Floués, trompés les Libanais ? Menés en bateau, une fois de plus, comme à chaque échéance cruciale ? Bien sûr, sans l’ombre d’un doute, mais ils sont, quelque part, bien contents de l’être : un claquement des doigts de leurs maîtres à penser, un discours flamboyant et les voilà qui marchent, comme un seul homme, derrière leurs idoles.
D’un tribun chiite à un discoureur sunnite, d’un populiste maronite à un surexcité druze, la machine est naturellement huilée et il suffit de clamer, haut et fort, que la communauté est agressée, qu’elle est en danger, pour que les armes sortent de leurs étuis et que les insultes fusent.
Il peut se trouver, parfois, de rares fois, que ces forts en gueule, tels des larrons en foire, se retrouvent derrière un dénominateur commun. Et les voilà qui s’acoquinent, alors, pour faire passer une loi scélérate qui n’a pour objectif que de les maintenir en selle, de leur permettre, une fois le forfait accompli, de reprendre leurs guéguerres intercommunautaires sous les applaudissements des fans et des supporters de toujours.
Les plus fanatiques d’entre eux sont, naturellement, les intoxiqués du Web, des internautes disjonctés qui échangent leurs amabilités sur Facebook et Tweeter : des maronites insultant d’autres maronites « en toute démocratie », des chiites et des sunnites se promettant les foudres de l’apocalypse, des surenchères criminelles, des appels au meurtre encouragés par des envolées irresponsables. En somme, c’est la technologie, dernier cri, qui est mise au service de conflits moyen-âgeux.
Et les militants de la société civile, me diriez-vous, ceux qui ne décolèrent pas sur le Web, qui dénoncent les excès des uns et des autres, où sont-ils ces militants pour faire contrepoids aux moutons de Panurge, à tous ceux qui suivent aveuglément les avocats véreux des ruptures confessionnelles ?
Ils étaient là, vendredi, non loin du Parlement, dans ce centre-ville qui avait connu son heure de gloire un certain 14 mars. Ils étaient juste une poignée, quelques dizaines, munis de leurs armes de destruction massive : des tomates bien mûres et des calicots. Une poignée qui s’est démenée pour se faire entendre, qui a réussi à houspiller quelques députés et qui s’est éparpillée, la mort dans l’âme, une fois le spectacle achevé... Rideau!
Désespérée donc la situation ? Nul printemps libanais à espérer à l’ombre de cette mascarade qui se donne le nom pompeux de démocratie ? Les Libanais, cocus et conscients de l’être, ont trouvé la parade : ils font semblant, ferment les yeux et se plongent éperdument dans l’insouciance de festivités annonciatrices de temps heureux.
Une schizophrénie élevée au niveau de l’art suprême, une danse échevelée sur les pentes d’un volcan qui crache déjà son feu. Et de sursis en répits, de louvoiement en aveuglement, c’est l’essentiel qui est perdu : la conscience nationale.
Bien évidemment, et comme toujours, « la faute est aux Italiens ». La boutade est bien connue, elle n’est que le reflet d’une éternelle impuissance. Les Libanais, eux, n’ont pas fini d’en payer le prix...
C'est bien dit et c'est claire pour nos politiciens, + leurs suivants à la peau de crocodile. Elias W Chalhoub Chalhoub Elias
08 h 15, le 03 juin 2013