Le chef d'el-Qaëda en Irak a annoncé pour la première fois mardi que le Front al-Nosra, en première ligne dans le combat contre le régime syrien de Bachar el-Assad, est une branche de son groupe et que son objectif est d'instaurer un Etat islamique en Syrie.
Cette déclaration intervient au lendemain d'un attentat suicide qui a fait 15 morts et 146 blessés en plein coeur de Damas selon les médias officiels, alors que des attaques similaires avaient été revendiquées par le groupe jihadiste en Syrie depuis le début de la révolte contre le régime de Bachar el-Assad. L’attentat a été dénoncé aussi bien par le régime qui a accusé les "groupes terroristes" (rebelles selon sa terminologie) et par l'opposition.
Jusqu'ici, le groupe, formé de Syriens et de volontaires étrangers et classé comme "organisation terroriste" par Washington, était uniquement soupçonné d'être affilié au réseau extrémiste. En Syrie, il s'est d'abord fait connaître par des attentats suicide, mais s'est ensuite mué en une redoutable force armée qui combat au côté de la rébellion contre le régime de Bachar el-Assad.
"Il est temps de proclamer aux Levantins et au monde entier que le Front al-Nosra est en réalité une branche de l'Etat islamique d'Irak", (ISI), la principale organisation irakienne affiliée à el-Qaëda, déclare Abou Bakr al-Baghdadi dans ce message publié sur des sites jihadistes. Les deux groupes, ajoute-t-il, seront désormais fédérés sous l'appellation Etat islamique en Irak et au Levant.
(Pour mémoire: « Le Front al-Nosra a toujours été clair sur ses intentions : il veut un califat »)
El-Qaëda en Irak a été le premier dans la mouvance jihadiste à inciter ses sympathisants à combattre le pouvoir à Damas, qu'il qualifie de "noussaïri" (terme péjoratif désignant les alaouites, la minorité hétérodoxe de M. Assad, NDLR). Selon les récits publiés sur des forums jihadistes, des centaines de combattants ont franchi la frontière irako-syrienne pour aller se battre.
Al-Baghdadi se dit prêt à s'allier à d'autres groupes jihadistes "à condition que le pays (la Syrie) et les citoyens soient gouvernés selon les préceptes dictés par Allah". "La +démocratie+ ne doit pas être la récompense après la mort de milliers d'entre vous", a-t-il lancé.
Al-Baghdadi a en outre précisé que c'est el-Qaëda en Irak qui a choisi Abou Mohammad Al-Joulani comme chef d'Al-Nosra. "Nous avons choisi al-Joulani, qui est un de nos soldats, ainsi que d'autres combattants pour se rendre d'Irak en Syrie (... ) Nous avons préparé des plans et des politiques de travail. Nous avons donné de l'argent et un soutien humain".
Fin 2012, Al-Joulani avait évoqué pour la première fois l'ambition de son groupe d'instaurer une gouvernance islamique dans la Syrie de l'après-Assad, affirmant qu'une fois le régime de Damas renversé, le pouvoir devra revenir aux moujahidines, "les mieux placés pour le remplir".
Le 7 avril, le chef d'el-Qaëda, Ayman al-Zawahiri, a appelé les rebelles à instaurer un Etat islamique en Syrie.
(Pour mémoire : Il n’y a pas qu’al-Nosra, il y a aussi Ahrar al-Cham !)
Face à ces révélations, les rebelles syriens ont tenu mardi à marquer leurs distances avec le Front Al-Nosra, tout en reconnaissant qu'une coordination "tactique" avec ces jihadistes très bien équipés s'impose parfois. "Il n'y a jamais eu et il n'y aura jamais de décision au niveau du commandement pour une coordination avec Al-Nosra. C'est la situation sur le terrain qui impose cela", a affirmé mardi à l'AFP Louaï Meqdad, responsable de la communication pour l'Armée syrienne libre (ASL), principale composante de la rébellion. "Al-Nosra existe, il est financé et armé, c'est pour cela que certaines brigades de l'ASL coopèrent avec eux dans certaines opérations sur le terrain. C'est une coopération tactique et ponctuelle (...) Al-Nosra n'est pas rattaché à l'ASL", a-t-il encore souligné.
"Nous ne soutenons pas l'idéologie d'al-Nosra", a encore indiqué M. Meqdad. "Personne n'a le droit d'imposer aux Syriens la forme de leur Etat. Les Syriens iront aux urnes pour choisir leurs dirigeants", a-t-il répliqué. "Notre but est clair : faire tomber le régime et (ériger) un Etat démocratique", a ajouté M. Meqdad.
M. Meqdad a enfin ouhaité en outre que "l'ASL soit suffisamment armé, équipé et financé pour ne pas avoir besoin d'une autre partie".
Les insurgés réclament d'être armés par la communauté internationale depuis la militarisation de la révolte en Syrie, mais les pays occidentaux hésitent, redoutant justement de voir des armes tomber aux mains d'extrémistes, une peur que pourrait alimenter l'annonce de la branche d'el-Qaëda.
Al-Nosra avait gagné le respect de nombreux Syriens en zone rebelle par la discipline de ses combattants, mais récemment ses jihadistes se sont accrochés à plusieurs reprises avec des villageois pour des querelles liées à leur interprétation extrémiste de l'islam.
Armes chimiques
Sur autre aspect du conflit, Damas a rejeté la mission des enquêteurs des Nations unies chargés de déterminer si des armes chimiques sont utilisées dans le pays. Le patron de l'ONU Ban Ki-moon avait indiqué auparavant que ces enquêteurs étaient prêts à se déployer. Selon le ministère des Affaires étrangères, la demande portait uniquement sur l'envoi d'une mission au village de Khan Aassal dans la province d'Alep (nord) où le régime accuse les rebelles d'avoir lancé un "missile doté de matières chimiques toxiques".
Le régime et la rébellion s'accusent mutuellement d'avoir employé des armes chimiques dans les régions d'Alep et de Damas dans le cadre du conflit.
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commentaires (7)
L'Avocat du Diable : Prochaine étape de toutes ces organisations terroristes, quelle que soit la solution en Soeur Syrie, est sans aucun doute notre pays. S'ils n'en sont pas déjà infiltrés. Il FAUT APPUYER LE HEZB, ET LES CHRÉTIENS LES PREMIERS, dans son intervention pour les contenir et les garder hors de nos frontières. GARE s'ils s'infiltrent ! Il faut tout faire pour détecter les " plus que possible " infiltrés et les neutraliser urgemment...
SAKR LEBNAN
11 h 58, le 10 avril 2013