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Sleiman : La participation des chrétiens à la vie politique, condition de la démocratie dans la région

Dans un discours de bienvenue au pape Benoît XVI, le président Michel Sleiman a réaffirmé les positions de principe du pouvoir concernant la situation régionale et la crise syrienne, soulignant notamment que « la démocratie, la justice et la paix sont des faits de culture avant tout autre chose », et que l’une des conditions de la démocratie dans la région est la participation de toutes les composantes de la société, notamment de la composante chrétienne, à la vie politique. Voici le texte intégral du discours du chef de l’État :


« Cette grande rencontre revêt, de par sa configuration et ses objectifs ainsi que de par la symbolique du lieu et la particularité du moment une importance exceptionnelle et une dimension historique spécifique.
« Vous venez au Liban portant un message d’amour et de paix sur les pas de votre grand prédécesseur, le bienheureux Jean-Paul II, qui a accordé aux Libanais, le 10 mai 1997, une Exhortation apostolique visionnaire et pleine de sagesse et d’espérance : “Une espérance nouvelle pour le Liban”. Cette Exhortation affirme que “le Liban est plus qu’un pays, il est un message de liberté et de convivialité adressé à l’Orient et à l’Occident”.
« En cette étape critique de notre vie nationale, où certains autour de nous semblent déraper vers la logique de la violence et les dangers de la division communautaire et confessionnelle, et où les peuples arabes cherchent, non sans difficultés, à façonner leur avenir et parfaire leurs choix, nous sommes certains, Votre Sainteté, que votre visite redonnera du lustre au message du Liban et un éclat nouveau à son statut et son rôle de pionnier dans son entourage, en tant que patrie de dialogue, de rencontre et de concorde, et aussi en tant que modèle vivant et centre mondial espéré pour le dialogue des civilisations, des cultures et des religions, tel que je l’ai prôné devant l’Assemblée générale des Nations unies.


« Sainteté, nous nous sommes initialement engagés à vivre ensemble, dans le giron de l’État, au sein d’un régime démocratique qui garantisse la liberté d’opinion et permette l’alternance pacifique au niveau du pouvoir. Il est écrit dans l’article 9 de la Constitution libanaise que “la liberté de croyance est absolue au Liban” et que “l’État respecte toutes les religions et toutes les confessions, et garantit la liberté de célébration des cultes religieux sous sa protection”.


« La cohabitation pour les Libanais n’est pas une formule figée, mais une complémentarité humaine constructive, une interaction intellectuelle et culturelle productive, un enrichissement mutuel et une appartenance. Elle est au cœur de la philosophie portée par l’entité nationale et elle se fonde sur une volonté politique libre et renouvelée. Elle se traduit, sur le plan pratique, par la participation de toutes les communautés et tous les groupes composant la société, à la gestion des affaires publiques, de manière équitable et équilibrée, afin de parvenir à l’État civil, garant des droits de tous les citoyens sans discrimination ou favoritisme.
« Cela constitue le noyau de notre pacte de concorde dont nous persévérons à en développer la formule et à en consolider les fondements par la compréhension mutuelle et le dialogue, malgré les obstacles occasionnels et les revers passagers. »

Feuille de route pour les chrétiens d’Orient
« Nous savons, Votre Sainteté, que le Saint-Siège n’est point inspiré par un intérêt économique ou matériel dans la conception de sa politique et de ses orientations, mais plutôt par une recherche objective et attentionnée du bien public, et de la dignité de l’homme et de son bien-être.
« Pour cette raison, vous adressez au Liban et à travers lui à toute la région, dans toutes ses composantes communautaires et sociales, chrétiens et musulmans confondus, sans oublier la diaspora libanaise et des pays de l’Orient, un message dont le contenu est pur et dénué de toute convoitise, plus particulièrement dans l’Exhortation apostolique de l’Assemblée spéciale pour le Moyen-Orient du synode des évêques que vous avez signée hier après-midi.
« Le contenu, les recommandations et les leçons inclus dans cette Exhortation en font un guide et une feuille de route pour les chrétiens d’Orient et pour tous ceux qui s’engagent sur le chemin du partenariat, de l’amour, de la justice et de la paix.
« Ainsi, nous mettons notre expérience libanaise unique sous le regard bienveillant de Votre Sainteté. C’est une expérience qui n’a pas été vaincue, au cours des décennies précédentes, par les difficultés qui ont éprouvé notre volonté de vivre ensemble ; sachant que ces défis continuent à confronter le chemin de notre parcours national, dans un monde à la fois changeant et interdépendant.
« Parmi ces défis, nous citons ceux de l’application de la résolution 1701 du Conseil de sécurité, dans toutes ses dispositions, la nécessité d’empêcher Israël de poursuivre ses violations et ses menaces perpétuelles contre le Liban, la confrontation des dangers du terrorisme et d’éventuels plans d’intrigue et de discorde, l’opposition à toute sorte d’implantation des réfugiés palestiniens sur notre territoire, non seulement du fait que l’implantation est en contradiction avec la Constitution libanaise et les conditions de notre concorde nationale, mais essentiellement du fait qu’elle est en contradiction avec le droit naturel de ces réfugiés de retourner à leur terre et à leur domicile d’origine.
« Ajoutons à ce qui précède, la nécessité de réaliser un développement équilibré, de protéger notre environnement, d’assurer des emplois à nos citoyens et plus particulièrement aux jeunes afin de les inciter à s’attacher à leur pays, à leur terre, à leur identité et à leur patrimoine. »

Le volet régional
« Votre Sainteté, le soutien que vous apportez au Liban revêt, en ces circonstances particulières, une grande importance due à ce que vous représentez et à ce que représente le siège apostolique en tant que valeur spirituelle sublime et autorité morale influente.
« Nous nous sommes, en outre, réjouis du fait que le Conseil de sécurité, suivi du Conseil de l’Europe et d’un nombre important d’instances spirituelles et étatiques aient loué l’appel à la poursuite des travaux de la Commission pour le dialogue ainsi que “la déclaration de Baabda” qui a réaffirmé et reformulé les fondements de notre entente nationale, de même que leur soutien pour la stabilité dans notre pays.

« Votre Sainteté,
« Nous avons convenu, au Liban, de prévenir notre pays des répercussions négatives éventuelles de tous les événements qui se déroulent autour de nous et d’adopter une position de neutralité vis-à-vis de toute politique d’axes, et de même de nous dissocier des conflits régionaux et internationaux, dans le but d’éloigner les dangers et de protéger notre stabilité et notre unité nationale, sans nous dissocier pour autant de notre engagement envers les causes arabes justes, au premier rang desquelles la cause de la Palestine, ni des résolutions internationales ni de toute cause humanitaire. Ainsi en va-t-il de l’intérêt que nous avons porté et de tous les soins possibles que nous avons prodigués aux dizaines de milliers de réfugiés syriens qui sont entrés en territoire libanais, par peur, par nécessité ou par gêne.
« Nous avons de même déclaré, depuis le début, que le Liban souhaite aux peuples arabes frères, et au peuple syrien en particulier, ce que ces peuples désirent pour eux-mêmes en matière de réforme, de liberté et de démocratie. Nous leur souhaitons de pouvoir réaliser leurs revendications légitimes par la voie du dialogue et de la politique idoine, loin de toute forme de violence et de coercition. »

Les conditions de la démocratie
« Mais cette démocratie, avec tout ce qu’elle est supposée apporter comme stabilité et bien-être, ne peut s’établir et s’enraciner, du point de vue de la logique et de la justice, s’il ne lui est pas donné de réaliser les conditions suivantes :
« 1) Assurer aux diverses composantes humaines et culturelles du monde arabe, y compris la composante chrétienne dont les racines, en cet Orient, remontent à plus de 2 000 ans, une participation dans la vie politique et la gestion des affaires publiques, indépendamment de leur proportion numérique, sur la base de la citoyenneté et de la diversité au sein de l’unité, comme je l’ai mentionné dans mon discours devant le sommet arabe qui s’est tenu à Bagdad le 29 mars dernier. Ainsi, ces composantes de l’entité arabe, dans toutes leurs dimensions culturelles et intellectuelles, ne ressentiront point d’inquiétude quant à leur présence et à leur avenir, et participeront d’une meilleure façon à la renaissance et au progrès de leur pays.
« 2) Réaliser la justice sociale, respecter les libertés publiques et les droits de l’homme, y compris ceux de la femme, et donner à la jeunesse son rôle et son droit dans le système de prise de décision.
« 3) S’engager de manière plus profonde et plus clairvoyante dans le dialogue des civilisations, des cultures et des religions, y compris le dialogue des communautés et des confessions, sur la base du respect mutuel, loin des tentatives de discorde et de toute logique d’isolement, d’affrontement et de prédominance.
« 4) Inciter la communauté internationale à imposer une solution juste et globale qui résoudrait tous les aspects du conflit arabo-israélien ainsi que la question palestinienne, y compris le statut particulier de Jérusalem et des lieux saints, suivant en cela un calendrier contraignant et bien défini qui empêcherait la consécration de tout fait accompli, qui viserait à la création de colonies illégales et à la judaïsation de la Ville sainte tout autant qu’à la consécration de l’occupation. Une telle solution ne peut être qualifiée de stable si elle ne se fonde pas sur le droit international, sur les résolutions internationales y attenant, sur les termes de référence de la conférence de Madrid et l’initiative arabe de paix qui a été adoptée à Beyrouth depuis déjà une décennie.
« Jérusalem persistera éternellement dans nos pensées, reine des villes, ville de paix et point d’attraction où la justice est supposée prévaloir afin que tous les peuples de croyants se dirigent vers elle et se rencontrent sur la base de l’amitié, de l’amour et de la foi, en présence du Dieu unique. »

Appel aux jeunes
« Sainteté,
« Face aux malheurs et aux crises, et face à toute épreuve de volonté et de caractère, on peut se contenter de regarder tout en restant passif ou bien fuir au loin, ou s’engager courageusement dans un mouvement de solidarité généreuse afin de soigner les blessures, de reconstruire ce qui a été détruit, de réparer ce qui a été déchiré et de consoler les victimes frappées par le malheur.
« J’invite mes concitoyens et les jeunes en particulier, en votre sainte présence et avec votre bénédiction, à ne point se laisser aller à un état de retrait sur soi, d’isolation ou d’extrémisme. Je les invite à s’engager dans le travail qui vise à faire fructifier leurs talents et à servir le bien public tout en restant fidèles à ce qui les caractérise, à savoir l’esprit d’ouverture et de générosité.
« Je les invite, enfin, à préserver leur foi et leur humanité, ainsi que l’ensemble des valeurs spirituelles et familiales qui leur ont permis de vaincre les obstacles et d’obtenir de nombreuses grâces de Dieu.
« Ainsi le Liban leur est conservé pour eux et avec eux, une oasis pour le dialogue des cœurs et des esprits, un phare de pensée positive, une passerelle de communication et de complémentarité, et un message de liberté et de convivialité pour l’Orient et l’Occident.
« Ceci dit, nous sommes conscients que la démocratie, la justice, la paix, le respect de l’opinion d’autrui, l’esprit d’amour et de dialogue sont des faits de culture avant toute chose, et une manière de penser et de vivre. Ils ont aussi une responsabilité éducative, informationnelle et sociale qui incombe à la fois aux instances spirituelles et temporelles, dans un monde où prévalent le doute et les bouleversements, et qui peine à créer un nouvel ordre politique et économique mondial, plus juste, plus équitable et plus conforme aux valeurs.
« Nous sommes honorés d’accueillir Votre Sainteté, maintenant et toujours, en ces lieux, et d’écouter, avec attention, le message central que vous désirez livrer, ici même, au lendemain de la signature de l’Exhortation apostolique.
« Vive le Saint-Siège,
« Vive le Liban. »

Dans un discours de bienvenue au pape Benoît XVI, le président Michel Sleiman a réaffirmé les positions de principe du pouvoir concernant la situation régionale et la crise syrienne, soulignant notamment que « la démocratie, la justice et la paix sont des faits de culture avant tout autre chose », et que l’une des conditions de la démocratie dans la région est la participation de...

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