Rechercher
Rechercher

À La Une - Exposition

« Pieds d’œuvre », une réflexion artistique sur le banc public

C’est une approche à la fois artistique et poétique à laquelle se sont livrés 16 artistes venus d’univers différents pour revisiter le banc public. L’idée est du très inspiré Gregory Gatserelia. Très inspiré aussi car la recette des ventes servira à embellir le jardin public de la Quarantaine*.

« Moonfleet » de Nathalie Khayat.

Le quartier de la Quarantaine, où Gregory Gatserelia a choisi d’installer ses collections et ses passions et de les partager avec le plus grand nombre, prend de plus en plus d’intérêt. Après la galerie The Running Horse, qui s’est installée la première dans ce coin insolite et décalé, smogallery a ouvert ses portes en juin dernier sur un espace entre galerie et musée, où le visiteur est invité, en toute légèreté, à se remplir les yeux et la tête.


En moins d’un an, smogallery a déposé son empreinte dans le paysage artistique libanais. Plus qu’une galerie classique, son propriétaire, l’architecte d’intérieur Gregory Gatserelia, l’a voulu comme un espace culturel, d’exposition et d’échanges, où les artistes locaux et étrangers peuvent montrer leurs travaux. Un lieu où il peut aussi partager sa collection d’art. Certaines pièces, de grande valeur, sont signées par des maîtres du design.
« Pour cette exposition, explique-t-il, j’ai voulu réunir 16 interprétations, sur un même thème, de personnes venues d’univers différents, de l’architecture, du design, de la peinture, de la photographie, de la poterie ou encore de la sculpture. » C’est en glanant, une fois de plus, chez les brocanteurs, en quête d’objets insolites, que l’architecte tombe sur 32 pieds de bancs en fer rouillé. « Pourquoi, se dit-il, ne pas en faire quelque chose d’intéressant ? Pourquoi
ne pas provoquer certains artistes ? Installer un dialogue entre eux, entre eux et cet objet qui véhicule une belle symbolique ? »


Le banc, celui des amoureux qui s’y bécotent, celui des solitaires, des SDF, des personnes âgées, des enfants. Celui des rêveurs, des désespérés, des heureux, des penseurs, des nostalgiques qui se repassent le film de leur vie. Installé au cœur d’un jardin, il n’appartient à personne, mais durant quelques instants, n’appartient qu’à celui qui s’y pose et dépose son humeur et son histoire.
Les artistes ont été choisis pour leur talent et leur envie de faire partie du projet. Tous Libanais sauf un Belge, Jan Van Lierde, architecte urbaniste, résidant à Istanbul, qui en a fait un « Parc de rêves », installant son bac sans assise parmi des feuilles mortes et des parcmètres. Un parc en fait très poétique...

Une installation variée

« The Finicky Pegs », de 

Michel Abboud.


Michel Abboud, architecte et fondateur de SOMA Architects, a créé une chaise intitulée « The Finicky Pegs », complètement revisitée, vêtue d’inox brossé. Ziad Abillama, dont les sculptures et le design font partie de la scène contemporaine régionale, a imaginé une chaise aux allures à la fois humaine et « industrielle ». Paula Acra a symbolisé son amour pour les arrangements floraux, dont elle a fait un métier, en produisant un banc en bois sur lequel elle a posé une de ses créations. Ziad Antar, photographe et vidéaste, a choisi de faire un banc en fil de fers barbelés, qu’il a baptisé « Banc des amoureux »...


Charbel Samuel Aoun, architecte, peintre et sculpteur, a érigé « Social Shadows », une imposante sculpture en fils de fer qui occupe bien l’espace. Célia Abou Arbid, architecte et designer, a proposé la « Wallace » Chair, recouverte d’une composition de tissus de matériaux et de couleurs différentes. Anachar Basbous, dont on ne présente plus la famille et l’héritage, a érigé une impressionnante sculpture en fer rouillé, son « Point of View » sur un monde bien gris. Les pieds du banc sont au cœur de l’œuvre et ne peuvent être aperçus, brillante idée, qu’à travers un œil magique.


Le designer Majd Bazerji, qui produit des œuvres en pièces limitées, a interprété le banc comme un lieu d’échanges qu’il a baptisé « Le confident ». Il s’agit d’une « expérience en » côte à côte « ou en » face-à-face « », avec deux tabourets qui tournent, au gré de leur humeur, pour dialoguer entre eux. Le duo Bokja, Hoda Baroudi et Maria Hibri, a choisi l’explosion de couleurs qui est un peu leur signature, en réinterprétant une chasse d’eau et un siège de WC, les revêtant de leurs tissus de prédilection. Leur « Niagara Falls » résonne comme un grand éclat de rire rafraîchissant. Karim Chaya, cofondateur avec Raed Abillama de A.C.I.D et passionné de design industriel, a mis sur pied deux très drôles de vélos, pour enfants peut-être, appelés « Shooting from the hips ».

 


La « Wallace » Chair de Célia Abou Arbid.


La designer Nada Debs, qui a fait du plexiglas sa marque de fabrique, a naturellement utilisé ce matériau pour présenter « Uni-Bench », un hymne à la transparence. Rania Farsoun, célèbre pour sa ligne de bijoux, a choisi de poser un immense miroir sur les pieds des bancs. « Psyched Alice » est une version très personnelle du sujet.
Nathalie Khayat, qui manie la céramique avec art et talent, a présenté une œuvre pleine de poésie et d’humour. Mention spéciale pour ce duo, entre bêtes étranges et vélos, personnages venus d’une autre planète qui ont même un regard et une personnalité attachante. Lara Khoury, designer de mode, a préféré décrire les chaises musicales. Un travail tout en nostalgie. Le peintre Jean-Marc Nahas a créé un banc coupé en deux, qui s’achève par une de ses toiles, et qu’il a baptisé « Seul ». Enfin, avec « Fe », l’architecte et designer Wyssem Nochi a transformé les pieds des bancs en fertilisants enfermés dans 24 bocaux en verre. L’approche, philosophique, est certes surprenante.

 

« Seul », de Jean-Marc Nahas.


La qualité de l’exposition a poussé les organisateurs à la prolonger jusqu’au 25 novembre. Une suite est évidemment à prévoir, dans un événement que ces derniers souhaitent institutionnaliser deux fois par an.
Les bénéfices des ventes iront au réaménagement du jardin public de la Quarantaine. « Pour que l’école, juste à côté, puisse en profiter, et pour tous les enfants du quartier qui traînent dans les rues », conclut Gatserelia.

*« Pieds d’œuvre » à smogallery. Immeuble Dagher, 77, rue du Sénégal, la Quarantaine. Ouvert du lundi au vendredi de 10 heures à 18 heures. Le samedi de 14 heures à 18 heures.

Le quartier de la Quarantaine, où Gregory Gatserelia a choisi d’installer ses collections et ses passions et de les partager avec le plus grand nombre, prend de plus en plus d’intérêt. Après la galerie The Running Horse, qui s’est installée la première dans ce coin insolite et décalé, smogallery a ouvert ses portes en juin dernier sur un espace entre galerie et musée, où le...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut