a dû s'étrangler dans sa tombe à l'évocation de son nom depuis la cour (de récréation) de Rabieh ; c'est Israël qui jubilera, heureux et libre enfin de pouvoir piquer au Liban tous les gaz sous sa barbe et son nez ; c'est la planète qui s'écroulera.
C'est cela finalement et rien d'autre que cela l'esprit, et la lettre du aounisme. C'est ghettoïser encore et encore, communautariser à outrance, rapetisser chaque Libanais davantage, si tant est que cela soit encore possible, au niveau de son identité sectaire, forcément meurtrière, salement étriquée. C'est saper l'État encore et encore en le dépeçant, en s'appropriant ses institutions, surtout les plus juteuses, en les ramenant, cerise sur le gâteau, même pas à la tribu, mais au cercle primitif, paléolithique, de la famille. C'est abonder dans le vocabulaire vomitif et désormais insupportable de la traîtrise et des accusations de traîtrise, c'est propulser le pays, dans une chute infernale, vers des abîmes vichyssois et des équations sclérosées : qui n'est pas pro-8 Mars est donc nécessairement pro-israélien, c'est-à-dire : qui ne veut pas de Bassil à l'Énergie est donc nécessairement prosioniste. C'est cela finalement et rien d'autre que cela, l'esprit et la lettre du aounisme : le triomphe de la milice. Mais par en dessous. En cachette. Honteusement, alors que le Hezbollah, au moins, assume.
C'est bien là le problème : si seulement il assumait, le aouniste. Si seulement il assumait, au lieu d'asséner, sans état d'âme aucun, que le ministère de l'Énergie a des racines historiques au Liban. Si seulement il assumait, au lieu de prétendre préserver, par le biais de ce portefeuille décidément très biblique, le droit des chrétiens.
Prendre le Libanais chrétien en général, aouniste en particulier, pour un incurable crétin : rarement le Just do it made in Rabieh n'aura été aussi loin.
Liban - En dents de scie
L’évangile selon saint Michel
OLJ / Par de Ziyad Makhoul, le 01 février 2014 à 00h00
Dure est cette critique virulente , trop nuisible car quand on pense que le ministère des Affaires Etrangères est devenue pour une confession toute seule ainsi que le ministère des Finances de même , pourquoi le ministère de l'Énergie ne reviendra pas aussi à Gebrane Bassil?
17 h 16, le 01 février 2014