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À La Une - Revendications

Au Brésil, la baisse du prix des transports ne calme pas la fronde

Le football ne fait plus rêver une partie de la population brésilienne, notamment en raison des investissements monstres injectés dans la préparation de la prochaine Coupe du Monde, prévue en 2014.

Des violences ont eu lieu entre des milliers de manifestants réunis aux abords du stade de Fortaleza, dans le Nord-Est du Brésil, et les forces de l’ordre. REUTERS/Davi Pinheiro

Des heurts violents ont de nouveau opposé mercredi soir manifestants et policiers dans des villes du Brésil, l'annonce d'une baisse du prix des transports en commun ne suffisant pas à calmer la fronde sociale, avec de nouveaux appels à manifester jeudi.

C'est la hausse de ces tarifs qui avait provoqué il y a dix jours l'étincelle de la révolte, en pleine Coupe des confédérations de football (15-30 juin). Certains observateurs comparaient le plus vaste mouvement social à embraser le Brésil en deux décennies aux récentes manifestations en Turquie ou même aux soulèvements des printemps arabes.

 

Cédant à la pression populaire, les mairies de Sao Paulo et Rio de Janeiro, les deux plus grandes villes du pays, se sont résolues mercredi à baisser les tarifs des transports en commun, comme d'autres villes avant elles mardi.

Mais mercredi soir, en dépit de cette victoire de la rue, des manifestations violentes ont eu lieu à Niteroi près de Rio et à Fortaleza, tandis que des milliers de protestataires défilaient dans une ambiance plus calme dans les rues de Belo Horizonte, Basilia et Rio Branco en Amazonie.

A Fortaleza, ville du Nord-Est, des échauffourées violentes ont eu lieu en marge du match Brésil-Mexique de la Coupe des Confédérations que la Seleçao brésilienne a remporté 2 à 0. Quelque 25.000 protestataires s'étaient massés dès le matin aux abords du stade protégé par un impressionnant dispositif de sécurité. Environ 10.000 manifestants ont jeté des pierres aux forces de sécurité qui ont répliqué avec des tirs de gaz lacrymogènes et de balles en caoutchouc.

Près de Rio, des policiers d'élite armés de boucliers ont tiré des gaz lacrymogènes sur un groupe de manifestants qui essayait de bloquer le pont de 15 km qui relie Rio de Janeiro à Niteroi, de l'autre côte de la baie, a constaté un photographe de l'AFP. Les manifestants ont également renversé un bus, saccagé deux vitrines d'agences bancaires avant d'ériger des barricades en bois auxquelles ils ont mis le feu pour maintenir la police à distance.

 

"Nous respecterons toujours la manifestation démocratique, pacifique mais nous ne pouvons admettre en aucun cas ces violences, ces désordres qui créent des problèmes aux habitants de Niteroi", a déclaré le maire de la ville, Rodrigo Neves, à la télévision Globo news avant la fin de la mobilisation qui a duré plus de cinq heures.

Impuissant à désamorcer la fronde sociale, le gouvernement avait annoncé dans la matinée l'envoi en renfort de troupes d'élite de la police pour protéger les six villes hôtes de la Coupe des confédérations: Rio, Recife, Fortaleza, Belo Horizonte, Salvador de Bahia et Sao Paulo.

Jeudi s'annonçait comme une journée sensible: des manifestations sont convoquées partout dans le pays. Et notamment à Rio, théâtre lundi soir de scènes de guérilla urbaine, en marge du match Espagne-Tahiti au stade Maracana.

 

La présidente Dilma Rousseff s'était déclarée mardi "à l'écoute" des revendications des manifestants, sans avancer de proposition concrète pour régler un conflit qui ne semble pas près de s'essouffler.

 

 

Le dieu football n'est plus

Les manifestations avaient commencé timidement à Porto Alegre, le 6 juin, avant de gagner rapidement Sao Paulo et de s'étendre à toutes les grandes villes du pays.

Les protestataires, surtout des jeunes des classes moyennes rejetant mondes politique et médiatique, qui se mobilisent via les réseaux sociaux, stigmatisent désormais plus largement la précarité des services publics de base au regard des milliards dépensés pour l'organisation du Mondial-2014.

Dans cette nation qui vénère le football, aussi bien parmi la classe aisée que pauvre, il peut être surprenant de constater que ce sport soit à l'origine d'un tel mécontentement populaire. Le dieu football n'est plu : tous les sacrifices semblent ne plus lui être autorisés. La dure réalité du quotidien des Brésiliens semble avoir pris le dessus. "Nous protestons car l'argent investi dans les stades devrait l'être dans l'éducation et dans la santé. Ils ont monté un cirque aux yeux du monde", déclarait un manifestant de Fortaleza, Matheus Dantas, 18 ans, à propos de la Coupe des confédérations et du Mondial de l'an prochain.

A l'intérieur du stade, violant les consignes de la Fédération internationale de football (Fifa), certains spectateurs ont brandi des pancartes de soutien aux manifestants sur lesquelles on pouvait lire: "Mon Brésil est dans les rues. Le géant s'est réveillé".

 

L'attaquant vedette de la Seleçao brésilienne Neymar, transféré à prix d'or au FC Barcelone et lui-même ciblé par certains protestataires, s'est déclaré solidaire mercredi du mouvement après trois de ses coéquipiers mardi, en critiquant l'action du gouvernement.

"Je suis triste de tout ce qui se passe actuellement au Brésil. J'ai toujours pensé qu'il ne devrait pas être nécessaire de descendre dans la rue pour réclamer de meilleures conditions de transports, de santé, d'éducation et de sécurité. Tout ça, c'est le DEVOIR (en majuscule, dans la version originale, ndlr) du gouvernement", a-t-il écrit sur les réseaux sociaux.

En revanche, le "roi Pelé", 72 ans, trois fois champion du monde avec le Brésil (en 1958, 1962 et 1970), a demandé dans une vidéo de soutenir la sélection brésilienne et d'oublier les manifestations.

"Nous allons oublier toute cette confusion qui se passe au Brésil et nous allons penser que la sélection brésilienne est notre pays, est notre sang", a dit Pelé.

 

 

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