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Lifestyle - Objets et histoire

Les fauteuils de la gloire !

Né à Paris en 1622, Jean-Baptiste Poquelin, dit Molière, a marqué l’histoire du théâtre et de la comédie française. Il fonde en 1643 « l’Illustre Théâtre » et se fixe comme objectif de « faire rire les honnêtes gens ». C’est vers la fin de 1645 qu’il rejoint la troupe de Charles Dufresne pour sillonner les routes du Languedoc. À Pézenas, le prince de Conti, un grand seigneur libertin et amateur de théâtre, troisième personnage du royaume, le prend sous son aile. Une ère de prospérité s’ouvre pour la troupe, jusqu’à la crise mystique du prince qui vire à la dévotion sous l’influence de son confesseur, l’abbé Rouquette. C’est la fin de la protection du prince, et les comédiens décident de quitter la région pour Paris où le succès les attendait.
Ces années en Languedoc auront marqué Molière, et certains de ses personnages sont peut-être inspirés par ses rencontres. La chronique locale veut en effet que Molière, lorsqu’il résidait à Pézenas, avait coutume de venir dans la boutique d’un barbier du nom de Gély, juste pour le plaisir d’observer les uns et les autres. Installé sur un haut fauteuil de bois, il observait le monde pour trouver l’inspiration et, dès qu’un client s’avisait de s’asseoir à la place du comédien, Gély s’exclamait : « Pas là, c’est la place de Monsieur Molière ! » Depuis, le mouvement moliériste, né à la fin du XVIIIe siècle, après une longue période d’oubli du dramaturge, s’est emparé de ce « fauteuil ». Au long du XIXe siècle, les plus grands noms du théâtre français viennent en pèlerinage à Pézenas pour déclamer Les Fourberies ou Les Femmes savantes, assis dans le fameux fauteuil. Toute une littérature, aussi, dresse un historique de ce siège, suivant à la trace la relique que les descendants du barbier se sont transmise de génération en génération.
Au début du XXe siècle, à la suite d’un déménagement inopiné des lointains héritiers du barbier Gély, on avait perdu la trace du fameux siège. Mais le voilà qui réapparaît en Essonne et son authenticité prouvée après maintes expertises. Mieux, le propriétaire est prêt à s’en défaire moyennant... 100 000 euros. Une somme bien trop importante pour la ville de Pézenas, et même pour la Comédie-Française, qui ont renoncé à l’acheter. Inquiète de voir la relique filer à l’étranger, l’association Les Amis de Pézenas a donc décidé de lancer une souscription pour l’acquérir. À suivre !
Un autre fauteuil tout aussi convoité fut celui de Colbert à l’Académie française : Jean de la Fontaine, le poète aux 243 fables, a été avocat au Parlement de Paris. Il est entré ensuite au service de Fouquet, qui sera disgracié et jeté en prison, mais à qui La Fontaine restera fidèle. D’où sans doute ses mauvaises relations avec Colbert et le roi, que les Fables n’arrangeront pas. Le 6 septembre 1683, Colbert meurt. Il libère ainsi le fauteuil numéro 24 de l’Académie française. C’est l’occasion rêvée pour La Fontaine d’entrer sous la coupole. Il n’est pas le seul à briguer ce fauteuil : Boileau, lui aussi, se verrait bien en habit vert ! Et quand La Fontaine se rend chez lui pour lui demander de bien vouloir lui céder la place, la réponse de Boileau fut une réponse de Normand : « Je ne ferai rien de spécial pour entrer à l’Académie, mais si mes amis m’y poussent je ne refuserai pas... »
Certes, La Fontaine est le meilleur candidat pour l’Académie, mais il n’a pas les faveurs du roi. La première réunion eut lieu le 15 novembre 1683. La Fontaine fut choisi au premier tour par 16 voix sur 23, contre 7 à Boileau. Il se crut élu. Le 20 novembre 1683, le directeur de l’Académie alla rencontrer Louis XIV pour l’informer du choix de l’Académie. Sa colère fut impressionnante. Il ne donna pas son accord à l’élection de La Fontaine. Et pendant plusieurs mois, le roi resta sans réponse. La Fontaine publia une ballade pour faire savoir au roi qu’il attendait toujours son bon vouloir. En vain ! Tout se passa très vite à la suite de la mort d’un nouvel académicien, Bezons, en avril 1684. Afin de ne pas essuyer un nouvel échec, l’Académie demanda alors directement au roi qui il souhaitait voir élu. Le nom de Boileau fut plus que suggéré. Il fut élu le 17 avril. Le 24 avril, le roi accepta cette élection et donna en même temps son accord pour l’entrée de La Fontaine sous la coupole.
Un paradoxe se pose quand même à La Fontaine : plusieurs écrits de cette époque montrent que La Fontaine se réjouit ouvertement du décès de Colbert. Mais, en cas d’élection, le nouvel élu doit prononcer l’éloge de son prédécesseur, ce qu’il fit rapidement et malgré lui. La séance se déroula au Louvre. L’abbé La Chambre prit alors la parole. Il rappela d’abord le génie du poète et ses talents littéraires, puis il se lança dans un violent réquisitoire contre les contes et les œuvres licencieuses de La Fontaine. Tel un gamin devant son professeur, La Fontaine reçut en public cette remontrance qu’il trouva assez justifiée. Pour la première fois ce jour-là, La Fontaine renia ses contes et reconnut qu’il était allé un peu trop loin... Quelle faute (mon) œil !

Sources principales :
académie-francaise.fr
fontaine.net
comédie-francaise.fr
Né à Paris en 1622, Jean-Baptiste Poquelin, dit Molière, a marqué l’histoire du théâtre et de la comédie française. Il fonde en 1643 « l’Illustre Théâtre » et se fixe comme objectif de « faire rire les honnêtes gens ». C’est vers la fin de 1645 qu’il rejoint la troupe de Charles Dufresne pour sillonner les routes du Languedoc. À Pézenas, le prince de Conti, un grand...

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