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Devant les ambassadeurs arabes à Canberra : « L’unité et l’ouverture contre la division et le repli sur soi »

Des propos d’une grande franchise devant les représentants des États arabes à Canberra.

Les Australiens d’ascendance libanaise ont attentivement écouté le président Sleiman. Photo Dalati et Nohra

Tous les ambassadeurs arabes ont répondu à l’invitation du président libanais à venir s’entretenir avec lui, dans sa suite à l’hôtel Hyatt à Canberra. Ils ont d’ailleurs unanimement salué cette initiative, déplorant le fait que les chefs d’État ou même responsables arabes prennent rarement la peine de venir en Australie, alors que la communauté arabe, et surtout libanaise, y est très importante.

 

L’ambassadeur d’Arabie saoudite a été peu bavard, prenant pour prétexte la présence de la presse qui l’empêche de parler franchement, alors que les ambassadeurs de Palestine et d’Égypte ont vivement remercié Michel Sleiman pour cette initiative. Quant à l’ambassadrice de Jordanie, elle a réclamé la création d’un groupe de pression arabe sur le modèle du lobby juif pour faire avancer les causes arabes dans le monde, tout en disant à propos du discours du chef de l’État que c’est exactement ce que les Arabes souhaitent entendre. Les plus discrets étaient l’ambassadrice de Libye – déjà en poste avant la chute du régime de Kadhafi – et le chargé d’affaires syrien...

L’action diplomatique
Devant les représentants des pays arabes, le chef de l’État libanais a tenu un langage d’une grande franchise, déplorant le fait que les Arabes n’unifient pas leurs efforts et oublient la cause qui les unit, celle de la Palestine, parce qu’ils sont trop pris par leurs propres problèmes. Michel Sleiman a commencé par insister sur l’importance de l’action diplomatique aujourd’hui pour régler les conflits qui peuvent paraître plus nombreux en raison de la mondialisation. Il a ajouté que ce qui se passe actuellement est une lutte entre le repli sur soi et l’isolationnisme représentés par Israël, et l’ouverture et la diversité représentées par le Liban.

 

Selon lui, l’ouverture est un message que doivent porter les pays arabes et c’est dans ce sens que va évoluer le printemps arabe. Les pays arabes, a-t-il dit, doivent trouver le moyen de protéger les composantes de leurs sociétés, non seulement confessionnelles mais aussi les valeurs de civilisation. Il a relevé avec une certaine admiration que sur le bureau de la Première ministre australienne, une boîte renferme les quatre livres des principales religions, la Bible, le Coran, la Torah et le livre du bouddhisme. Michel Sleiman a ajouté que le vainqueur de l’affrontement qui a lieu aujourd’hui sera forcément l’ouverture. Mais il a précisé que le Liban ne peut pas concurrencer seul la mondialisation, notamment à cause du développement des moyens de communication. Il faut donc dresser une sorte de ligne de défense arabe en réalisant une complémentarité culturelle et économique entre les pays de la Ligue, d’autant que la langue commune est un moyen d’unité.


Le chef de l’État a critiqué le fait qu’au cours du sommet arabe du Yémen, le président de ce pays avait voulu créer une fédération des États arabes, estimant que pareille démarche serait trop rapide. « Il faut commencer par dynamiser l’action arabe commune et relancer le fonds arabe proposé par le Koweït... », a-t-il dit. Selon lui, il faut aussi relancer l’action de la Ligue arabe, s’étonnant du fait que celle-ci ne parle plus de la cause palestinienne.

Mouvements positifs
Évoquant les mouvements populaires dans le monde arabe, le président Sleiman les a qualifiés de « positifs », à condition qu’ils ne se fassent pas dans la violence, qui est elle-même due à l’absence de justice sociale. Il a émis le souhait que tous les régimes arabes revoient leur système pour assurer la participation de toutes les composantes, « car sans une telle participation, il est difficile de protéger les sociétés ». Tout en estimant qu’il faut du temps pour que les régimes se stabilisent, le chef de l’État a critiqué le fait que « l’Occident appuie la démocratie dans le monde arabe, sauf en Palestine, où nul ne critique Israël qui judaïse la terre, prive les Palestiniens de passeports et refuse le retour des réfugiés ». Il a aussi déclaré que s’il parle beaucoup de la Palestine, « c’est parce qu’elle est à nos frontières et qu’une grande partie de nos problèmes viennent des siens ».


Michel Sleiman a aussi fait remarquer que les échanges commerciaux entre l’Australie et les pays arabes s’élèvent à 15 milliards de dollars alors qu’ils ne sont que 700 millions avec Israël. Il s’est encore demandé pourquoi lorsque la Palestine devient membre de l’Unesco, d’autres pays s’en retirent et comment elle obtient 132 voix à l’Assemblée générale des Nations unies sans que cela n’ait aucun effet sur les décisions...


Évoquant le dossier syrien, le président a souhaité que les Syriens puissent dialoguer pour trouver une solution. Selon lui, tous veulent la démocratie, tant les 85 % qui ont voté en faveur du dernier référendum que les 60 ou 40 % qui l’ont boycotté. Il s’est également déclaré en faveur de la mission de Kofi Annan, rappelant que « le feu qui brûle en Syrie peut s’étendre au Liban ». Il a encore ajouté que plus il y a de démocratie et plus la paix régnera. Il a aussi déploré la poursuite des combats en Libye et souhaité que les élections aient lieu en Égypte. Il a enfin insisté sur le fait que nul ne doit se sentir à l’abri, tant que l’incendie n’est pas maîtrisé...

Des centaines d’émigrés
Plus tard, dans la soirée, Michel Sleiman a reçu dans une des grandes salles de l’hôtel des centaines d’émigrés libanais, vêtus de leurs plus beaux atours, émus jusqu’aux larmes et fiers de pouvoir saluer le président du Liban. Certains ne sont plus venus à Beyrouth depuis plusieurs décennies, d’autres s’y rendent régulièrement. Mais pour tous, cette réunion réception est un grand événement. D’ailleurs, le chef de l’État leur a rendu un bel hommage, en les remerciant d’avoir parcouru tout ce chemin pour le voir, alors que le Liban n’a pas été à la hauteur de leur attente en les poussant à l’émigration.


Le chef de l’État a tenu devant les émigrés un discours qui se veut rassurant et dynamique, leur annonçant que la situation libanaise n’est pas aussi désastreuse qu’on le dit, la situation sécuritaire étant stable, « grâce notamment à l’accord de Taëf qui constitue une sorte de filet de sécurité, mais aussi grâce à l’armée libanaise, qui reste l’institution de tous les Libanais ». Michel Sleiman a aussi prévu une percée de la croissance économique qui s’est ralentie à cause des turbulences dans le monde arabe, précisant que « les réserves de la Banque du Liban s’élèvent à 34 milliards de dollars, ce qui est bon pour un pays comme le Liban ». Il a ajouté que c’est finalement le modèle libanais qui sera le vainqueur, car le monde a plus que jamais besoin de diversité et de respect du pluralisme.

 

Il a aussi rendu hommage aux émigrés qui ont quitté leur pays, tout en soignant sa réputation en étant loyaux et brillants dans leur patrie d’adoption. Tout en les priant de préserver les traditions orientales emmenées avec eux en quittant le Liban, il leur a demandé de « croire en l’avenir et de croire au Liban », ajoutant qu’il n’y a aucune raison valable pour que les Libanais ne parviennent pas à faire évoluer leur système démocratique, et annonçant les concertations en vue de l’élaboration d’une nouvelle loi électorale, la concrétisation de la loi sur la décentralisation administrative et les décrets d’application de la loi sur les ressources pétrolières. Et Michel Sleiman de conclure en lançant : « Je vous attends tous à Baabda. »


Le président a été vivement applaudi et il a tenu à saluer un par un les présents en sachant toutefois qu’il reverra une bonne partie d’entre eux à Sydney où il se rendra aujourd’hui, puis à Melbourne.

Tous les ambassadeurs arabes ont répondu à l’invitation du président libanais à venir s’entretenir avec lui, dans sa suite à l’hôtel Hyatt à Canberra. Ils ont d’ailleurs unanimement salué cette initiative, déplorant le fait que les chefs d’État ou même responsables arabes prennent rarement la peine de venir en Australie, alors que la communauté arabe, et surtout libanaise, y...
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