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À La Une - Golfe

Le Qatar perd son rôle de pivot de la diplomatie arabe

L’émirat préfère se concentrer sur ses problèmes internes, d’autant plus que ses relations avec ses voisins laissent à désirer.

Cheikh Tamim ben Hamad al-Thani, nouvel émir du Qatar. Franck Fife/AFP

Trois mois après l’accession au trône du nouvel émir, le Qatar a perdu son rôle de pivot de la diplomatie arabe, avec la destitution du président islamiste en Égypte et la prise en main par l’Arabie saoudite de la gestion du dossier syrien, selon des analystes. Cheikh Tamim ben Hamad al-Thani, plus jeune chef d’État arabe, doit en outre gérer des relations difficiles avec les autres monarchies du Golfe, irritées par l’appui de son pays aux Frères musulmans, selon ces analystes et des sources politiques. 

 

Cheikh Hamad ben Khalifa al-Thani avait cédé le 25 juin le pouvoir à son fils, alors que son pays semblait encore à l’apogée de son influence dans le monde arabe. Une semaine plus tard, le président islamiste Mohammad Morsi était destitué par l’armée égyptienne. « Avec l’effondrement du pouvoir des Frères musulmans en Égypte, le compte à rebours de la fin de l’influence du Qatar a commencé », estime Antoine Basbous, qui dirige l’Observatoire des pays arabes basé à Paris. « Cela s’est répercuté négativement sur les islamistes en Tunisie et les milices proches des Frères musulmans en Libye », ajoute l’analyste.


Le richissime État gazier a soutenu politiquement, financièrement et par le biais de la puissante chaîne al-Jazira les Frères musulmans en Égypte, ainsi que le mouvement Ennahda en Tunisie, comme il s’était impliqué militairement dans le soulèvement libyen, soulignent les analystes. Il s’est également impliqué à fond dans la crise syrienne. Mais « l’influence du Qatar sur l’opposition syrienne a beaucoup faibli, c’est l’Arabie saoudite qui a désormais la main haute sur le dossier syrien », affirme un opposant syrien qui a requis l’anonymat. Il souligne que c’est un proche du royaume saoudien, Ahmad Jarba, qui a été élu à la tête de la Coalition de l’opposition syrienne en juillet dernier et qu’il a imposé Ahmad Tomeh, également proche de Riyad, comme Premier ministre intérimaire le 14 septembre. M. Tomeh a remplacé le candidat du Qatar, Ghassan Hitto, qui avait démissionné en juillet sans avoir pu former de gouvernement d’opposition.


Le Qatar continue cependant de fournir une aide militaire à des groupes armés islamistes, en coordination avec le Turquie, selon l’opposant syrien. Un responsable qatariote qui a requis l’anonymat a assuré que la politique du Qatar n’avait pas changé avec le départ simultané de l’ancien émir et de son flamboyant Premier ministre, cheikh Hamad ben Jassem al-Thani. « La politique étrangère du Qatar n’a pas changé. Nous ne soutenons pas les Frères musulmans, nous sommes à égale distance de toutes les parties et nous avons été les premiers à féliciter le président Adly Mansour », a souligné cette source. Quand à l’opposition syrienne, « c’est le Qatar qui a ouvert la voie devant la communauté internationale pour qu’elle soutienne la révolution syrienne », rappelle-t-elle. Mais elle souligne que le nouvel émir « a des priorités claires sur le plan intérieur : il s’agit de la santé, de l’éducation, de la jeunesse et de poursuivre l’essor économique tout en contrôlant étroitement les investissements à l’étranger ».


Pour Antoine Basbous, « le nouvel émir ne veut plus du rêve impossible des deux Hamad (l’ancien émir et son Premier ministre) car prendre le leadership du monde arabe à travers les Frères musulmans et la chaîne al-Jazira dépasse les capacités du Qatar ». Neil Partrick, analyste spécialisé dans le Golfe, estime aussi que « l’influence régionale du Qatar s’est beaucoup réduite depuis le coup d’État en Égypte, mais ce pays a toujours un poids économique, régional et international ». Signe de ses priorités, le jeune émir a choisi, pour son premier déplacement à l’étranger, de se rendre en Arabie saoudite, et un accord frontalier avec le puissant voisin a été annoncé. Mais « les relations du Qatar avec notamment l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et Bahreïn ne sont pas bonnes », affirme un responsable d’un pays du Golfe. « Le conflit est grand, surtout sur l’Égypte », ces pays soutenant le nouveau pouvoir égyptien alors qu’al-Jazira continue de défendre les Frères musulmans. En outre, les monarchies du Golfe soupçonnent le Qatar « de soutenir leurs opposants, et c’est pour elles une ligne rouge à ne pas franchir », ajoute le responsable. Et comme si ses ennuis politiques ne suffisaient pas, le Qatar subit des pressions internationales pour avoir remporté dans des conditions controversées l’organisation du Mondial 2022 malgré les fortes chaleurs du Golfe.

 

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