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À La Une - La situation

Liban : Quid après la convocation du corps électoral?

Des manœuvres pressantes pour le vote de la loi « orthodoxe »

Le président Michel Sleiman et le Premier ministre Nagib Mikati ont signé le décret pour la convocation du corps électoral.

Le président de la République Michel Sleiman et le Premier ministre Nagib Mikati ont signé hier le décret pour la convocation du corps électoral, selon la loi en vigueur, c’est-à-dire la loi de 1960 adoptée à Doha le 8 juin 2008, et qui prévoit la tenue des législatives le 9 juin. Le débat sur la nouvelle loi électorale a-t-il ainsi été neutralisé ? Cette question trouve une franche réponse négative sur le terrain, du moins pour l’instant.


En effet, le président de la République a tenu à préciser que la signature du décret est une procédure dictée par la loi et ne devrait pas être interprétée comme un attachement à la loi de 1960. Il a en tout cas réitéré son appel à l’adoption d’une nouvelle loi s’inspirant du projet du gouvernement qui avait été transféré au Parlement. Le ministre de l’Intérieur, Marwan Charbel, avait lui aussi précisé ultérieurement que la convocation du corps électoral s’inscrit dans le cadre de la procédure administrative et du respect des délais constitutionnels, mais ne compromet pas une éventuelle adoption d’une nouvelle loi électorale. C’est d’ailleurs ce point que tendent à valoriser les médias du 8 Mars. La chaîne al-Manar, précisément, citant des sources proches du président Sleiman et de M. Mikati, a souligné que la signature du décret « est une démarche constitutionnelle et légale et non une prise de position politique ». « S’abstenir de la signature du décret aurait engagé notre responsabilité devant la Constitution », auraient ajouté ces sources.


Pourtant, les milieux aounistes y perçoivent une « tentative d’imposer un fait accompli ». « Quelles que soient les justifications, constitutionnelles ou autres, qu’ils donnent à leur démarche, le Premier ministre et le président de la République ont fait abstraction totale du risque qui pèse actuellement sur la cohésion nationale. » « Tout comme le président de la République s’était porté volontaire pour condamner la proposition du Rassemblement orthodoxe, sous prétexte de prévenir une crise, nous aurions bien aimé qu’il s’abstienne de la signature du décret, pour les mêmes motifs », précise le député Alain Aoun à L’Orient-Le Jour.


Bénéficiant jusque-là de l’appui des factions chrétiennes (le Courant patriotique libre, les Kataëb et les Forces libanaises), au nom du rétablissement de la juste représentation des chrétiens, et avalisé par le Hezbollah, au nom de « la représentation populaire », le projet du Rassemblement orthodoxe récolterait la majorité absolue des votes, au cas où une réunion parlementaire devrait se tenir.


Des informations contradictoires circulaient hier dans les médias sur la position du Hezbollah après la signature du décret de convocation du corps électoral (le quotidien koweïtien al-Raï évoquait « d’importantes pressions exercées par le Hezbollah et le CPL » pour la tenue de la réunion parlementaire ; tandis que selon an-Nahar le Hezbollah aurait « donné son mot d’ordre pour que cette réunion ne soit pas convoquée » ). En réalité, il semblerait, selon des milieux de l’opposition, que le Hezbollah et le CPL auraient convenu secrètement d’accorder une marge de manœuvre à Nabih Berry avant qu’il ne convoque le Parlement pour le vote de la nouvelle loi électorale. Cette marge d’action viserait à simuler une volonté d’entente, susceptible d’amener M. Berry à convoquer le Parlement à un certain moment, pour le vote du projet « orthodoxe ».

 

(Lire aussi : Ce qui empêche encore un accord sur la loi électorale..., l'éclairage de Philippe Abi Akl)


Interrogé par L’OLJ sur cette possible manœuvre, le député Alain Aoun a rappelé que les tractations en cours pour abolir la loi de 1960 concernent également les factions chrétiennes de l’opposition. « Le président de la Chambre examine lui aussi les différentes options dans ce sens », a-t-il ajouté, avant de préciser, en réponse à une question sur l’éventualité de la convocation du Parlement : « Les choses se mesurent en jours. » D’autres mesures sont également envisagées pour assurer le vote du projet « orthodoxe », notamment l’abstention des ministres du 8 Mars lors de la nomination des membres du comité de suivi des élections. Mais il semblerait que le 8 Mars étudie dès à présent les moyens de remettre en cause la légalité de l’actuel Conseil constitutionnel, de manière à anticiper la décision annoncée par le chef de l’État de saisir le Conseil sur base de l’anticonstitutionnalité du projet du Rassemblement orthodoxe, au cas où il serait adopté.


Pourtant, le Premier ministre affirmait hier dans un entretien télévisé que « la loi orthodoxe ne passera pas », révélant détenir « plusieurs moyens », préalables à la saisine du Conseil constitutionnel, susceptibles d’en empêcher l’adoption. Il a ajouté qu’il se désistera de ses fonctions avant les législatives, afin d’en convier la gestion à un cabinet neutre.

 

(Lire aussi : Tout le monde (ou presque) veut le déroulement des élections à temps)


Enfin, une dernière option pour éviter la loi de 1960 : éradiquer l’échéance électorale. Mais les appels se sont multipliés pour la tenue des législatives à la date prévue : l’ambassadrice des États-Unis à partir de Aïn el-Tiné ; ainsi que l’Assemblée des évêques maronites. Le député Boutros Harb a d’ailleurs précisé que si les législatives ne se tiennent pas à la date prévue, le gouvernement deviendrait un cabinet transitoire.


Mais le poids de la situation sécuritaire reste un outil de persuasion/de chantage pour la non-tenue des élections. Alors que le ministre de l’Intérieur a implicitement reconnu l’impossibilité de concilier la sécurité et la tenue des législatives, les milieux de M. Berry ont veillé à démentir toute volonté chez lui d’ajourner les législatives au regard de la situation sécuritaire dans le pays.


Le Conseil des ministres aujourd’hui à Baabda promet d’être houleux, d’autant que la question du financement de l’échelle des salaires sera débattue en dehors de l’ordre du jour.
Le président du syndicat des enseignants des écoles privées Nehmé Mahfoud a assuré sur ce plan que la grève reprendra le 21 du mois courant, au cas où l’échelle ne serait pas financée.

 

 

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