Les supputations et analyses prévisionnelles ne peuvent plus être effectuées sur base d’anciennes certitudes balayées par la tempête qui souffle depuis deux ans sur les rives du Barada. Les temps ont changé, les vieux équilibres ont été rompus et on est loin, bien loin, de la fameuse et non moins fumeuse entente syro-saoudienne qui avait contraint les uns au déni, rempli les autres de joie.
La réalité, aujourd’hui, est bien amère pour tous ceux qui avaient misé sur la pérennité d’un pouvoir baassiste qui faisait la pluie et le beau temps au Liban, décidait qui promouvoir, qui quasiment éliminer, qui contraindre à oublier les avanies auxquelles il avait été assujetti des années plus tôt.
Inutile, évidemment, de remuer le couteau dans la plaie et contentons-nous de relever que l’effet boomerang qui a reconstitué l’ancienne majorité, celle qui avait été pulvérisée par la crainte d’une « blitzkrieg divine », est le résultat de l’équation régionale nouvelle qui prend forme à nos frontières.
C’est donc forcés, mais peut être conscients du fait que les données ont sensiblement changé, que le Hezbollah et le Courant patriotique libre ont finalement souscrit à la solution Tammam Salam après avoir bu le calice de la démission de Nagib Mikati.
Longtemps insultée, vouée aux gémonies, l’Arabie saoudite, quant à elle, reprend aujourd’hui son rôle d’intermédiaire incontournable sans que Hassan Nasrallah ou Michel Aoun ne s’en offusquent, ce dernier se contentant de manifester sa mauvaise humeur en boudant les consultations au palais présidentiel...
Maintenant que la première phase du processus en cours a été clôturée avec la désignation de Tammam Salam, la question qui se pose est de savoir si l’équation régionale nouvelle, qui a imposé le départ de Mikati, se reflètera dans la formation de l’équipe gouvernementale et dans la déclaration ministérielle qui engagera le cabinet pour les mois à venir, jusqu’au lendemain des élections législatives... si elles finissent par se tenir.
Dans sa première déclaration après son intronisation, le Premier ministre désigné s’est dit déterminé à former un gouvernement « d’intérêt national ». Cela devrait se traduire, comme il l’a d’ailleurs laissé entendre, par l’exclusion des empêcheurs de tourner en rond et par l’abolition des « traditions » du chantage politique et du tiers de blocage. Cela devrait impliquer que pour la phase transitoire d’avant les législatives il ne serait fait appel qu’à des personnalités centristes non tributaires des humeurs chagrines de l’une ou de l’autre partie politique.
Un gouvernement « d’intérêt national » devrait également signifier, en toute logique, que l’équation « armée-peuple-résistance », source de grand conflit, serait éliminée de la déclaration ministérielle et remplacée par une référence explicite à la proclamation de Baabda qui rétablit l’État dans toutes ses prérogatives.
Vœu pieux ou barre installée trop haut ? Tammam Salam n’est pas sans savoir que son chemin est truffé de mines et que les peaux de bananes sont déjà prêtes à entrer en action. Mais il n’ignore pas aussi que la direction du vent est en train de changer et que toutes les parties sont contraintes de tenir compte des réalités immédiates, à commencer par un Hezbollah confronté à sa première heure de vérité, celle d’une Syrie nouvelle qui peut lui devenir hostile à tout moment et d’un Iran qui se voit progressivement privé de sa courroie de transmission.
Ignorer tous ces développements, se figer dans un obstructionnisme hors du temps équivaudraient à pérenniser le surplace, à prolonger la situation absurde que vit un Liban désorienté en attente d’un improbable Godot... un faiseur d’illusions qui se dit déjà : « Mais dans quelle galère veut-on donc me fourvoyer ? »
Un article bien écrit et qui dit tout aussi bien. Seule différence c'est que ce ne sont pas les protagonistes ( ? ) Libanais, des joueurs de second et tiers degré, des suivistes aveugles, qui ont changé leurs tactiques, c'est que leurs Maîtres les leur ont fait changer. Ce n'est pas de bon gré, mais par ordre qu'ils sont devenus SI SOUDAIN si obligeants et si gentils. Pas uniquement les Huitistes mais aussi les Quatorzistes. Ceux-là en profite et ne croient pas leurs yeux et leurs oreilles. LA MANNE LEUR EST TOMBÉE DU CIEL ! A ne pas oublier aussi les déclarations si belliqueuses des voisins du Sud. Il faut en tenir compte car la situation en Syrie et les interventions du Hezb dans ce pays les poussent, peut-être, ou à coup sûr plutôt, A LA GRANDE TENTATION AGRESSIVE...
19 h 45, le 08 avril 2013