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À La Une - Mali

Au Mali, la France en guerre contre le terrorisme

L’armée française « bloque » les shebab et bombarde leurs bastions

Un militaire prépare un Mirage 2000D à la base militaire française de N’Djamena, pour participer à l’opération Serval. Nicolas Vissac/ECPAD/AFP

L’armée française, au troisième jour de son intervention au Mali, a bombardé pour la première fois hier des positions islamistes dans le nord du pays, à Gao et Kidal, au cœur des territoires jihadistes. Quatre avions de combat Rafale ont notamment détruit des camps d’entraînement et des dépôts logistiques des groupes armés près de Gao, à environ 1 200 km au nord de Bamako, selon le ministère français de la Défense. Un habitant de l’une des premières principales villes du Nord malien tombées sous la coupe des jihadistes il y a neuf mois a déclaré qu’il « y a eu une dizaine de frappes, dans Gao et près de Gao. Toutes les bases des islamistes ont été détruites. Les Français ont fait du bon travail. Presque tous les islamistes ont fui Gao. Ceux qui sont encore là sont cachés dans les maisons et attendent la tombée de la nuit pour fuir », a assuré un élu de la ville. « Les avions français viennent d’opérer des frappes aériennes dans la région de Kidal, plus précisément à Aghabo », à 50 km de Kidal, a aussi indiqué une source de sécurité régionale. Aghabo est une base importante du groupe islamiste Ansar Dine (Défenseurs de l’islam).


Des appareils français ont également bombardé des cibles dans plusieurs autres localités du Nord, en dehors de la zone de Konna, dans le centre du pays, où se concentraient jusqu’à présent les combats. Un camp de combattants jihadistes a été visé à Léré, près de la Mauritanie, selon des témoins et Médecins sans frontières (MSF), et des cibles ont été atteintes près de Douentza, à 800 km au nord de Bamako.

Ne pas céder au chantage
« Il y a des raids en permanence. Il y en a en ce moment, il y en a eu cette nuit, il y en aura demain », a expliqué le ministre français de la Défense Jean-Yves Le Drian. La vie des otages français au Sahel aurait été « encore plus » en danger si l’opération Serval n’avait pas été déclenchée, a par ailleurs estimé le ministre, soulignant que la France entendait continuer à « négocier » avec les ravisseurs pour tenter d’obtenir la libération des otages français, mais sans céder au chantage ou à « des conditions extravagantes ».


Notons que Gao, Kidal et la ville historique de Tombouctou sont les trois principales villes du Nord malien désertique. Sous la coupe des islamistes depuis près de neuf mois, elles sont devenues des points névralgiques pour les groupes armés opérant dans le Nord : Ansar Dine, el-Qaëda au Maghreb islamique (AQMI), et le Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao).


Alors que le président Hollande avait estimé que l’intervention française avait permis de donner un « coup d’arrêt » aux islamistes, l’armée française a franchi un cap dans son engagement, en frappant dans le Nord au cœur des territoires jihadistes. L’intervention française doit permettre aux forces maliennes de « reprendre leur marche en avant pour l’intégrité » du territoire, a indiqué M. Le Drian.


Signalons que la perspective d’une avancée des troupes maliennes vers le Nord, région traditionnelle des Touaregs, est d’ores et déjà dénoncée par le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA, rébellion touareg malienne). Partisan de l’autodétermination, le MNLA avait lancé en janvier 2012 une offensive dans le Nord avant d’en être évincé peu après par AQMI, le Mujao et Ansar Dine. À Bamako, l’influent capitaine Amadou Sanogo, chef des putschistes de mars 2012, jusqu’ici réticent à toute intervention étrangère, a estimé samedi que la France avait joué « un rôle capital » aux côtés de l’armée malienne.

 

(Repère : Le Mali, un pays enclavé au coeur du Sahel)

Panique à Tombouctou
Parallèlement, à Tombouctou, où les jihadistes ont mené ces derniers mois lapidations et amputations, un enseignant a fait état d’un « début de panique » parmi les familles des islamistes partis au combat, assurant que « beaucoup essayent de partir dans le désert », expliquant que « depuis neuf, dix mois, ils sont dans un régime très totalitaire, coupés de tout. Franchement, on n’attend que ça ! On ne peut pas imaginer que les forces françaises s’arrêtent aux portes de Konna. C’est l’occasion ou jamais d’en finir avec ces islamistes », a-t-il expliqué.


« Bloquer les terroristes, c’est fait. Ce qui a commencé à être fait aujourd’hui, c’est s’occuper des bases arrière des terroristes » dans le Nord, a déclaré de son côté le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, précisant que l’Algérie avait donné son autorisation pour un survol de son territoire par les avions français. « Nous travaillons avec les Algériens, nous continuons à discuter. Ce que nous avons à l’esprit c’est que si les troupes africaines doivent remonter au Nord, il faudra que les Algériens ferment leurs frontières », a précisé Laurent Fabius. « Si la France n’était pas intervenue, les islamistes risquaient d’aller jusqu’à Bamako avec des conséquences épouvantables », a-t-il insisté. « La vocation essentielle » de l’engagement militaire français « est d’être aérienne », a en outre indiqué le ministre, précisant qu’elle nécessitait des forces spéciales au sol pour guider les avions sur leurs cibles.

 

Il a aussi laissé entendre que des renforts français pourraient être envoyés au Mali cette semaine, en accompagnement du renforcement de l’armée malienne et de l’arrivée de troupes africaines. Interrogé sur la durée de l’intervention française en première ligne, M. Fabius a estimé que « pour ce qui est de l’aspect impliquant le plus la France, c’est une question de semaines ».

Félicitations de Ban
Laurent Fabius a enfin indiqué avoir parlé avec le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, qui a félicité Paris pour son engagement. Signalons à ce sujet que le Conseil de sécurité des Nations unies se réunira cet après-midi sur le Mali à la demande de la France. « C’est une démarche de la France pour informer le Conseil et procéder à des échanges de vues entre membres du Conseil et avec le secrétariat général de l’ONU », a indiqué Brieuc Pont, le porte-parole de la mission française auprès des Nations unies.


Le ministre Fabius a également souligné que « la main du président Hollande n’avait pas tremblé » et que sa décision d’intervenir avait été prise en « 24 heures », précisant que son pays bénéficiait du « soutien pratique » de plusieurs nations européennes, évoquant notamment de l’aide en matière de transport. Ainsi, le premier avion de transport militaire britannique a décollé du Royaume-Uni et est arrivé à Bamako dans la soirée, a annoncé le ministère de la Défense à Londres. Le ministre allemand des Affaires étrangères a exclu pour sa part l’envoi de troupes allemandes et a appelé à une solution politique pour mettre fin à la violence.


Par ailleurs, M. Hollande a réuni pour le troisième jour consécutif un conseil de défense à l’Élysée.
Les préparatifs s’accélèrent par ailleurs pour le déploiement d’une force ouest-africaine chargée, avec l’aval de l’ONU, de déloger les groupes liés à el-Qaëda. Les premiers éléments de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) se mettent en place, sous la direction d’un général nigérian, Shehu Abdulkadir, déjà arrivé au Mali selon Lagos, qui fournira « environ 600 hommes ». Le Niger, le Burkina Faso, le Togo et le Sénégal ont également annoncé l’envoi chacun d’environ 500 hommes au Mali. Le Bénin va envoyer 300 soldats.
Le parti de l’ancien président ivoirien Laurent Gbagbo a salué l’intervention militaire française et réclamé l’envoi par la Côte d’Ivoire de troupes pour appuyer le contingent ouest-africain à déployer.


Enfin, une dizaine de gendarmes du GIGN, unité d’élite de la gendarmerie française, sont déployés depuis une semaine à l’ambassade de France à Bamako pour renforcer la sécurité de l’ambassadeur et des locaux diplomatiques français, a-t-on appris hier de source proche du dossier.

 

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