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À La Une - Grogne

Pannes d’électricité au Liban : les industriels crient à la catastrophe, les citoyens fulminent

Malgré l’annonce de la suspension de la grève des employés d’EDL, l’exaspération de la population a atteint son paroxysme vendredi soir.

Hier après-midi, des citoyens exaspérés par les coupures d’électricité ont brûlé des pneus à Kfarchima et dans plusieurs régions du pays.

« Les employés d’Électricité du Liban (EDL) mettent temporairement un terme à leur grève – jusqu’à la fin du mois – pour laisser le temps aux ministères concernés de revoir le budget 2013 alloué à l’institution. » C’est en ces termes que le syndicat des employés et utilisateurs d’EDL s’adressait aux médias hier en fin d’après-midi, suite à une longue semaine de grève sans précédent et alors que dans différentes régions du pays des citoyens en colère brûlaient des pneus et coupaient des routes.


Les coupures de courant électrique sont monnaie courante dans le quotidien des Libanais depuis des dizaines d’années. Se contentant souvent de trois ou quatre heures de courant par jour et faisant des générateurs électriques leurs meilleurs alliés, les ménages, les commerçants, les industriels semblaient s’être résignés à leur sort. Cette semaine pourtant, il semble qu’une ligne rouge a été franchie. Des régions entières du pays ont été totalement privées de courant depuis le début de la semaine à cause de diverses pannes sur le réseau électrique, lourdement touché par la tempête. Coïncidence de calendrier (ou pas ?), les employés d’EDL annonçaient en même temps une grève ouverte et refusaient de réparer les pannes tant que leurs revendications n’étaient pas prises en compte. Ils protestent contre le budget 2013 alloué par le ministère des Finances à l’institution. « Le texte met à mal les acquis sociaux des employés et annule certains de leurs droits, faisant fi du décret 7 410 concernant la grille des salaires », expliquait cette semaine le président du syndicat, Charbel Saleh, soulignant que certains crédits ouverts dans le budget avaient été carrément supprimés et d’autres avaient subi des coupes radicales. Mais en ces temps où le ras-le-bol des citoyens atteint un pic, les raisons avancées par les employés d’EDL pour défendre leur mouvement de grève ne semblaient plus avoir d’effet.

Réactions en série des ministères concernés
C’est le ministère des Finances, accusé d’injustice dans le budget alloué aux employés d’EDL, qui le premier a réagi hier en publiant un communiqué à destination de l’opinion publique, « pour rétablir la vérité ». « Le budget alloué à EDL ne peut être ratifié qu’à la suite de son approbation par le conseil d’administration de l’institution et par le ministère de l’Énergie et de l’Eau », a indiqué le communiqué, qui a par ailleurs vivement critiqué « la campagne déchaînée et la grève injustifiée des employés d’EDL ». « Le ministère a bien reçu une lettre de la part du directeur général d’EDL, dans laquelle ce dernier demande la révision du budget », a souligné le communiqué du ministère. « Nous avons demandé des informations supplémentaires dans un délai de cinq jours et nous attendons toujours », a ajouté le communiqué.

 

(Lire aussi, les témoignages de Libanais exécédés)


De son côté, le ministre de l’Énergie et de l’Eau, Gebran Bassil, a convoqué hier le président du syndicat des employés d’EDL, M. Saleh, et le directeur général de l’institution, Kamal Hayek, pour tenter d’apaiser les tensions. « Nous comprenons les revendications des employés, mais aucune grève ne devrait pénaliser les droits des citoyens », a affirmé M. Bassil, appelant au dialogue entre toutes les parties, « dans le respect du droit ». Et c’est au terme de la réunion que M. Saleh a annoncé la suspension de la grève.

 « Une catastrophe pour le secteur industriel »
« Le courant électrique est totalement coupé depuis lundi dans la région industrielle de Zouk Mosbeh », s’est insurgé le directeur commercial de l’usine d’aluminium Sidem, André Kurdy. Contacté par L’Orient-Le Jour, il a expliqué que son usine, dont les besoins en énergie varient entre 5 à 6 mégawatts, fonctionne généralement avec sept générateurs qui pallient les 19 heures de coupures d’électricité quotidiennes en moyenne. « Le coût énergétique pour notre usine est d’environ 30 000 dollars par jour, soit plus de 850 000 dollars par mois, et nos factures d’électricité ont doublé en deux ans ! » s’est-il indigné. « Notre usine fonctionne 24h/24, 7 jours/7, mais depuis une semaine les générateurs n’arrivent plus à suivre, car ils ne peuvent fonctionner sans arrêt et sans maintenance », explique le directeur commercial de Sidem. L’usine qui emploie 450 personnes n’a plus les moyens de poursuivre ses activités. « Nous avons décidé de mettre tous nos employés en congé pendant deux jours, le temps que les pannes soient réparées », indique-t-il. « Cette décision est bien entendu lourde de conséquences pour une usine dont le chiffre d’affaires est de 300 000 dollars par jour, mais nous ne pouvons techniquement et financièrement faire autrement », a regretté M. Kurdy.


Même son de cloche du côté du syndicat de l’Association des industriels libanais (AIL). « Le problème de l’électricité est une catastrophe pour l’ensemble du secteur industriel, a affirmé à L’Orient-Le Jour le vice-président de l’AIL, Ziad Bekdache. Avec les prix du fuel qui augmentent et l’alimentation électrique qui baisse, nous ne pouvons plus être compétitifs à l’échelle locale et internationale, déplore-t-il, et ces quelques jours de tempête ont enfoncé, encore une fois, les industriels dans des difficultés financières inchiffrables. »


Mais bonne nouvelle, EDL a annoncé que les pannes avaient commencé à être réparées dès hier soir et que la situation reviendrait « à la normale » au cours du week-end. On finit par se réjouir de peu.

 

 

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