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Une chercheuse libano-canadienne s’intéresse à la fameuse dépression chez les femmes enceintes

Le Dr Rima Azar, professeure adjointe en psychologie de la santé à l’Université Mount Allison (Canada), dirige une étude clinique qui vise à étudier le lien entre la dépression et l’anxiété chez la femme enceinte et le nouveau-né.

Le Dr Rima Azar s’est penchée, dans le cadre de sa thèse de doctorat, sur le stress des nourrissons de mères adolescentes.

Elle a gardé dans son regard le soleil du Liban, son pays d’origine, qui, lorsqu’elle l’a quitté à l’âge de dix-sept ans pour s’installer au Canada, saignait, lacéré par la guerre civile. « Des barrages coupaient les rues et, plus grave encore, d’énormes barrières psychologiques séparaient les gens », se rappelle le Dr Rima Azar. Un vécu qui n’est peut-être pas étranger à l’objet de ses recherches en psycho-neuro-immunologie (l’étude des interactions entre les processus psychologique, neuronal, endocrinien et immunitaire dans le but d’élucider leur impact sur la santé). Un domaine de recherche relativement nouveau et multidisciplinaire. « L’étude que nous menons présentement se penche sur l’humeur dépressive et anxieuse de la femme enceinte, les marqueurs pro-inflammatoires pendant la grossesse et la croissance du fœtus », poursuit le Dr Azar qui dirige, depuis 2008, le Laboratoire de psychobiologie du stress et de la santé à l’Université Mount Allison (MTA) au Nouveau-Brunswick.

Un parcours académique et professionnel des plus intéressants
Après une maîtrise en psychoéducation et un doctorat en psycho-neuroendocrinologie développementale obtenu en 2005 de l’Université de Montréal (l’UdeM) – sa thèse, mention remarquable, a été classée par l’UdeM parmi les 10 % meilleures du domaine –, le Dr Azar complète un stage postdoctoral de quatre ans au Réseau universitaire de la santé, Université de Toronto, dans le domaine de la psycho-neuro-immunologie et les maladies coronariennes, avant d’accepter en 2008 un poste académique à MTA et d’obtenir sa permanence en 2012.
Au mois de mai passé, suite à l’obtention d’un fonds de démarrage pour leur recherche, octroyé par les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC), le Dr Azar et son équipe, composée d’un obstétricien, d’un spécialiste du développement des enfants, d’un épidémiologiste et d’un anthropologue, entament la première phase de l’étude. Le Dr Azar a également reçu une bourse salariale pour nouveau chercheur des IRSC/Programme de partenariat régional-Nouveau-Brunswick, qui lui permet d’alléger sa charge d’enseignement pour consacrer plus de temps à la recherche. « Deux cents femmes dans leur première grossesse, et leurs fœtus/nouveau-nés, participent à l’étude, qui nous permettra de déterminer si les sentiments anxieux ou dépressifs chez les mères sont associés à une croissance fœtale réduite », précise le Dr Azar. La recherche, longitudinale, a pour ambition d’étudier dans sa phase postnatale la réaction des nouveau-nés au stress et leurs réponses inflammatoires en lien avec de futurs risques cardio-vasculaires.
En plus d’apporter de nouvelles connaissances, l’étude, d’une durée de trois ans, aura des implications importantes pour la pratique et la politique de la santé prénatale. « Les résultats sensibiliseront les médecins sur l’importance de la détection précoce des symptômes dépressifs de la femme enceinte d’un côté. D’un autre côté, ils serviront de base pour une étude ultérieure visant à élaborer et tester de brèves interventions afin de réduire la dépression subclinique (dépression d’intensité très légère, située sous le seuil diagnostique) », explique le Dr Azar.

La prévention de la maladie coronarienne
Passionnée par la recherche, le Dr Azar, pour laquelle « toute situation est une occasion d’apprentissage », travaille également sur le dosage de la protéine C-réactive (CRP), un marqueur de l’inflammation, chez les individus jeunes et en bonne santé exposés à la fumée du tabac. « Mon objectif à long terme pour les deux lignes de recherche est la prévention de la maladie coronarienne », affirme-t-elle.
La chercheuse, qui confie que ce qu’elle apprécie le plus de son métier, c’est le contact humain, projette de faire des recherches sur la dépression parmi les détenus dans les pénitenciers. « Je m’intéresse également à l’adaptation au stress, tant sur le plan physiologique que psychologique, indique le Dr Azar qui avait travaillé, au cours de ses recherches antérieures, avec des parents d’enfants atteints de maladies chroniques. Je planifie de débuter un projet pilote avec des gardiens de prison à sécurité maximale pour évaluer leurs sources et niveaux de stress, le risque d’épuisement professionnel et les stratégies d’adaptation développées. Cela dans le but de contribuer à améliorer leurs conditions de travail. »
Des conseils qu’elle répète à ses étudiants : « Cultivez votre sens critique. Questionnez les articles scientifiques certes, mais aussi l’information massive sur Internet et les articles dans les journaux. » Des recommandations universelles, valables pour tous les étudiants. « Dans le contexte sociopolitique actuel au Liban, cette approche scientifique aidera les jeunes Libanais à demeurer critiques face au risque de désinformation ou de rumeurs non fondées présentées parfois comme des certitudes », souligne le Dr Azar.
La chercheuse, qui, à ses débuts, « rêvait comme tout jeune de changer le monde », le fait à sa manière, elle dont l’une des publications dans la très sérieuse revue scientifique Biological Psychiatry a été qualifiée par les éditeurs comme « une étude ayant conduit à d’importantes conclusions particulièrement précieuses pour la communauté ».
Elle a gardé dans son regard le soleil du Liban, son pays d’origine, qui, lorsqu’elle l’a quitté à l’âge de dix-sept ans pour s’installer au Canada, saignait, lacéré par la guerre civile. « Des barrages coupaient les rues et, plus grave encore, d’énormes barrières psychologiques séparaient les gens », se rappelle le Dr Rima Azar. Un vécu qui n’est peut-être pas...

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