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À La Une - Cimaises

Chaise, table et... homme-oiseau

À la galerie Joanna Saikaly*, Semaan Khawam se donne des traits « ornithomorphes ». Et survole la condition humaine d’un tire d’aile... euh pardon, d’un coup de pinceau.

Dans le monde métaphorique de Semaan Khawam, les oiseaux prennent peu à peu la place des poissons...

Autodidacte. Ce mot, qui sonne comme une affirmation sacramentelle, est apposé en tête de sa biographie et valorise son parcours sans le sacro-saint diplôme. Revendication plus que simple information pour Semaan Khawam, artiste, poète, designer, acteur, scénariste, graffeur impénitent, puni en avril dernier pour avoir tagué sur les murs de Beyrouth un soldat armé d’un AK 47. Jugé pour avoir «troublé l’ordre public», il risquait une amende d’un million de livres libanaises ou trois mois de prison. «J’ai peint ces soldats comme une piqûre de rappel car, depuis plusieurs années, je vois revenir les vieux fantômes du confessionnalisme», avait déclaré Khawam lors de cette bataille (de plus) pour la liberté d’expression.
Dans le monde métaphorique de Semaan Khawam, les oiseaux prennent peu à peu la place des poissons, jadis «bêtes noires» du peintre. Depuis, en fait, une quasi-noyade au cours de laquelle il s’est senti englouti par la mer comme un poisson... mort. D’où son obsession pour les vertébrés aquatiques. Morbide certes mais, sur ses toiles, c’est plutôt un sentiment de mélancolie qui prime.
Les hirondelles, symboles de liberté, de bonheur, de fécondité, d’enthousiasme, de chance, de fidélité, de loyauté, de pureté et d’endurance, viennent alors ajouter une touche d’espoir à un monde figé, aux couleurs crayonneuses.
Un monde construit comme on croque une «nature morte». Figé, immobilisé, dans un espace hors temps, une quatrième dimension où les objets inanimés ont une âme. La chaise, la table, le dressoir... des éléments qui expriment l’immobilité, la stagnation, l’enfermement. Même la muse de l’artiste est cloisonnée, allongée comme une sirène dans l’espace exigu d’une sorte de desserte.
Sur un coin de la galerie, l’artiste a installé un petit meuble contenant une bouteille de whisky et des exemplaires de son dernier recueil, Dalil al-Mouharrij (Le Guide du clown). Au-dessus, une cage vide, à la porte cadenassée.
L’œuvre de Khawam est à l’évidence bourrée de signes et de symboles. Comme son écriture qui se présente là sous forme de poésie arabe contemporaine dans un ouvrage publié chez Amers Editions. Un texte rédigé dans les années 2000, pendant lesquelles Semaan Khawam épuisait la forme poétique courte qui reprend des thèmes classiques – l’amour, la dépendance passionnée à l’alcool, à la femme, la dérision de soi, la fascination pour la chute et, dans une moindre mesure, le recul par rapport au sacré. C’est l’envie de tourner la page et d’interrompre cette forme qui aurait motivé l’auteur à publier ses textes. C’est donc un acte de publication qui annonce tacitement une rupture. À voir et à lire, jusqu’au 14 décembre.

*Du lundi au vendredi, de 14h à 19h. Rue Gouraud, imm. Saad, face à la Croix-Rouge. Tél. : 70/776711.
Autodidacte. Ce mot, qui sonne comme une affirmation sacramentelle, est apposé en tête de sa biographie et valorise son parcours sans le sacro-saint diplôme. Revendication plus que simple information pour Semaan Khawam, artiste, poète, designer, acteur, scénariste, graffeur impénitent, puni en avril dernier pour avoir tagué sur les murs de Beyrouth un soldat armé d’un AK 47. Jugé pour...
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