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Après Sleiman, le CPL présente un recours en invalidation de la loi sur la prorogation

Le Conseil constitutionnel devrait se prononcer avant le 20 juin, recommande Ibrahim Najjar.

Ils étaient sept députés du Courant patriotique libre à se rendre hier au siège du Conseil constitutionnel pour présenter un recours en invalidation de la loi qui a prorogé de 17 mois (jusqu’au 20 novembre 2014) le mandat de la législature actuelle (qui expire le 20 juin 2013). Au nom du groupe de députés, qui comprenait Simon Abi Ramia, Alain Aoun, Nagi Gharios, Nabil Nicolas, Ziad Assouad et Hikmat Dib, Ibrahim Kanaan en a appelé au Conseil constitutionnel « conscience du Liban et garant de la Constitution ».
Le recours, a précisé M. Kanaan, « n’est pas présenté pour des motifs politiques, mais constitutionnels ».
M. Kanaan a mis en garde contre une loi qui pourrait devenir « un précédent » et paverait la voie à tous les camps politiques qui voudraient se soustraire au verdict populaire. Il a parlé du « courage » dont doit faire preuve le juge pour prendre sa décision en toute impartialité et objectivité, sans se laisser intimider par un avis politique contraire à sa conviction intime.


Le recours en invalidation du CPL s’ajoute à celui que le chef de l’État, Michel Sleiman, a présenté voici trois jours.
Le Conseil constitutionnel, a assuré hier Ibrahim Najjar, ancien ministre de la Justice, dispose d’un délai limité « avant le 20 juin, date d’expiration du mandat de la Chambre, pour se prononcer à ce sujet ». M. Najjar a estimé que les dix magistrats du CC « auront le courage de se prononcer sur des bases constitutionnelles » et « exercer leur devoir d’ingratitude » à l’égard du pouvoir politique, comme l’a joliment rappelé hier un avocat, Nasri N. Lahoud. Ils devront le faire, précise-t-on, à la majorité des deux tiers, c’est-à-dire à la majorité de sept voix sur dix
Selon des sources informées, entre l’acceptation et le rejet du recours, le Conseil constitutionnel dispose d’une troisième option, le rejet qualifié. Dans ce cas, la prorogation serait acceptée, sur le fond, mais sa durée serait réduite et liée à la période nécessaire à l’organisation du scrutin.

Les arguments
Dans la forme, le CPL souligne que son recours est déposé dans le délai de 15 jours réglementaire, après la date de promulgation de la loi.
Sur le fond, le CPL s’emploie d’abord à démontrer l’anticonstitutionnalité, dans l’absolu, de toute prorogation ; il tente en outre de démontrer que les conditions invoquées par la loi, à savoir « la force majeure » et « l’état de nécessité », n’existent pas.
Sur le premier point, le recours se base sur le préambule de la Constitution, qui fait partie d’un « bloc de constitutionnalité » s’étendant à tout le texte de la Constitution et a donc valeur constitutionnelle, ainsi que sur les articles 27, 42 et 44.
L’argument le plus fondamental soulevé dans la première partie de l’argumentation touche à la notion de souveraineté populaire dans son rapport à la durée du mandat accordé par le peuple à la Chambre des députés.
Citant un ouvrage de référence (Institutions politiques- Droit constitutionnel – Pierre Pactet – 21e édition, pp. 87-88), le recours écrit : « Le principe de toute souveraineté réside dans la nation. Nul corps, nul individu ne peut exercer d’autorité qui n’en émane expressément. Elle comporte un certain nombre de conséquences. La nation, être collectif et unique, a une volonté et une seule : elle peut donc déléguer sa souveraineté, mais elle doit alors la déléguer tout entière à ses représentants élus, c’est-à-dire aux assemblées parlementaires (la souveraineté est indivisible) et elle peut le faire de manière temporaire, pour une durée limitée (la souveraineté est inaliénable), sans qu’aucune délégation d’exercice, aussi longue soit-elle, puisse l’empêcher de s’en ressaisir au moment de son choix (la souveraineté est imprescriptible). »
Le mandat accordé à chaque député, et à la Chambre comme corps unique, est de 4 ans, précise la Constitution. Le député ne saurait dépasser la durée du mandat qui lui est accordé par une décision unilatérale.
Et le document d’ajouter : « Le Conseil constitutionnel a clairement affirmé dans un considérant de principe que lorsque la Constitution confie à la loi la fixation des règles ou la détermination des principes, ceci » ne saurait dispenser le législateur, dans l’exercice de sa compétence, du respect des principes et des règles de valeur constitutionnelle qui s’imposent à tous les organes de l’État. « Le dernier membre de phrase est particulièrement significatif et important : aucun organe de l’État, aucun pouvoir institué n’échappe au respect de la norme constitutionnelle » (CC 82-132 D.C. 16 janvier 1982, Rec 18, Les grandes décisions du Conseil constitutionnel, 11e édition, n° 31, p. 459).
Et d’enchaîner en précisant que, s’il doit y avoir exception, « l’exception est de droit étroit ».

La force majeure
Le document s’emploie ensuite à montrer que le cas de « force majeure » ou « l’état de nécessité » invoqués par le législateur pour proroger le mandat de la Chambre n’existent pas, précisant en particulier que le fait que le gouvernement soit démissionnaire ne justifie en rien la non-
organisation du scrutin dans les délais, d’autant que les préparatifs nécessaires à l’organisation du scrutin ont été achevés dans les temps par le pouvoir exécutif.
« Le vide institutionnel doit être rempli par les élections, et non par la prorogation », insiste encore le recours du CPL, qui ajoute que le Liban n’est pas en état de guerre, comme il l’était en 1972, quand le mandat de la Chambre a commencé à être régulièrement prorogé.


La prorogation du mandat de la Chambre sous prétexte que des incidents sporadiques éclatent dans le pays ou que la division politique y est trop profonde « sont des excuses pires que la faute », dit le document ; des excuses qui pourraient justifier toutes les manipulations « et conduire, à la limite, au pouvoir discrétionnaire le plus absolu ».
« Qui donc pourrait garantir qu’à l’expiration de la période de prorogation, la situation serait plus propice à l’organisation du scrutin ? » s’interroge le document.
Par ailleurs, le CPL tourne en dérision certains des arguments invoqués par la Chambre pour justifier la prorogation (richesses gazières, saison estivale, paralysie économique), estimant que ces motifs justifient amplement que les Émirats recommandent à leurs ressortissants de fuir le Liban ou de ne pas s’y rendre...

Ils étaient sept députés du Courant patriotique libre à se rendre hier au siège du Conseil constitutionnel pour présenter un recours en invalidation de la loi qui a prorogé de 17 mois (jusqu’au 20 novembre 2014) le mandat de la législature actuelle (qui expire le 20 juin 2013). Au nom du groupe de députés, qui comprenait Simon Abi Ramia, Alain Aoun, Nagi Gharios, Nabil Nicolas, Ziad...

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