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Nos Lecteurs ont la Parole - Échos de l’agora

Le printemps du Liban

14 février 2005 : assassinat de Rafic Hariri / 19 octobre 2012 : assassinat de Wissam el-Hassan. Cette tranche de notre histoire constitue un tout car aujourd’hui, au lendemain de l’attentat d’Achrafieh, une nouvelle ère a commencé. Plus d’un observateur pensent que nous nous trouvons au seuil d’une nouvelle dynamique d’un « printemps du Liban ». Le 30 octobre, lors d’une réunion solennelle, les trois grands partis de la coalition du 14 Mars ont fait une déclaration au ton véhément, refusant le diktat « bolchevique » du camp adverse sans toutefois, en bons « mencheviks », proposer une vision globale pouvant servir d’assises à un programme politique à moyen et long terme.
L’image médiatique de cette réunion, si elle a reçu l’adhésion d’une large frange de l’opinion souverainiste, n’a cependant pas soulevé l’enthousiasme général. Le public a certes applaudi le ton et le contenu du discours de M. Siniora, mais l’image médiatique de la tribune est loin d’avoir entraîné son enthousiasme. L’absence de figures « indépendantes » aussi symboliques que celles de MM. Samir Frangié et Farès Souaid fait couler beaucoup d’encre.
Pourquoi ce revirement et ce repli sur soi des partis politiques traditionnels? Existe-t-il un malaise au sein des forces coalisées du 14 Mars ? Existe-t-il des dissensions graves entre les pôles relevant d’une même affiliation confessionnelle ? Ces questions doivent être publiquement posées car le louvoiement, le non-dit, les petits calculs d’épicier-comptable ne leurrent plus personne. Tout le monde est souverainiste au sein de cette coalition, mais tout le monde ne l’est pas de la même manière. C’est là tout le problème qu’il appartient à ce camp de clarifier s’il ne veut pas essuyer une cuisante sanction électorale par démobilisation de l’opinion publique qui est l’auteur authentique de la journée du 14 mars 2005, son moteur de toujours, sa raison d’être et le gardien de son esprit. Le 14 Mars n’est ni un parti ni une coalition de partis, mais un état d’esprit. Il est temps que les forces politiques comprennent cette vérité de bon sens.
N’en déplaise aux uns et aux autres, le citoyen libanais du 14 mars 2005 n’a pas vu le jour sur le gazon du stade des Jeux olympiques de Berlin en 1936, ni dans les ruelles du vieux Beyrouth transformées en tranchées entre 1975 et 1980, ni dans les couloirs des palais de Taëf en Arabie « heureuse ». Certes, tous ces facteurs ont contribué à son émergence, mais ce citoyen du 14 mars 2005 s’est fait lui-même, et c’est ce que les forces politiques ne peuvent pas comprendre et ne veulent pas admettre, tant elles sont engluées dans des catégories mentales qui leur font croire qu’elles exercent une tutelle de facto sur une part importante de la population.
L’événement « 14 mars » a eu lieu le lundi 14 mars de l’an 2005. C’est une date éphémère. Ce jour-là, une foule énorme s’était rassemblée, non autour d’un programme ou d’un leader, mais autour d’elle-même, symboliquement représentée par l’homme assassiné par l’occupant et ses agents. Cette foule était elle-même l’événement, elle fut une foule-communion. Vouloir à tout prix y voir un programme politique est une dangereuse vue de l’esprit. S’obstiner à faire du « 14 Mars » une identité partisane pérenne est une grave erreur. On ne peut pas figer le temps. La foule ne peut pas rester indéfiniment sur les places publiques de Beyrouth. Chacun rentre chez soi, il a participé à la « communion-événement » et poursuit maintenant son engagement dans la vie publique selon ses convictions et sa sensibilité. Tout a été fait pour piéger cet individu sur la place des Martyrs sous le slogan « 14 Mars ». Le camp souverainiste a commis cette bévue par candeur et naïveté; le camp adverse par pur machiavélisme opportuniste. L’opposition binaire « Toi/Moi » pouvait s’éterniser tout à l’avantage du camp adverse, celui de l’axe irano-syrien.
Au sein du camp souverainiste, tout a été fait pour récupérer la dynamique communielle de la foule au profit des intérêts claniques ou confessionnels des uns et des intérêts confessionnels et géostratégiques des autres. Les forces chrétiennes ont cru qu’elles pourraient perpétuer les recettes traditionnelles de l’équation libanaise : règlement de Chekib Effendi (1842), protocole de la moutassarrifiya (1861), pacte national (1943), accords de Taëf (1989) sans compter les récents accords de Doha (2008).
L’image médiatique de la réunion plénière du 30 octobre 2012 nous a renvoyé ce passé ambigu. Les « partis » et les « clans » étaient tous là. Était absente l’immense foule-communielle du 14 mars 2005 par le biais de quelques figures à haute charge symbolique.
Le « printemps du Liban » peut enfin commencer. Il ne reste plus à l’opinion publique, libérée de toute hypothèque, qu’à se précipiter au secours du pays en danger. Osera-t-elle ?
14 février 2005 : assassinat de Rafic Hariri / 19 octobre 2012 : assassinat de Wissam el-Hassan. Cette tranche de notre histoire constitue un tout car aujourd’hui, au lendemain de l’attentat d’Achrafieh, une nouvelle ère a commencé. Plus d’un observateur pensent que nous nous trouvons au seuil d’une nouvelle dynamique d’un « printemps du Liban ». Le 30 octobre,...

commentaires (4)

Il ne suffit pas de crier !

Antoine-Serge Karamaoun

20 h 36, le 02 novembre 2012

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Commentaires (4)

  • Il ne suffit pas de crier !

    Antoine-Serge Karamaoun

    20 h 36, le 02 novembre 2012

  • Que peut-on ajouter a cet excellent expose du docteur Antoine Courban? J'en saisis au vol la dernière référence: L'OPINION PUBLIQUE. Mais qui, parmi nos "leaders" se préoccupe réellement de cette opinion publique? Peu ou prou dirais-je, car ils sont trop occupes a la "créer" a travers les medias traditionnels, cette opinion publique. Quand a l'authentique opinion des citoyens, elle ne peut aspirer à poindre le bout du nez qu'a travers certains medias sociaux qui ne sont généralement lus que par une mince tranche de la population. Et surtout ne me parlez pas des ONG a but non lucratif qui, a l'exception de certaines réalisations méritoires, ne se sont généralement pas montre a la hauteur de nos esperances. Que nous reste-t-il donc pour que le printemps Libanais se concrétise? Peut-être un peu plus de violence, un peu plus de faillites généralisées pour que le bon peuple se décide à se réveiller?

    George Sabat

    16 h 09, le 02 novembre 2012

  • Ce qu'il faut à TOUS, c'est le RÉALISME et non les RÊVES ! Le quatorzième parallèle de Mars est un corps sans TÊTE. Et le huitième parallèle est une tête sans CORPS. On pourrait aussi inverser, le résultat serait le même. Si on ne s'assoie pas ensemble, pour dialoguer et se compléter, les paroles en l'air, les désirs et les souhaits, les attentats contre UNE SEULE PARTIE, et les révoltes dans les Médias, comme les supposés printemps, ne conduiraient qu'à l'ANARCHIE...

    SAKR LEBNAN

    08 h 13, le 02 novembre 2012

  • Avec son fils le Solennel Saad ainsi que son Flamboyant "Futur", Rafik HARIRI eut toujours le souci d’Instruire à ses propres frais moult de cette nouvelle génération de jeunes Libanais, et de leur donner la possibilité d’acquérir des enseignements citoyens de même qu’à leurs ainés. Son expérience était immense et, tout en étant au départ Biznessman, il avait étudié pendant des années l’histoire de ce pays ainsi que les ouvrages, les études et les enquêtes de "spécialistes?" qui s’y rapportaient : aussi ses bienfaits envers cette "fertiiile!?" contrée exigent-ils de ceux qui les analysent qu’ils en possèdent eux-mêmes au moins des connaissances sérieuses à ce sujet ! Au surplus, depuis l’époque de ses débuts en politique, les commentaires les plus variés n’ont-ils cessé de se succéder pour éclairer les nobles intentions et le sens le plus profond de l’épopée de Rafik HARIRI et de Saad son Solennel fils. Commencée depuis les années quatre-vingts même, ce chantier-épopée fut au départ conçu par Rafik sur de plus modestes bases. Plus tard amplifié par le renflouement d’immenses New Capitaux "H E U R E U X", il se présenta alors à tous ces Libanais pâmés comme l’une des œuvres, si pas la seule, les plus vastes et les plus élaborées qui furent jamais entreprises en vue de tenter de remettre ne fut ce qu’un tant soit peu cette montagne Crevassée et Campagnardisée sur ses deux pieds ; yâ hassértéhhh !

    Antoine-Serge KARAMAOUN

    05 h 25, le 02 novembre 2012

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