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Liban - Infrastructure

L’inauguration du barrage de Hammana alimente les polémiques

La municipalité et les habitants craignent un danger majeur dû au risque sismique.

Les forces de l’ordre étaient déployées en force pour empêcher les manifestants de se rendre sur le lieu de pose de la première pierre.

Mercredi dernier a eu lieu la cérémonie de pose de la première pierre pour le barrage dit de Qaïssamani, parrainée par le ministre de l’Énergie et de l’Eau Gebran Bassil, qui était présent. Non loin de là, des membres du conseil municipal et des centaines d’habitants de Hammana manifestaient pour exprimer leur refus de la construction de ce barrage.
Ce barrage devrait être construit avec un budget du Fonds koweïtien et réalisé sous la supervision du Conseil du développement et de la reconstruction (CDR). Selon le ministre, « le projet initial devait assurer un demi-million de mètres cubes d’eau pour 18 millions de dollars, alors que ce projet, pour 21 millions de dollars, nous donnera un million de mètres cubes ». Il a précisé qu’il fallait encore compter cinq millions pour les expropriations et un million pour la supervision par un bureau de consultants. Ce projet « est attendu par quelque 25 villages », a renchéri pour sa part Nabil Jisr, président du CDR, au cours de la même cérémonie.


Pourquoi ce refus de la part de la municipalité et des habitants ? Jean Abi Younès, membre du conseil municipal de Hammana, nous résume la situation comme suit : « Un premier projet de barrage avait été lancé en 1996, pour une capacité de 630 mille mètres cubes, sur une surface de 74 hectares, avec une expropriation de 100 mille mètres carrés à 100 000 dollars, déjà réglée. Soit un projet de 12 millions de dollars. Or aujourd’hui, le projet est de 25 millions pour un million de mètres cubes, sans compter les expropriations, dit-il. C’est une histoire de gaspillage énorme. De plus, le nouvel emplacement du barrage, qui ne desservira pas 25 villages comme ils le disent, se trouve directement au-dessus de notre village. »


Ce nouvel emplacement est au centre du problème. Antoine Jabre, ingénieur diplômé de Ponts et chaussées, originaire de la région, fait référence à des études qui montrent que cette zone est située sur une faille sismique très active, ce qui compromet la construction du barrage à cet endroit. Que se passerait-il si le mur du barrage rompt ? Il met en doute la connaissance des risques en cas de rupture du barrage « en raison d’un séisme ou d’un bombardement israélien, ce qui est déjà arrivé avant ». Selon lui, le débit d’eau accompagné de rocs et de débris serait susceptible de causer de graves dégâts dans le village, des vies humaines seraient en danger. À signaler que le ministre Bassil a assuré, dans son discours, que la taille du barrage n’était pas de nature à causer de telles craintes.


L’ingénieur s’est également opposé à la conception de la couche isolante en asphalte, ce qui comporterait un risque cancérigène, selon lui (un point qui a été pris en compte par les concepteurs de l’infrastructure). Enfin, il soulève un autre point très grave, selon lui : le barrage est construit juste au-dessus de la source de Chaghour qui alimente le village. La nature du sol au-dessus du site du futur barrage absorbe très peu l’eau, qui est acheminée naturellement vers des torrents. En cas de construction du barrage, cette eau ira se déverser dans le lac artificiel sans plus alimenter la source. « Cela signifie que la vallée connue pour ses points d’eau ayant attiré les touristes de tout le monde arabe risque une grave désertification, » déplore-t-il.


Pour sa part, le ministre Bassil avait indiqué, dans son discours d’inauguration, que ce barrage ne réduira pas de manière significative l’eau de Hammana, puisqu’il ne représente pas plus de 1,25 % de la superficie du bassin de la source. Il a assuré que la source de Chaghour restera inchangée. Un argument qui ne convainc pas M. Jabre.


M. Abi Younès, de son côté, rappelle qu’un décret présidentiel datant de 2005 avait défini un plan directeur qui protège les eaux souterraines avec un coefficient de construction de 1 %, donc autant dire que les constructions n’y sont pratiquement pas autorisées. Cette zone, rappelle-t-il, est une zone de protection pour la source, selon la loi. Or, dit-il, quand la municipalité a voulu le faire remarquer aux responsables, ceux-ci n’étaient pas au courant, mais n’ont pas changé leurs plans pour autant. C’est sur cette base que la municipalité a porté plainte auprès du juge des référés et attend la prochaine session qui aura lieu le 12 novembre.


La municipalité attend également les résultats de deux études commandées auprès de deux bureaux différents : l’une sur l’influence du barrage sur l’eau de Hammana (le résultat escompté est qu’elle en réduirait la quantité de moitié, selon lui), et l’autre sur le risque sismique. Par ailleurs, il balaie les accusations de vouloir priver d’autres villages d’une eau qui leur est précieuse, des accusations qui ont fusé le jour de l’inauguration. « Nos arguments sont purement scientifiques, et nous essaierons de convaincre les autres de leur bien-fondé », affirme-t-il.


Selon les informations que nous avons obtenues, les travaux sur le barrage devront débuter en mars 2014. D’ici là, la municipalité et les habitants auront-ils eu la possibilité de prouver leurs points de vue ou le projet restera-t-il inchangé?

 

 

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Mercredi dernier a eu lieu la cérémonie de pose de la première pierre pour le barrage dit de Qaïssamani, parrainée par le ministre de l’Énergie et de l’Eau Gebran Bassil, qui était présent. Non loin de là, des membres du conseil municipal et des centaines d’habitants de Hammana manifestaient pour exprimer leur refus de la construction de ce barrage. Ce barrage devrait...

commentaires (1)

Même pour édifier un barrage c’est l’entêtement du ministre Bassil qui triomphe ,voulant ignorer les points de vue des habitants de Hammana qui au fond sont les plus concernés en la matière . Adieu démocratie . Antoine Sabbagha

Sabbagha Antoine

15 h 01, le 25 octobre 2013

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Commentaires (1)

  • Même pour édifier un barrage c’est l’entêtement du ministre Bassil qui triomphe ,voulant ignorer les points de vue des habitants de Hammana qui au fond sont les plus concernés en la matière . Adieu démocratie . Antoine Sabbagha

    Sabbagha Antoine

    15 h 01, le 25 octobre 2013

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