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À La Une - Troubles

Quelle distanciation à l’ombre du trafic de mazout vers Damas ?

Des dizaines de camions-citernes bloqués aux postes-frontières par des manifestants en colère ; « Mandat d’arrêt » symbolique des révolutionnaires syriens contre Mikati.

D’un côté le silence radio total du ministre de l’Énergie concernant le trafic de mazout en faveur du régime syrien, de l’autre la colère des gens du Nord qui ont bloqué les points de passage de Arida et Aboudiyeh en direction de la Syrie, obligeant les voyageurs à traverser à pied. Omar Ibrahim/Reuters

Le Premier ministre Mikati a été hier la cible d’une attaque du côté des insurgés syriens. En effet, le porte-parole de l’Armée syrienne libre (ASL), Louay Mokdad, a affirmé que « l’ASL et le Conseil juridique révolutionnaire unifié sont tombés d’accord pour recenser et saisir les biens du Premier ministre libanais et son frère Taha en Syrie, après l’implication flagrante du chef de l’Exécutif libanais dans le soutien au régime Assad ».
Louay Mokdad a par ailleurs ajouté qu’« un mandat d’arrêt sera émis à l’encontre de Nagib Mikati », précisant que « le patrimoine principal de ce dernier se trouve à Damas et qu’il sera saisi après la chute du régime ». Nagib Mikati a refusé hier de répondre à ces accusations. Contacté par L’Orient-Le Jour, Nabil Halabi, président de l’Association libanaise pour la démocratie et les droits de l’homme, a estimé que « ces mesures prises par le Conseil juridique révolutionnaire unifié en Syrie ont une valeur morale ». « Le Conseil compte saisir toutes les possessions de Nagib Mikati dans les régions soumises au contrôle de l’Armée syrienne libre, et cela pour faire savoir au Premier ministre libanais que l’ASL envisage de le poursuivre et qu’il ne pourra pas entretenir de bonnes relations avec le nouveau régime syrien qui sera mis en place après la révolution », a ajouté M. Halabi, qui n’a pas écarté l’hypothèse que ces mesures soient en relation avec l’affaire du mazout exporté en Syrie depuis le Liban et qui crée la polémique depuis déjà deux jours.


De son côté, le député du courant du Futur, Mouïne Meraabi, a reconnu ne pas avoir d’informations à ce sujet, mais a trouvé « tout naturel » que le Conseil juridique révolutionnaire unifié prenne de telles mesures à l’égard du Premier ministre puisque « son gouvernement dominé par le Hezbollah permet le passage d’armes à feu meurtrières au quotidien vers la Syrie, sans parler du mazout ».


En effet, le mazout acheminé en douce vers la Syrie, alors que le Liban souffre de pénurie en matière de carburants, a encore fait scandale hier. Plusieurs dizaines de manifestants ont bloqué deux points de passage à la frontière syrienne pour empêcher l’entrée en Syrie de camions de diesel destinés selon eux au régime du président Bachar el-Assad. La foule s’est rassemblée aux points de passage de Arida et de Aboudiyeh qui mènent à la province syrienne de Homs et a barré la route des camions-citernes à l’aide de pierres et divers objets. Des dizaines de voitures, des bus et des camions portant des plaques d’immatriculation syrienne attendaient de part et d’autre de la frontière que la route soit dégagée.


Le député Mouïne Meraabi et un représentant du député Khaled Daher se sont joints aux manifestants. « Nous ne pouvons plus permettre le passage de produits qu’on utilise pour tuer le peuple syrien », a martelé le député Meraabi. « Nous faisons assumer au gouvernement de Bachar el-Assad au Liban, à son Premier ministre et à toutes ses composantes la responsabilité personnelle d’encourager le bain de sang en Syrie et nous appelons l’ONU à intervenir dans les délais les plus brefs ». Le député Meraabi a par ailleurs accusé le gouvernement Mikati d’exporter le nitrate des usines de Selaata vers la Syrie, pour fabriquer des barils explosifs. La route de Arida et de Aboudiyeh ont été ouvertes finalement après plus de sept heures.

Même son de cloche au Sud, où le cheikh salafiste Ahmad el-Assir a appelé sur sa page Facebook ses partisans à Saïda à se préparer pour arrêter les camions-citernes transportant le mazout en Syrie. Une altercation a par ailleurs eu lieu dans la région, quand des camions-citernes syriens ont été repérés en train d’être remplis dans des stations libanaises. L’agence al-Markaziya a noté d’autre part que de nombreux commerçants syriens font activement la tournée de stations libanaises pour acheter du mazout rouge et du mazout vert, afin de les transporter par leurs propres moyens en Syrie. Dans la soirée, des dizaines de camions-citernes chargés de mazout ont été repérés sur la route de Fayadiyeh se dirigeant vers la Syrie, et des éléments armés ont ouvert le feu à Tripoli sur un camion-citerne soupçonné de transporter du carburant en Syrie.


Enfin, les députés Mohammad Hajjar et Antoine Zahra ont stigmatisé hier le trafic de mazout, mais le chef de l’Association des importateurs de pétrole, Bahige Abou Hamzé, a annoncé qu’ « aucune déclaration de l’ONU n’interdit l’échange commercial avec la Syrie », mais qu’« il existe uniquement une décision internationale de ne pas collaborer avec le gouvernement syrien ». M. Abou Hamzé a demandé aux autorités des clarifications à ce sujet, affirmant qu’« il n’y a pas de pénurie de mazout au Liban et que l’État perçoit toutes les taxes sur le mazout exporté en Syrie, comme il se doit ».

 

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