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À La Une - Éclairage

Après Baba Amr, de nouvelles tendances se précisent...

La Syrie a beau être absente du sommet de Bagdad, elle n’en reste pas moins au cœur des discussions arabes. Et si le régime de Bachar el-Assad se permet d’afficher publiquement un total désintérêt à l’égard du sommet, en affirmant qu’il ne coopérera pas avec toute initiative qui émanerait de la Ligue arabe (Assad avait d’ailleurs déclaré à Kofi Annan qu’il ne s’entretenait pas avec lui en tant qu’émissaire de la Ligue arabe, mais en tant qu’envoyé des Nations unies), il n’en suit pas moins les détails des débats, notamment entre les dirigeants arabes.

 

Le régime syrien estime à cet égard avoir passé avec succès un cap difficile, puisque ni la Ligue ni le plan de l’ONU ne demandent désormais son départ. Les partisans du régime considèrent aussi que celui-ci a marqué un point important en parvenant à détruire « la cellule d’opérations » installée par l’opposition à Baba Amr, renversant ainsi la situation en sa faveur, alors que l’appui russe a permis de bloquer toute tentative d’intervention internationale efficace.


Le régime considère d’ailleurs que la déclaration présidentielle du Conseil de sécurité est globalement dans son intérêt puisqu’elle réclame l’arrêt des violences de la part de toutes les parties, reconnaissant ainsi implicitement que l’opposition commet elle aussi des actes de violence.

 

De plus, le régime d’Assad a remporté des victoires militaires en montrant qu’il contrôle pratiquement le terrain dans les grandes villes. Mais il doit encore faire face à deux problèmes importants, la sécurité – puisqu’il n’arrive pas à mettre un terme aux explosions et autres attaques sécuritaires qui commencent d’ailleurs à bénéficier d’un environnement favorable – et l’économie, puisqu’en raison de la prolongation de la crise, les mécontents sont plus nombreux et la bourgeoisie d’affaires, qui constituait un des soutiens du régime, commence à sentir le poids de la crise.


Le régime a choisi d’affronter ces nouvelles réalités en prenant une double décision.

D’abord, il compte restructurer ses (nombreux) services de sécurité en les unifiant sous un même commandement appelé « le Conseil national de sécurité » (un peu comme l’avaient fait les États-Unis après les attaques du 11 septembre 2001, qui avaient mis en avant des rivalités et un manque de coordination entre les services de sécurité américains), et ensuite, il cherche à imposer un contrôle strict de toutes ses frontières, avec la Jordanie, la Turquie, l’Irak et le Liban, pour mettre un terme au passage des armes et des combattants. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle il entreprend désormais des opérations régulières le long des frontières libanaises et il a totalement changé les unités qui gardaient ces frontières et qui se sont avérées être souvent complices des passeurs en tout genre.


C’est donc à partir de ces nouvelles données que le président syrien a annoncé qu’il acceptait le plan d’Annan, mais il a toutefois exprimé son refus de permettre à ce plan d’aboutir à tracer des lignes de démarcation au sein du pays. Ce qui signifie qu’il continuera à poursuivre ceux qu’il qualifie de terroristes et qu’il cherche par la même occasion à court-circuiter les effets de la Conférence d’Istanbul (début avril) qui devrait décider d’armer l’opposition syrienne.

 

Mais l’élément le plus important qui joue désormais en faveur du régime syrien consiste dans la naissance d’un sentiment de méfiance de la part de l’Occident et de certains pays arabes à l’égard des mouvements islamistes, qu’il s’agisse des Frères musulmans ou des salafistes. Ces groupes et mouvements ont commencé à effrayer l’Occident en Tunisie et en Égypte, où ils n’ont pas tenu les engagements pris avant de s’emparer du pouvoir.

 

Pour ne citer qu’un exemple, les Frères musulmans d’Égypte avaient promis de ne pas présenter un candidat pour la présidence de la République. Or, non seulement ils contrôlent désormais la commission chargée d’élaborer la nouvelle Constitution, mais de plus, ils parlent de plus en plus d’avoir un candidat à la présidence. De même, des cheikhs salafistes ont tenu des propos hostiles aux coptes lors du décès du pape Chenouda. Plus encore, les salafistes ont convoqué à une réunion générale au Koweït, effrayant ainsi le gouvernement de cet émirat, qui chercherait désormais à se rapprocher de la Syrie.

 

Le cheikh Qardaoui du Qatar, qui se considère comme le guide spirituel des révolutions arabes, a récemment appelé les Émirats arabes unis à accueillir les réfugiés syriens et à les aider. Ce qui n’est pas non plus du goût des autorités de Dubaï qui évitent toute implication politique qui risquerait de remettre en cause la liberté qui règne dans cet émirat.

 

C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le chef de la police de Dubaï s’en est récemment pris aux Frères musulmans, dans un entretien accordé à un quotidien algérien, en affirmant qu’il ne faut surtout pas leur donner le pouvoir en Syrie. C’est dire qu’au sein du Conseil de coopération du Golfe, il n’y a plus d’unanimité sur la position à l’égard de la Syrie. En même temps, le président français a refusé de permettre au cheikh Qardaoui de se rendre en France, alors que la secrétaire d’État américaine Hillary Clinton ne cache pas ses hésitations sur le projet d’armer l’opposition syrienne par crainte que ces armes ne finissent entre les mains des salafistes.


Les Frères musulmans de Syrie ont bien tenté de renverser la tendance en publiant un document politique qui aspire à la création d’un État laïc et qui prône l’ouverture, mais il en faut plus pour rassurer ceux que l’islamisme inquiète d’autant que sur le terrain, la situation n’est guère concluante.


Pour toutes ces raisons, le régime syrien affiche une plus grande confiance dans l’avenir. C’est d’ailleurs ce message qu’a voulu transmettre Bachar el-Assad en défiant le danger pour se rendre à Baba Amr. Mais cela ne signifie pas pour autant que la crise syrienne est proche du dénouement et la mission Annan ressemble fort aux nombreuses missions arabes et internationales qui se sont succédé au Liban, pendant les années de guerre, et qui visaient à occuper la scène en attendant des changements régionaux et internationaux...

La Syrie a beau être absente du sommet de Bagdad, elle n’en reste pas moins au cœur des discussions arabes. Et si le régime de Bachar el-Assad se permet d’afficher publiquement un total désintérêt à l’égard du sommet, en affirmant qu’il ne coopérera pas avec toute initiative qui émanerait de la Ligue arabe (Assad avait d’ailleurs déclaré à Kofi Annan qu’il ne...

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