Pathétique mais enrageante est cette mosaïque qui se délite sous nos yeux, cette construction unique qui s’est inclinée face à l’usure du temps. Pathétique parce qu’elle agonise sous les quolibets, sous les railleries assassines, enrageante parce qu’elle aurait pu servir d’exemple à toutes les autres mosaïques qui se font ou se défont dans le monde.
« Anne, ma sœur Anne, ne vois-tu rien venir ? » À cette adjuration d’anthologie sortie de la veine de Charles Perrault, les Libanais ne veulent encore voir que « le soleil qui poudroie et l’herbe qui verdoie ». Barbe bleue, lui, continue entre-temps d’officier en toute impunité, trucidant les derniers des justes, neutralisant les dernières résistances.
Et pourtant, que d’anomalies à énumérer, que d’exactions à dénoncer, que de crimes à soumettre au tribunal de l’histoire !
Aujourd’hui, plus que jamais, il faut oser. Oser dire leurs quatre vérités à tous ceux qui ont pris les Libanais en otages, qui ont sacrifié leur avenir sur l’autel d’intérêts égoïstes ; montrer du doigt ceux qui nous ont abreuvés de mensonges, qui ont intoxiqué les esprits et manipulé les cerveaux ; rejeter les faux messies et prophètes, ceux qui se croient investis de missions divines.
Aujourd’hui, plus que jamais, il faut oser. Oser dire au Hezbollah que « assez, c’est assez », que la duperie de la Résistance « pure et dure » s’est noyée dans les bains de sang de Qousseir, dans l’implication milicienne, fraîchement révélée, dans les atrocités perpétrées en Bosnie-Herzégovine et, hier même, à Bir Hassan sous les murs de l’ambassade d’Iran.
Oser dire à tous ceux qui emboîtent le pas à Hassan Nasrallah que le chemin de Chebaa ne passe ni par Qousseir ni par Homs, que ce chemin c’est au seul État et à son bras armé de l’emprunter, non aux hordes qui se sont discréditées dans des batailles marginales.
Oser dire, haut et fort, que le mensonge dure depuis treize ans, que le Liban-Sud a célébré sa libération en l’an 2000 et que le Hezb n’a gardé ses armes que pour mieux assujettir l’État à sa volonté et à celle de son parrain iranien.
Oser dire à toutes les autres parties libanaises, sunnites, druzes ou chrétiennes, qu’elles ont été au-dessous de tout, qu’elles ont raté des occasions en or pour empêcher l’irréversible, qu’elles ont privilégié les intérêts égoïstes à l’intérêt général et qu’elles assument autant que le « parti divin » la responsabilité de la déconfiture actuelle.
Oser dire au courant aouniste qu’il s’est fourvoyé en accordant une couverture chrétienne à l’aventurisme du Hezbollah, qu’il s’est fait manipuler au fil des crises et des rebondissements ; dire au courant du Futur qu’il a pêché par orgueil, qu’il s’est fait piéger par les salafistes et autres jihadistes, et que dans les moments décisifs il a brillé par son absence ; dire aux Forces libanaises qu’elles ont longtemps hésité, se sont empêtrées dans les contradictions et ont permis à leurs détracteurs d’enfoncer le « clou orthodoxe » au moment opportun.
Enfin, dire à l’autorité légitime, au chef de l’État qui l’incarne, que le temps est venu de taper fort sur la table, de désigner nommément ceux qui lui rognent les ailes, de les empêcher de prendre, une fois de plus, le gouvernement en otage et de leur faire assumer la responsabilité des infamies à venir.
Vœu pieux ? Vue de l’esprit ? Peut-être, mais l’histoire veille et réclamera, tôt ou tard, des comptes. De tergiversations en hésitations, un jour pourrait venir où les Libanais n’auront pas assez de larmes pour pleurer sur les décombres de ce qui n’aura été qu’une utopie...
Il faut oser dire qu'on ne peut plus vivre avec cette milice divine qu'est le HEZBOLLAH. Il faut oser dire qu'on ne veut plus d'eux ni au parlement, ni au gouvernement et si possible plus au LIBAN. Qu'ils aillent remporter leurs victoires divines en dehors du Liban et qu'ils nous laissent tranquille. Carlos Achkar
17 h 14, le 10 juin 2013