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Couverture spéciale de la révolte en Égypte - Transition

Les Frères musulmans prêts à défier l’armée

Le CSFA n’aurait pas l’intention de lâcher les rênes du pouvoir, malgré des déclarations faites en ce sens.
Vainqueurs d’élections législatives marquées par une entrée en force des islamistes à l’Assemblée nationale, les Frères musulmans réfléchissent à une stratégie leur permettant de prendre progressivement le pouvoir aux militaires qui assurent la transition politique en Égypte.
De fait, depuis la chute de Hosni Moubarak, chassé par la rue le 11 février 2011, les Frères évitent soigneusement de s’opposer de front à l’armée afin de ne pas retarder un retour à la stabilité dans le pays. Cette tactique tend à accréditer l’idée largement répandue qu’islamistes et militaires ont conclu un accord tacite afin de ne pas entraver, dans l’immédiat, leurs intérêts respectifs.
Ainsi, les Frères, qui disposent de près de la moitié des élus à l’Assemblée du peuple via le Parti Liberté et Justice (PLJ), ont décidé de ne pas présenter de candidat lors de l’élection présidentielle prévue au mois de juin. La confrérie a aussi récemment contraint un de ses hauts responsables, Abdel Moneim Aboul Futuh, à renoncer à ses ambitions présidentielles, sans toutefois préciser quel candidat déjà déclaré elle entendait soutenir. Et il semble que, pour l’heure, les islamistes aient accepté l’idée d’un président fort jouissant de l’appui de l’armée dont le rôle fut déterminant lors des manifestations du « printemps arabe » au moment où la police de Moubarak faisait défection.
Mais le projet sur lequel travaillent les responsables du mouvement s’articule autour d’une stratégie à moyen terme visant à réduire la présidence à un rôle protocolaire au cours des quatre prochaines années avec un Parlement reprenant la main sur la Défense et les Affaires étrangères. « Nous voulons un système dans lequel le Premier ministre consultera le Parlement pour former son cabinet », a expliqué Mohammad Saad al-Katani, secrétaire général du PLJ. Car l’actuelle Constitution confère au président la prérogative de désigner le gouvernement. « Le Premier ministre disposera de la plupart des pouvoirs du gouvernement, concernant les affaires internes et extérieures. Les pouvoirs du président seront limités », a poursuivi al-Katani.

Ancrage populaire
Depuis soixante ans déjà, l’armée a toujours joué un rôle central dans l’exercice du pouvoir en Égypte, les différents dirigeants étant fréquemment choisis dans ses rangs. Le sentiment des Égyptiens est donc que les militaires n’ont pas l’intention d’abandonner leurs positions et qu’ils entendent continuer à tirer les ficelles en coulisses. Des sources militaires indiquent d’ailleurs que le Conseil suprême des forces armées (CSFA), l’organe intérimaire qui dirige le pays, n’a pas l’intention de se soumettre à une autorité civile malgré les déclarations faites en ce sens. « L’armée n’autorisera personne à se mêler des questions de la défense », explique un responsable proche de l’état-major. « Le président devra être le garant des intérêts et de la position de l’armée dans un État civil. En échange, les militaires soutiendront le président dans sa gestion des affaires souveraines du pays », ajoute ce responsable. Conserver un rôle dans les affaires de sécurité nationale représente alors pour l’armée un puissant levier qu’elle pourra utiliser dès qu’elle le jugera nécessaire.
La rivalité entre les Frères, fortement implantés dans la population, et l’armée pourrait ensuite se transformer en un combat durable pour le pouvoir, bien au-delà de l’échéance de la présidentielle de juin. Dans le futur gouvernement, le PLJ entend par exemple récupérer des portefeuilles ministériels stratégiques comme la Santé, l’Éducation ou les Transports dont l’influence est immédiate sur le quotidien des électeurs. Les Frères comptent donc utiliser les quatre années du premier mandat présidentiel pour renforcer le soutien populaire dont ils disposent et réduire le rôle de l’armée au sein de l’exécutif, avec un transfert progressif des compétences du président au chef du gouvernement.
(Source : Reuters)
Vainqueurs d’élections législatives marquées par une entrée en force des islamistes à l’Assemblée nationale, les Frères musulmans réfléchissent à une stratégie leur permettant de prendre progressivement le pouvoir aux militaires qui assurent la transition politique en Égypte.De fait, depuis la chute de Hosni Moubarak, chassé par la rue le 11 février 2011, les Frères évitent...