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Nos Lecteurs ont la Parole

I - Les chrétiens et le projet de loi électorale de la Rencontre grecque-orthodoxe

Par Riad JREIGE
Depuis le « printemps » arabe et même bien avant, nous ne cessons d’assister, impuissants, à l’exil de chrétiens de l’ensemble du monde arabe, à commencer par celui du berceau de la chrétienté en Terre sainte où ils ne représentent guère plus de 1 % de la population. L’exil des chrétiens englobe d’autres pays de la région touchés par les événements : Irak, Égypte, Syrie...
Le Liban paraît, à bien des égards, menacé dans son existence pluricommunautaire. Ce fait a été souligné et appuyé par l’ensemble des chefs des Églises orientales, mais aussi par le Vatican à travers la visite chargée de symboles du saint-père en septembre dernier au Liban.
Dans notre pays, chaque élection est l’occasion d’un regain de tension, mettant à chaque fois un peu plus le Liban au bord de l’implosion, surtout depuis la fin de la guerre civile qui, pour la grande majorité d’entre nous, est restée floue et en partie source de ces tensions.
Le terme de la législature actuelle est prévu pour juin 2013, les nouvelles élections pour le renouvellement du Parlement devraient donc se dérouler durant cette période.
Nous avons entendu parler de plusieurs projets de loi, dont celui de 1960 amendé en 2008 à Doha, dont visiblement aujourd’hui personne ne veut.
Le projet de loi électorale imaginé par le bloc du 14 Mars prévoit 50 circonscriptions (mode de scrutin majoritaire), le projet du gouvernement, lui, en retient 13 (mode de scrutin proportionnel) et celui de la Rencontre grecque-orthodoxe porte sur une circonscription unique (mode de scrutin proportionnel). L’ancien vice-président de la Chambre, Élie Ferzly, a défendu ce dernier texte le 17 décembre 2012 sur la chaîne OTV.
Nous pensons qu’il s’agit là d’un projet qui respecte chaque électeur issu d’une des communautés libanaises qui donnera sa voix à son candidat pour la représentation parlementaire de sa même communauté, au sein d’une nation dont la raison d’être est basée sur le communautarisme et le confessionnalisme.
Quand bien même nous nous qualifierions de laïcs, chacun d’entre nous naît, vote, se marie, meurt au sein de sa communauté selon ses traditions et ses règles communautaires.
Le Liban a été officiellement créé en 1943. Il s’est doté d’une Constitution qui défend cette vision multicommunautaire spécifique au pays, qu’il n’est pas possible aujourd’hui de changer, à moins de changer la Constitution.
En effet, ce qui est défendu dans cet article, qui concerne les élections législatives de 2013, c’est le Liban circonscription unique et des élections législatives à la proportionnelle qui verraient chaque communauté élire ses représentants.
Rappelons que les chrétiens libanais (maronites, grecs-orthodoxes, grecs-catholiques, syriaques, arméniens, etc.) auront de toute façon à élire, sur l’ensemble du Liban, 64 députés et les non-chrétiens libanais (sunnites, chiites, druzes, etc.) également 64 députés. Soit un total de 128 députés que compte le Parlement.
Cela a été défini par les accords de Taëf en 1990, en contrepartie de la réduction des prérogatives du président de la République au profit du Premier ministre, cela indépendamment du poids démographique réel des chrétiens sur le terrain.
Pour les chrétiens, ne s’agit-il pas là d’une occasion en or, à défaut d’être l’occasion historique, qu’il serait bienveillant de saisir ?
Pour le moment et malgré la fin officielle de la guerre civile depuis plus de vingt-deux ans, on voit persister le monopole politique quasi féodal (plus ou moins paramilitaire) de certains partis, voire de certaines familles dans chacune des communautés (courant du Futur pour les sunnites, Hezbollah et Amal pour les chiites ; Kataëb, Forces libanaises pour les chrétiens, etc.), liés entre eux selon leurs intérêts, sur des listes de candidats mélangeant les communautés et élus selon un mode de scrutin majoritaire. Ces listes sont établies, séparées en deux blocs (8 et 14 Mars), selon des objectifs qui ne sont pas toujours au service de tous, dans une vision unificatrice et nationale, mais plutôt dans une vision sectaire et régionale.
Il serait utile et même salutaire de briser ces monopoles, non pas selon un mode violent sur le terrain en provoquant une autre guerre civile tout en s’aidant de l’extérieur et du parrainage de puissances régionales, mais au Parlement et à l’intérieur de chacune des communautés, sans parrainage extérieur, par la voie démocratique par excellence que représente le mode proportionnel.
Il importe donc que chaque chef de communauté et, singulièrement, la communauté chrétienne, en prenne conscience.
Si l’un des chefs chrétiens refuse de regarder cette réalité en face, il mettra en difficulté, et même en péril, l’avenir politique et existentiel de l’ensemble des chrétiens du Liban. Aucun prétexte ne pourra être avancé, surtout pas celui de la compromission vis-à-vis de ses alliés (d’une autre confession) pour justifier sa position. Si tel était le cas, la voie proportionnelle viendrait rétablir cette équité dans la représentativité, mise à mal jusque-là par ces monopoles.
La logique des blocs du 8 et 14 Mars pour cette question spécifiquement ne tient pas. Il s’agit, pour les chrétiens, de saisir cette occasion historique de renforcer et leur présence et leur poids politique, non comme partenaire mais en tant que chrétiens. Il s’agit, pour l’État, d’une occasion également historique de restaurer son autorité en luttant contre le clientélisme féodal et son corollaire, la corruption institutionnalisée qui le ronge et le détruit en profondeur.
Il sera ainsi demandé aux chrétiens du 14 Mars, du 8 Mars ainsi qu’aux autres parties, indépendamment de leur couleur politique, de proposer autant de candidats qu’ils le souhaitent et d’accepter la proportionnelle lors des élections législatives. Une autorité morale à égale distance des partis politiques désignera les candidats, cela pour ne pas faire obstacle aux candidats potentiels en dehors de ces partis.

Riad JREIGE
Montpellier – France
Depuis le « printemps » arabe et même bien avant, nous ne cessons d’assister, impuissants, à l’exil de chrétiens de l’ensemble du monde arabe, à commencer par celui du berceau de la chrétienté en Terre sainte où ils ne représentent guère plus de 1 % de la population. L’exil des chrétiens englobe d’autres pays de la région touchés par les événements : Irak,...

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