L'irritation contre la pollution atmosphérique s'exprime de plus en plus ouvertement en Chine, où même les médias officiels exigent désormais des autorités davantage de transparence.
Durant le week-end, un épais brouillard extrêmement chargé en particules nocives a enveloppé le nord et l'est de la Chine, affectant les transports routiers, causant des annulations de vols dans les aéroports et une ruée sur les masques filtrants. A la Bourse de Shanghai, le cours de l'action de la société Shanghai Dragon, un fabricant de masques filtrants, a bondi de 10% (soit le maximum autorisé) à l'ouverture du marché lundi.
A Pékin, où circulent quotidiennement plus de cinq millions de véhicules, ainsi que dans plus d'une trentaine de métropoles, les habitants ont été incités à demeurer chez eux en évitant les exercices physiques. La visibilité est tombée à 100 mètres dans certaines zones.
A Pékin, contre la pollution, les Chinois ont opté pour le masque. AFP/Ed Jones
La densité de particules de 2,5 microns de diamètre (PM 2,5), les plus dangereuses, a dépassé dans certaines zones le seuil de 993 microgrammes par mètre cube, selon le centre de surveillance de l'environnement de la capitale chinoise.
Soit près de 40 fois le seuil préconisé par l'OMS. Les PM 2,5 peuvent pénétrer jusqu'aux alvéoles pulmonaires et migrer dans le sang.
Lundi, la télévision d'Etat CCTV continuait à conseiller de ne pas utiliser de bicyclette dans la capitale chinoise, où la population attendait paradoxalement avec impatience que se remette à souffler le vent glacial du nord, seul capable d'éclaircir l'horizon.
La densité de la pollution est telle que dans l'est de la Chine, les pompiers sont intervenus avec un important retard dans une usine ravagée par un incendie, le sinistre étant passé inaperçu durant trois heures en raison de la très forte pollution atmosphérique, a rapporté mardi la presse officielle.
Le quartier de Wangjiang, à Pékin, dans le brouillard, le 14 janvier 2013. AFP
Face à cette situation, le ras-le-bol commençait à s'exprimer dans la presse.
"Edifier une belle Chine commence par respirer de façon saine", titrait dans un article en "une" le Quotidien du Peuple, l'organe officiel du Parti communiste chinois. La pollution atmosphérique préoccupe de plus en plus les Chinois et le débat croissant sur la question était qualifié lundi de "salutaire" par le journal China Daily. "En plein processus d'urbanisation rapide, il est urgent pour la Chine de réfléchir à comment mener ce processus sans que la qualité de vie urbaine soit compromise par un environnement de pire en pire", estimait le quotidien dans un éditorial.
Deuxième économie de la planète et premier marché automobile mondial, la Chine voit son environnement menacé par ses nombreuses industries polluantes, son trafic routier en constante expansion et son laxisme pour protéger les écosystèmes. En outre, le pays tire plus de 70% de son énergie de la combustion du charbon, ce qui en fait le premier émetteur mondial de gaz à effet de serre.
Le trafic routier en constante expansion est l'une des causes de l'aggravation de la pollution en Chine.
Ici, Nanjing, dans la province de jiangsu, dans l'est de la Chine. AFP
"Si nous continuons avec ce mode de développement sans l'ajuster, les dommages à long terme seront graves", a de son côté prévenu le journal Global Times. "La pollution s'accumule en Chine" et malgré les mesures prises "le problème s'aggrave", soulignait le quotidien.
Toujours prêt à moquer les excès de son pays, l'artiste contestataire Ai Weiwei a publié sur l'internet des photos de lui-même portant un masque à gaz. Il a été imité par de nombreux autres internautes, comme cette femme confiant dans un microblog être "tellement en colère".
Les autorités chinoises sont fréquemment accusées de sous-estimer ou de cacher à dessein la gravité de la pollution atmosphérique dans les zones urbaines. Elles doivent désormais, a exigé le Global Times, "publier des données environnementales en toute franchise". "Le choix entre le développement et la protection de l'environnement devrait s'exercer selon des méthodes vraiment démocratiques", a estimé le Global Times, en utilisant un concept rarement mis en avant au pays du parti unique.
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Capitalisme à son "Stade" toujours 19ème !
00 h 25, le 16 janvier 2013