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À La Une - Ici et maintenant

Fourmis

Il a fallu près d’un an et deux mois à la conscience des baladins du monde occidental ou à leurs impératifs minimaux de realpolitik pour réagir. Si elle a atteint des sommets le 25 mai avec 108 morts dont une quarantaine d’enfants, la barbarie à visage animal du gang Assad n’avait pourtant pas attendu Houla pour s’étaler. Un cytomégalovirus, dont la traduction sur le terrain ne se prononce que mezzo voce, presque honteusement : génocide ethnique.
Un drôle de Stratego se joue entre les grandes capitales. Moscou s’arc-boute sur cette Assadie-peau de chagrin qui lui donne encore la rachitique illusion d’être présent et influent au Proche-Orient; il ne doit pourtant pas être très compliqué de lui donner quelque chose en échange... Paris n’exclut pas une intervention armée à condition que l’ONU chapeaute ; Dominique de Villepin doit sourire en silence... Pékin s’en moque ; seuls son économie et sa capacité de grignotage des cinq continents, de l’Afrique à l’Arctique, l’intéressent... Washington enfin se noie dans ses contradictions et ses faiblesses, entre une Maison-Blanche qui n’a pas envie d’entrer en guerre dans les quatre prochaines années, un Pentagone qui aimerait bien, et un département d’État qui minaude de plus en plus ; l’offre et la demande et le troc et le commerce et les magouilles entre l’Iran et les USA sont désormais dignes d’un scénario bollywoodien.
Pour tellement moins que cela, le monde s’était bon gré mal gré uni contre la Libye. Naturellement, il n’y avait ni Iran, ni Israël, ni Hezbollah, ni risque d’implosion du Liban – si tant est que ce risque-là puisse influer d’une manière ou d’une autre sur une décision uni, bi ou multilatérale. Aujourd’hui, les Syriens et avec eux les peuples libres se demandent jusqu’où peut ou doit aller Damas pour que le monde cesse de rabâcher son effroi, cesse de condamner, cesse de bavasser et cesse de tergiverser. Que le sang cesse de couler. Un sang qui n’a jamais compté bien lourd, certes, dans la mathématique des puissances : c’en est presque de bonne guerre, cela est une règle de la nature depuis des temps immémoriaux et on ne combat pas facilement la/sa nature, cela s’appelle de la politique, mais il doit bien exister un seuil, un nombre de litres (d’hémoglobine) au-delà duquel il est impossible de ne rien faire. Le problème est que les Russes, plus que les autres, y sont tellement habitués depuis que le monde est monde qu’ils sont aujourd’hui furieusement blasés. C’est le revers de la médaille : aussi sublime et indispensable soit-elle, l’âme slave n’en est plus à une hémorragie humaine près.
En attendant, les capitales occidentales se sont enfin décidées à expulser les ambassadeurs syriens. L’Élysée y est pour beaucoup. C’est louable, mieux vaut tard que jamais, c’est déjà ça et c’est atrocement insuffisant. Comme ces affamés à qui l’on propose au bout d’interminables mois de jeûne forcé une olive ratatinée et un bout de pain rance, le peuple de Syrie s’est ému. S’est dit heureux. A répété merci. En a demandé plus, timidement, pratiquement désolé de devoir déranger. Sachant qu’il devra sans doute se débrouiller tout seul. Tout le monde, bien sûr, n’a pas la chance d’être bosniaque ou bulgare.
Parce que, aussi bonnes que soient les volontés des Nations unies, de Ban Ki-moon, de Robert Mood, de ces valeureux Bérets bleus qui risquent chaque heure leur vie même s’ils ont plus l’air de surveiller le bon déroulement d’un scrutin électoral dans quelque cocoteraie plus ou moins échauffée que de s’assurer de l’efficacité d’un cessez-le-feu qui n’a jamais, absolument jamais, été respecté, ce n’est pas le plan Annan qui risque de sauver les enfants, les femmes, les vieillards et les démocrates de Syrie. On ne peut résolument être et avoir été : obligé de représenter et d’appliquer autant que faire se peut la partition toute en fausses notes des nations et autres politique des axes, Kofi Annan en devient pathétique. À ce niveau, ce n’est plus de la diplomatie, c’est au mieux une cécité/surdité terribles. Au pire, de la sottise pure.
Peut-être vaut-il mieux dans ce cas démissionner, prendre cette distance si chère aux autorités libanaises et pour laquelle le Liban devra tôt ou tard rendre compte, ne serait-ce que sur le plan humain et moral.
Il a fallu près d’un an et deux mois à la conscience des baladins du monde occidental ou à leurs impératifs minimaux de realpolitik pour réagir. Si elle a atteint des sommets le 25 mai avec 108 morts dont une quarantaine d’enfants, la barbarie à visage animal du gang Assad n’avait pourtant pas attendu Houla pour s’étaler. Un cytomégalovirus, dont la traduction sur le terrain ne se...
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