Rechercher
Rechercher

À La Une - En dents de scie

(Ce très) cher Laurent Fabius

Septième semaine de 2013.

 

Cet homme relit jusqu’à les vomir ses discours avant que de les réinventer, soft, prudent, aux quatre coins de la planète. Cet homme a été le plus jeune Premier ministre de France, deux fois maître du perchoir, et aujourd’hui, gestionnaire volontairement ghosnien du Quai d’Orsay, il a dix ans de plus que le président de la République. Cet homme n’a peur de rien, il est Léon Blum, il est Dreyfus, et les autres, surtout à droite, ne sont qu’un magma difforme de haines et de rancœurs. Cet homme peut être, et il le sait, et de dedans il en est fier, roquet et lévrier afghan. Cet homme a une amnésie sélective qui l’a sauvé à plusieurs reprises; une sorte d’étoile bonne (à tout faire). Cet homme aurait été dessiné, raconté, fouetté, magnifié et gueulé; bref, adoré, par Flaubert. Cet homme est à la fois un marchand de Venise, capable de donner mille livres de (sa) chair pour aider un Bacon, un Ingres ou un Soulages, et un Shylock, à l’ADN hypercommerçant. Cet homme aime, génétiquement, le bon, le beau et l’utile. Cet homme est capable, lorsque ses valeurs le harcèlent, de crimes (de lèse-majesté, et François Mitterrand s’en souviendra toujours...) : l’égalité, la fraternité et la liberté des Terriens est son alibi, jamais discutable, jamais discuté. Cet homme aime le non. Cet homme est fan de réseaux : sociaux, d’influence, ferroviaires, d’expertises. Cet homme, bien élevé, rechigne à insister. Cet homme donne son avis. Cet homme a su remixer la force tranquille en prenant le meilleur d’Attali et de Mitterrand, toujours lui, en jetant tout ce qui ne lui plaisait pas, nonchalamment, dans une poubelle arty Alessi. Cet homme est du botox à l’état pur, jamais froissé, jamais fatigué, du moins en public. Cet homme aurait donné un rein pour un duel au soleil avec Voltaire, Choderlos de Laclos, ou une soirée Chandelles avec Rousseau; un rein pour un apéritif avec Quentin de La Tour ; un rein pour un voyage en Italie avec Isaac Newton et Jean-Sébastien Bach. Cet homme ne trouve plus ses marques entre un François Hollande et un Jean-Yves Le Drian ; plus encore : il les cherche en public, parfois maladroit et attendrissant comme un bleu. Cet homme considère dès le premier jour du reste de sa vie que ce reste-là sera économique ou ne sera pas. Cet homme est fondamentalement normand mi-Tocqueville mi-Charlotte Corday, un peu Thérèse de Lisieux, un peu Claude Monet. Cet homme est mono-obsessionnel. Cet homme, lui, eh bien c’est lui et les autres, ce sont les autres. Cet homme est l’un des deux politiques les plus brillants de la France contemporaine; l’autre s’appelle Alain Juppé.


Pour tout cela, et pour bien d’autres raisons encore, cet homme est un honnête homme. C’est-à-dire digne de confiance. Bankable. Dans le vrai. Cet homme ne détient naturellement pas la vérité, mais une vérité. Parmi toutes les autres, toutes bonnes à dire. La dernière en date est glaçante. Parce qu’elle est d’une simplicité féroce. Limpide. Un constat, une évidence, Cassandre en aurait pâli de jalousie, énoncés clairement dans une interview accordée à la chaîne satellitaire al-Arabiya : Le Liban est en grand danger, a (pré)dit Laurent Fabius.
Cette lapalissade, débarrassée de ses scories de diplomatie, de pondération, de langue de bois (de cèdre), de courtoisie, peut en réalité être résumée en quatre mots : ça va vraiment chier.


Laurent Fabius ne parlait pas d’explosions de météorites, de législatives 2013 perturbées, d’une défaite d’Anthony Touma au The Voice made in France, d’hystéries pléonasmes de ministres CPL, de masochisme christique du 14 Mars, de mariages civils dynamités dans l’œuf, de saisons touristiques encore ratées, d’une aphonie de Myriam Klink, ni même du désarroi d’un Hezbollah désormais prêt à tout, encore moins d’une pénurie de Dolce & Gabbana chez Aïshti.
Laurent Fabius pensait à une guerre sunnito-chiite au Liban.


Un homme qui a compris que Renoir, le peintre, sa Petite Fille à l’arrosoir ou son Le Déjeuner des canotiers, sont à tomber de beauté et de talent, doit urgemment être écouté. Et entendu. Aujourd’hui, pas demain.

Septième semaine de 2013.
 
Cet homme relit jusqu’à les vomir ses discours avant que de les réinventer, soft, prudent, aux quatre coins de la planète. Cet homme a été le plus jeune Premier ministre de France, deux fois maître du perchoir, et aujourd’hui, gestionnaire volontairement ghosnien du Quai d’Orsay, il a dix ans de plus que le président de la République. Cet homme n’a...
commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut