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À La Une - Métier

Devenir vétérinaire au Liban, est-ce possible ?

Il est grand temps peut-être que les universités libanaises redonnent toute sa valeur à la profession de vétérinaire, dont la formation n’est offerte qu’au sein d’une seule et unique université.

Yelda Hélou, une passionnée d’animaux.

Le métier de vétérinaire jouit en France ou au Royaume-Uni d’une importance particulière, avec plus de 20000 personnes exerçant cette profession dans chacun de ces deux pays. Au Liban, par contre, ce métier ne suscite pas encore l’enthousiasme des jeunes, qui préfèrent se diriger vers des formations plus traditionnelles, telles que la médecine humaine. En effet, les besoins du marché libanais sont encore flous à ce niveau et les opportunités de réussir ne semblent pas assez nombreuses. Par ailleurs, au Liban, l’Université libanaise (UL) est la seule à offrir une telle formation, preuve concrète que cette discipline n’a pas encore réussi à gagner en notoriété, même si des initiatives prises par les institutions universitaires à ce niveau pourraient enfin aider le secteur à se développer.
« L’UL a lancé son programme en sciences vétérinaires en 2006, explique le doyen de la faculté de génie agronomique et de médecine vétérinaire, Tayssir Hamiyeh. Nous avons fait l’impossible pour réussir car cette formation nécessite un travail de terrain que nous avons assuré en prenant contact avec des cliniques vétérinaires au Liban qui accueillent nos étudiants, pour compenser le manque d’équipement à l’UL. » Aux dires de M. Hamiyeh, l’UL a essayé de collaborer avec des universités françaises et œuvre aujourd’hui pour ouvrir le premier hôpital vétérinaire au Moyen-Orient, pour un budget de cinq millions de dollars. « Nos étudiants ont directement accès au syndicat sans aucun test et aux concours organisés par le conseil de la fonction publique. Ils se classent toujours parmi les premiers », poursuit le doyen.


À l’UL, entre 20 et 25 étudiants par année suivent la formation véto à Dekouaneh. Le cursus, inspiré du système français, comprend deux années préparatoires où les étudiants suivent des cours de sciences générales en majorité, avant de se concentrer sur des matières plus spécialisées en troisième année, suite à laquelle ils obtiennent une licence en sciences vétérinaires, qui ne suffit pas pour exercer. Trois années supplémentaires sont requises avant d’obtenir un master et un diplôme en médecine vétérinaire. L’an dernier, la première promotion, composée de 17 vétérinaires, prenait son envol vers le monde du travail, qui offre de réelles opportunités, selon M. Hamiyeh. « Le Liban compte aujourd’hui environ 160 vétérinaires en fonction, explique-t-il, mais le pays a réellement besoin de plus de 200, et de nombreux médecins non vétérinaires occupent des postes qui devraient être consacrés aux seuls vétérinaires. » Et de poursuivre : « Cette formation, contrairement à ce qu’on pourrait penser, est assez sollicitée. Nous recevons chaque année plus de 150 demandes d’admission, et nous en prenons une vingtaine suite à un concours assez difficile. »
Si un étudiant a déjà obtenu une licence en biologie et désire poursuivre ses études en médecine vétérinaire, il n’a d’autre option que de s’inscrire à l’UL. Les matières équivalentes sont comptabilisées, et l’étudiant accède directement à la troisième année de la licence. C’est le cas de Yelda Hélou (22 ans), qui, après une licence en biologie à l’USJ, a choisi l’UL pour suivre sa passion. « J’aimais beaucoup la médecine et les animaux, raconte Yelda. C’est pourquoi j’ai opté pour ce métier après l’école. Je pensais obtenir une licence en biologie pour poursuivre mes études de véto en France, où ces années préparatoires sont nécessaires. J’ai plus tard changé de plan. Voulant rester au Liban et l’admission des étrangers étant difficile en France, je n’avais d’autre choix que l’UL. » Pour Yelda, pourtant, il est important de voir plusieurs universités offrir ce genre d’études « pour valoriser le métier », même si elle est reconnaissante à l’Université libanaise qui a enfin établi ce cursus. « Le Liban est un petit pays où le besoin en vétérinaires était restreint. Mais les choses changent et les gens évoluent. Comme les Européens, les Libanais accordent de plus en plus d’importance aux animaux », explique-t-elle. Si l’UL a permis à Yelda de rester au pays, la jeune femme déplore pourtant « un manque de pratique dans le cursus ». « Nous visitons beaucoup de fermes, et les stages sont nombreux, mais les manipulations sont rares, et la majeure partie de celles-ci se concentre sur les petits ruminants, les vaches, et les poules », ajoute-t-elle.

Échec à l’AUB
Sur un autre plan, il semblerait que l’AUB ait tenté de mettre en place une formation vétérinaire, qui s’est avérée un échec. Si les responsables déplorent un manque d’infrastructure nécessaire, qui a abouti à l’arrêt du BS in Veterinary Sciences, Myra Tabet raconte une tout autre histoire. « J’ai commencé mes études à l’AUB en 2008, la première année où cette licence était offerte, raconte la jeune femme de 23 ans. Un mémorandum d’entente entre l’AUB et l’université hongroise Szent Istvan permettait aux étudiants de poursuivre leurs études en 4e année en Hongrie après les trois ans à l’AUB. Comme je ne voulais pas quitter le Liban directement après la terminale, j’ai obtenu mon BS (équivalent de la licence) à l’AUB, pour découvrir finalement que ce mémorandum n’est pas fonctionnel et que je dois tout reprendre de zéro en Hongrie. Trois ans et tous mes efforts sont partis en fumée. » Ainsi, Myra s’est non sans peine dirigée vers la Hongrie, où elle tente aujourd’hui de récupérer le temps perdu en prenant des cours condensés, avec en poche une licence que peu d’universités accepteraient de prendre en considération. Au total, deux promotions d’étudiants ont subi ce sort, avant que l’université mette un terme à ce cursus en annonçant aux générations suivantes qu’elles devaient se réorienter vers d’autres formations.
Aujourd’hui, il est possible que Myra revienne travailler au Liban « car il y a un besoin énorme de vétérinaires, surtout dans le domaine agricole ». « Il se peut aussi que je travaille en Europe où j’apprendrai beaucoup plus, dit-elle. Ce métier n’est pas estimé à sa juste valeur au Liban, et c’est dommage. C’est pour cela aussi que les élèves des écoles ne sont pas orientés dans cette direction. De plus, il n’y a que l’UL qui offre cette formation, et le côté pratique est assez déplorable comparé aux universités à l’étranger, ce qui n’encourage pas trop les Libanais passionnés d’animaux à rester au pays ou à choisir ce métier tout simplement. »
Jusqu’à quand ?

 

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