Rechercher
Rechercher

À La Une - Crise

Le "modèle suédois" ébranlé par des émeutes

Pour les experts, la colère a des racines profondes.

Des passants découvrent des voitures calcinées à la suite d'émeutes à Rinkeby, une banlieue de Stockholm, le 23 mai 2013. AFP/JONATHAN NACKSTRAND

Quatre nuits de caillassages, d'incendies et de dégradations à Stockholm et dans sa banlieue, l'oeuvre des jeunes habitants de quartiers déshérités et à forte population immigrée, ont écorné l'image d'une Suède pacifique et égalitaire.

 

Déclenchés dimanche soir après la mort d'un habitant de Husby, un quartier défavorisé de la capitale, abattu par la police qui a plaidé la légitime défense, les incidents se sont peu à peu étendus à une quinzaine de quartiers.

Jeudi dans la nuit, des pierres ont visé une antenne d'un commissariat de police à Kista, près de Husby, et deux autres antennes dans le sud de la capitale. Le bilan des violences contre les personnes est resté modeste, avec une personne touchée à la tête par un jet de pierre lors d'une manifestation à Husby jeudi, et un policier blessé dans la nuit de mercredi à jeudi.

 

Mais les incendies volontaires, visant les voitures et les bâtiments, se sont multipliés. Les pompiers faisaient état jeudi de 90 départs de feu. L'un d'eux a ravagé un restaurant de Skogaas, quartier d'Huddinge au sud de la capitale.

 

Ces violences ont provoqué un débat en Suède sur l'intégration des immigrés, qui représentent environ 15% de la population, se concentrent dans les quartiers pauvres des grandes villes du pays et connaissent un taux de chômage plus important que le reste de la population.

 

Selon des responsables associatifs locaux cités dans la presse, les auteurs des troubles reprochent aux forces de l'ordre leur racisme. Ces derniers accusaient des policiers d'avoir lancé des insultes comme "clochards", "singes" ou "sales nègres". La police a appelé les éventuelles victimes à porter plainte, et cherchait à minimiser la gravité des violences. "Tout blessé est une tragédie, toute voiture brûlée est un échec de la société (...) mais Stockholm n'est pas en train de brûler", a souligné un responsable de la police de la capitale, Ulf Johansson.

 

Les chercheurs en sciences sociales soulignaient que la colère avait des racines profondes.

"Vivre comme jeune dans ces endroits de ségrégation peut être très difficile de beaucoup de manières. Vous n'avez pratiquement aucun contact avec d'autres Suédois et souvent pas une bonne compréhension de la société suédoise", soulignait Aje Carlbom, anthropologue social à l'université de Malmö.

 

"Ma fille rentre de l'école et me dit que les autres enfants ne veulent pas jouer avec elle parce qu'elle est noire", dit Maria Petersson, une infirmière de 39 ans née en Ethiopie. "Je suis à la fois éthiopienne et suédoise mais je ne serai jamais considérée comme une Suédoise par les gens d'ici. Pour eux, je suis une immigrée."

 

Les quartiers où ont éclaté les incidents sont bien connus des habitants de Stockholm pour leur concentration de problèmes sociaux comme le chômage, l'échec scolaire ou le désoeuvrement de la jeunesse.

 

"Le pire vandalisme, ce n'est pas celui auquel nous assistons depuis quelques nuits dans les banlieues", a déclaré un responsable local, Arne Johansson, lors d'une récente manifestation de protestation à Husby. "Le vandalisme, insidieux, rampant, c'est avant tout celui de la politique menée depuis sept ans par ce gouvernement de droite."

 

Au pouvoir depuis octobre 2006, le Premier ministre de centre droit Fredrik Reinfeldt - pour qui les émeutiers sont des 'hooligans' - a baissé les impôts et réduit le montant des allocations, des mesures qui ont soutenu la croissance mais creusé les inégalités au sein de la population.

 

"L'écart entre les quartiers s'est accru" dans une ville où "le marché du logement est vraiment segmenté", estimait Eva Andersson, géographe urbaine de l'université de Stockholm.

 

Une voiture incenciée à Kistan, une banlieue de Stockholm; le 21 mai 2013. REUTERS/Fredrik Sandberg/Scanpix

 

 

La Suède est en outre devenue une destination prisée des immigrants en Europe. Elle a accueilli ces dix dernières années des centaines de milliers de personnes venues d'Irak, d'Afghanistan, de Somalie, des Balkans et récemment de Syrie.

 

Le Premier ministre conservateur Fredrik Reinfeldt, fervent partisan de l'accueil des immigrés, a voulu donner devant le Parlement l'image d'une nation unie. "Je pense qu'il est dangereux de vouloir dépeindre la Suède avec une capitale séparée de ses banlieues. Je ne pense pas que ce soit vrai. Je pense que la ligne qui nous divise traverse Husby, entre une population majoritaire et à côté un petit groupe de fauteurs de trouble", a-t-il déclaré.

 

Son ministre de l'Intégration Erik Ullenhag attribuait les violences à un chômage élevé et autres formes d'exclusion des quartiers où la population issue de l'immigration est majoritaire. "Nous savons qu'il y a une discrimination dans ces endroits, et ces événements n'améliorent pas l'image de ces quartiers, où il y a beaucoup de choses positives qui se produisent mais qui sont complètement éclipsées actuellement", a-t-il déploré, interrogé par l'agence de presse TT.

Le taux de chômage à Husby atteignait 8,8% en 2012, contre 3,6% à Stockholm.

 

Les incidents ont attiré l'attention des médias internationaux, suscitant des comparaisons avec des pays qui ont connu des vagues de violence dans les banlieues, comme la France ou la Grande-Bretagne. D'après M. Carlbom, "la Suède connaît une forte ségrégation, mais ces quartiers peuvent être encore plus durs dans d'autres pays".

 

Lire aussi

La Suède incite les pères à rester à la maison...

 

 

 

Quatre nuits de caillassages, d'incendies et de dégradations à Stockholm et dans sa banlieue, l'oeuvre des jeunes habitants de quartiers déshérités et à forte population immigrée, ont écorné l'image d'une Suède pacifique et égalitaire.
 
Déclenchés dimanche soir après la mort d'un habitant de Husby, un quartier défavorisé de la capitale, abattu par la police qui a...

commentaires (2)

ben oui,hein? la morgue suédoise en prend un coup...eux qui donnent des leçons de droits de l'homme aux autres européens,qui accueillent à bras ouverts,bosniaques,kossovars,tchétchènes et autres albanais....good morning Stokholm...bienvenue dans le vrai monde!

GEDEON Christian

17 h 21, le 24 mai 2013

Tous les commentaires

Commentaires (2)

  • ben oui,hein? la morgue suédoise en prend un coup...eux qui donnent des leçons de droits de l'homme aux autres européens,qui accueillent à bras ouverts,bosniaques,kossovars,tchétchènes et autres albanais....good morning Stokholm...bienvenue dans le vrai monde!

    GEDEON Christian

    17 h 21, le 24 mai 2013

  • Les immigrés le Mal du siècle pour une Suède pourtant la première dans le monde des droits de Lhomme .. Mais que faire face à l’illettrisme et la religion toutes deux aveugles ? Antoine Sabbagha

    Sabbagha Antoine

    14 h 00, le 24 mai 2013

Retour en haut