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Liban - La situation

Jouer à se faire mal

« Si un gouvernement monochrome est formé, le Liban ira en enfer » : ce commentaire, fait hier sur l’un des innombrables talk-shows télévisés par un porte-voix du 8 Mars, quoique de troisième catégorie, résume en quelques mots la méthodologie affectionnée par ce camp, en particulier par le Hezbollah.


On pourrait bien sûr attirer l’attention de ce monsieur sur le fait que le Liban se trouve déjà « en enfer », en quelque sorte, et que ce sont ses employeurs qui ont le plus grandement contribué à l’y expédier, mais là n’est point le sujet. Il se rapporte plutôt aux deux éléments essentiels que contient ce bref et laconique commentaire : le mensonge, d’abord, puis la menace, voire le chantage.


Il ne s’agit guère ici, on l’aura compris, de procéder à une analyse de texte pour l’amour de l’art ; simplement de mettre le doigt sur l’ossature même de la politique suivie par le Hezbollah depuis des années à l’égard de tout ce qui se rapporte à la vie politique libanaise.
Le mensonge ? Il réside dans l’affirmation selon laquelle un gouvernement « monochrome » (entendre un cabinet composé exclusivement de ministres issus du 14 Mars) est en passe d’être formé. Voilà des semaines, en effet, que les milieux huit-marsistes – aounistes compris – attribuent avec insistance à leurs adversaires une volonté de les « exclure » du prochain cabinet.


Sachant que jusqu’à cet instant, le 14 Mars n’a à aucun moment réclamé l’exclusion d’une formation politique en particulier, mais évoqué plutôt l’éventualité d’un gouvernement « neutre » ou alors pour le moins la mise en retrait de l’ensemble des figures trop marquées d’un camp comme de l’autre, on peut dès lors s’interroger sur les mobiles du 8 Mars.
Certes, ce camp tient, en apparence, un argument lorsqu’il affirme que le Premier ministre désigné, Tammam Salam, est issu des rangs du 14 Mars et qu’à ce titre, il ne saurait être classé parmi les « neutres » ou les « centristes ». Mais cette argumentation souffre d’une faille majeure, car elle ignore un principe élémentaire en démocratie, celui qui veut qu’un Premier ministre désigné représente justement tous ceux qui l’ont désigné. Ce n’est pas la faute aux règles démocratiques si, en désignant M. Salam, le 8 Mars se livrait à une manœuvre politicienne.


D’autre part, Tammam Salam, bien que proche du 14 Mars, incarne très précisément ce profil de la personnalité politique pas très marquée dans son propre camp. Il est donc tout à fait normal et légitime de sa part qu’il s’efforce, avec le soutien du président de la République, de mettre en place un gouvernement composé de ministres plus ou moins à son image, tant par rapport au 14 qu’au 8 Mars. Et c’est d’ailleurs le lamentable échec des gouvernements successifs de ces dernières années qui l’encourage dans cette voie.


C’est donc à la logique selon laquelle « tous ceux qui ne sont pas avec moi sont contre moi » que semble obéir la démarche du Hezbollah, puisque ce dernier laisse proférer des menaces d’une grande gravité, comme celle d’expédier le pays « en enfer » rien que parce qu’on lui propose, pour changer, de ne plus dominer – ni bloquer – le gouvernement.
Continuera-t-il sur cette lancée ? On n’en sait rien. Le parti de Dieu ne montre aucun assouplissement sur ce plan à l’heure même où les indices en faveur d’une formation d’un cabinet « neutre » ou « pas trop marqué » se multiplient, notamment après les propos tenus lundi par le chef de l’État à Beiteddine et les dernières prises de position du chef du PSP, Walid Joumblatt.


Nombre d’observateurs attribuent naturellement ce retournement de situation au rééquilibrage survenu ces dernières semaines sur le terrain de la guerre en Syrie, l’opposition ayant enregistré d’importants succès militaires, notamment dans le nord du pays et dans la province de Lattaquieh, censée être acquise au pouvoir.
Si la genèse et la forme du prochain gouvernement sont liées à ces développements syriens, certains événements dramatiques qui se produisent sur le terrain au Liban sont, eux, tributaires du... gouvernement. Certains milieux sont ainsi persuadés que « l’autorisation » ayant permis le rapt des deux pilotes turcs sur la route de l’aéroport a été délivrée principalement en signe d’avertissement à la suite de la multiplication des indices en faveur d’un gouvernement « neutre ». Corollairement, il s’agirait d’une réplique aux dernières prises de position du chef de l’État, lequel avait passé une bonne partie de l’été dernier à exiger justement la « neutralisation » de la route de l’aéroport.

 

(Lire aussi: Le bloc du Futur dénonce la complicité, au moins passive, du Hezbollah)


Quoi qu’il en soit, cet incident montre bien que cette vocation bien libanaise de jouer avec le feu ou du moins de se faire mal n’est pas passée de mode. Comme si les chiffres ultramoroses du tourisme estival ne suffisaient pas, la menace de nuages sur les relations libano-turques est venue couronner le tout.
Des sources diplomatiques turques, citées par notre correspondant au palais Bustros, Khalil Fleyhane, ont ainsi souligné que le ministre turc des Affaires étrangères, Ahmet Davutoglu, a exprimé, lors de son entretien au téléphone avec son homologue libanais, sa crainte de répercussions négatives du rapt notamment sur les échanges commerciaux et le trafic aérien entre les deux pays (quatre vols par jour).


Certes, le ministre turc n’a pas dit qu’il souhaitait de telles retombées, mais il a laissé entendre qu’elles ne sont pas à exclure, du moment que des incidents comme le rapt de vendredi pourraient encore se produire dans le périmètre de l’aéroport.
C’est précisément cette défiance à l’égard d’un poumon essentiel du Liban et de son économie qui est très dommageable. Et la réunion tenue hier par la commission parlementaire des Transports, au cours de laquelle la moitié des participants, à savoir les députés du 8 Mars, a cherché davantage à se disculper qu’à régler le problème, ne changera pas la donne.

 

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« Si un gouvernement monochrome est formé, le Liban ira en enfer » : ce commentaire, fait hier sur l’un des innombrables talk-shows télévisés par un porte-voix du 8 Mars, quoique de troisième catégorie, résume en quelques mots la méthodologie affectionnée par ce camp, en particulier par le Hezbollah.
On pourrait bien sûr attirer l’attention de ce monsieur sur le fait...

commentaires (5)

À MOINS QUE LE GOUVERNEMENT SOIT MONOCHROME HUITISTE... CAR ILS PRÉRENDENT... LES E.T... AVOIR ATTERRI SUR LA PLANÈTE TERRE... LA TÊTE AVANT LES PIEDS !!!

SAKR LOUBNAN

12 h 41, le 15 août 2013

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Commentaires (5)

  • À MOINS QUE LE GOUVERNEMENT SOIT MONOCHROME HUITISTE... CAR ILS PRÉRENDENT... LES E.T... AVOIR ATTERRI SUR LA PLANÈTE TERRE... LA TÊTE AVANT LES PIEDS !!!

    SAKR LOUBNAN

    12 h 41, le 15 août 2013

  • Eh bien non! le Liban n'est pas en enfer et ne le sera jamais tant qu'il y aura des Libanais de bonne fois... les Libanais aiment jouer avec le feu? oui sans doute.. et ce depuis les sacrifices faits à 3ashtarot... Mais ce qui est certain par contre, c'est que les criminels sionistes, leurs amis locaux et régionaux ainsi que ceux qui ne croient pas dans la possibilité de les dégager de nos terres, finiront eux en enfer. Je constate et je les ai compté et vous fournirai bientôt de chiffres, que le mot "hezb" et les arguments y afférents, sont certainement et de loin, les plus usités dans notre presse et ici même. Du calme, il faut respirer un coup.. pourquoi ne pas causer du ski nautique que fait notre maladroit ex pm au large de la Sardaigne entre 2 twitts carabinés sur le hezb et son Patron (tiens, lui aussi.. mais c'est vraiment une manie!!).. mais comme dirait aussi le poète Libanais: CHOU 2IMTO'L MA BYIN7AKA 3ANNO KTIR.

    Ali Farhat

    14 h 27, le 14 août 2013

  • Les courants politiques du 8 ou 14 mars semblent s'effriter . Plus de logique pour former un gouvernement ou gérer les retombées du rapt . Un divorce total . Antoine Sabbagha

    Sabbagha Antoine

    14 h 16, le 14 août 2013

  • Rien de nouveau a l'horizon de la part du Hezbollah et de ses sbires que mensonges, propagandes creuses et matamorismes futiles. Alors pourquoi perdre plus de temps inutilement. Il faut que le gouvernement soit formé comme le premier ministre désigné et le Président le décident. Le Hezbollah promet l'enfer, eh bien soit qu'il nous montre ce qu'il a dans le ventre et qu'il ose bouger son petit doigt. Chien qui aboie ne mord pas! Tout comme Assad en Syrie s'est retrouvé avec le trois quart de son peuple contre lui, le Parti des mollahs se verra au même diapason avec une différence majeure, Assad était l'Etat, le Hezbollah est une organisation terroriste qui pourrait être le catalyseur pour une intervention internationale qui le mettra a genou avec des conséquences graves pour le Liban dans l'absolu et les Chiites en particuliers. Est ce ce qu'ils cherchent, j'en doute!

    Pierre Hadjigeorgiou

    09 h 22, le 14 août 2013

  • le problème du Hezb,c'est tout simplement qu'il n'a plus de "majorité"...le nouveau FLN l'a laissé tomber,les nazis du PNSS comptent pour des prunes,et le CPL,ben le CPL en a marre de jouer les cocus consentants. Et çà,c'est emmerdant...est ce que les Libanais ont pour uatnt envie de voir confier le gouvernement à un 14 dont certaines composantes sont pour le moins attentives aux sirènes islaisto-salafistes? j'en doute fort. Faut trouver une solution médiane...et pour çà ,le parti infaillible de Dieu(le sien en tous cas) doit mettre de l'eau dans son arak...même s'il dit ne pas en boire.Ce qui est un autre foutu mensonge libanais.

    GEDEON Christian

    01 h 14, le 14 août 2013

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