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À La Une - Le point

Lendemains de printemps

Incorrigible Noam Chomsky! Extrait d’un discours prononcé, fin mai dernier, par ce brillant maître à penser américain (il détesterait cette définition...) pour le 25e anniversaire du groupe de surveillance des médias nationaux Fairness and accuracy in reporting (FAIR) : « Les États-Unis et leurs alliés feront tout pour empêcher l’instauration d’une véritable démocratie dans le monde arabe (...). Dans toute la région, une majorité écrasante considère que les USA représentent la principale menace pour ses intérêts. » Riposte officielle : Barack Obama, quelques jours plus tard, dans un discours retentissant prononcé depuis le département d’État, s’engageait fermement du côté des manifestants « pour éviter une profonde rupture avec le monde arabe ».
Près de sept mois plus tard, la marche vers la liberté et la justice poursuit son bonhomme de chemin, avec plus ou moins de bonheur et l’appui toujours aussi ferme du grand frère yankee, en paroles à défaut de l’être en actes. C’est que semblent avoir été tirées les leçons des promesses inconsidérées, dans la foulée de l’invasion de l’Irak, d’une aube triomphante, quand les braves marines avaient tiré les marrons du feu pour voir les Iraniens s’en délecter – provisoirement, nous dit-on aujourd’hui, dans une risible tentative de justification. Cette fois, on laisse les manifestants monter au front, avec pour seules armes leur courage et quelques slogans, invariables d’un pays à l’autre.
Après les lourds rangers de l’interventionnisme, sur les rives du Tigre hier, dans la Cyrénaïque le mois dernier mais sous l’ombrelle de l’OTAN, voici venu le temps de la patience et de la candeur, feinte ou non, bien commode en prévision d’éventuels (d’inévitables ? ) déraillements. L’angélisme d’abord : la presse trouve aux islamistes des vertus ignorées : un sens aigu de la démocratie d’abord, évident dans le ton conciliant de leur propos. Et pour le cas où l’on jugerait que la modération est dictée par l’habileté politique, voici l’argument destiné à clore le débat : l’électeur, aussi bien tunisien qu’égyptien, a jugé bon de ne pas leur accorder la majorité. Parce que, voyez-vous, ce brave homme de la rue est mieux organisé qu’on ne le pense, avec puissants ordinateurs, statisticiens et analystes chargés de lui fournir les dernières données en leur possession pour lui permettre d’orienter son vote.
Chez ceux qui s’enorgueillissent de connaître le terrain, au prétexte qu’ils auraient passé quelque temps dans la région, le raisonnement est quelque peu différent. Tel celui de cet envoyé spécial, engagé dans un long débat avec un membre de la confrérie et sa fille, laquelle porte le hijab. Le rôle de la femme ? lui dit son interlocuteur. Mais la moitié de nos effectifs sont du sexe faible. L’extrémisme? Inconnu chez nous, où l’on donne la priorité à l’économie, que nous voulons réformer. Le reste est de la même veine, dégoulinant de bons sentiments. Changement de décor, avec le passage dans le camp des radicaux d’al-Nour. Question : on vous accuse de vouloir empêcher vos épouses et vos filles de travailler. Réponse : mais pas du tout ! Voyez comment nous aidons celles d’entre elles qui sont dans le besoin. Conclusion du journaliste : aujourd’hui, nous nous méfions du Parti de la liberté et de la justice tout comme, il y a plus d’un demi-siècle, nous avions peur des Officiers libres, Gamal Abdel Nasser en tête (sous-entendu : à tort). Tout ce beau monde s’étonne de voir les coptes appréhender l’avenir, une crainte que les massacres des derniers mois et les incendies d’églises ne justifient aucunement. Les relations avec Israël seront préservées, assure-t-on à l’interlocuteur étranger, même si se multiplient les actes de sabotage d’oléoducs. On précise à son intention qu’à aucun moment le drapeau israélien ou le Stars and Stripes n’ont été brûlés par des manifestants. Il nous semble pourtant...
À ce point du débat, il serait inutile d’évoquer devant votre vis-à-vis l’absence, dans le discours officiel à Washington, de toute allusion à ce fameux printemps, dont l’on en est encore à attendre le prolongement naturel ailleurs qu’en Égypte, en Syrie, au Yémen. Tenez, en Arabie saoudite par exemple, en Jordanie, au Koweït ou à Bahreïn. La vérité est que le nouveau Moyen-Orient en voie d’instauration n’a rien à voir avec l’idée que s’en faisaient les républicains de la première décennie du siècle. Et cela, pour rien au monde les Américains, s’ils l’admettent en privé, ne voudraient le reconnaître publiquement.
À moins que, sur les rives du Potomac, on ne table sur l’élection de Newt Gingrich pour en favoriser l’avènement.
Incorrigible Noam Chomsky! Extrait d’un discours prononcé, fin mai dernier, par ce brillant maître à penser américain (il détesterait cette définition...) pour le 25e anniversaire du groupe de surveillance des médias nationaux Fairness and accuracy in reporting (FAIR) : « Les États-Unis et leurs alliés feront tout pour empêcher l’instauration d’une véritable démocratie dans...
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