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À La Une - Economie

Quand les super-riches veulent payer plus d'impôts

Non seulement l'Américain Warren Buffett, 3e fortune mondiale, veut payer plus d'impôts, mais il le dit publiquement. Un appel qui trouve un certain écho aux Etats-unis mais aussi au-delà, puisque le mouvement semble avoir inspiré quelques grandes fortunes françaises. Reste que l’idée de fond, à savoir taxer les plus riches, n’est pas une nouveauté.

Warren Buffett a appelé, le 16 août dernier dans une tribune publiée par le New York Times, le gouvernement américain à augmenter les impôts des super-riches. Lucas Jackson/

Ce mois d'août aura été marqué par un fait pour le moins surprenant : la multiplication des appels lancés par les super-riches à être plus taxés. Le milliardaire américain, Warren Buffett, 81 ans, a dégainé le 16 août dernier, en appelant, dans une tribune publiée par le New York Times, le gouvernement américain à augmenter les impôts des super-riches dans le cadre de l'effort national visant à réduire l'énorme déficit budgétaire. « Nos dirigeants ont appelé à +un sacrifice partagé+. Mais quand ils ont fait cette demande, ils m'ont épargné. J'ai vérifié auprès de mes amis méga-riches pour savoir à quels sacrifices ils s'attendaient. Eux non plus n'avaient pas été touchés », écrit celui que l'on surnomme l'« oracle d'Omaha ».

Dans cette tribune, M. Buffett, patron du fonds d'investissement Berkshire Hathaway à la tête d'une fortune estimée par Forbes à 50 milliards de dollars, propose d'augmenter les impôts des Américains qui gagnent plus d'un million de dollars par an, et de les augmenter encore plus pour ceux qui gagnent plus de 10 millions de dollars annuels.

Cette tribune a permis de braquer les projecteurs médiatiques sur une réalité : tous les riches ne sont pas hostiles aux impôts. Le 21 juillet dernier déjà, un collectif de millionnaires patriotes (Patriotic Millionaires for Fiscal Strength) regroupant plus de 130 fortunes américaines, avait adressé au Congrès américain une lettre lui demandant d’augmenter les impôts des très riches.

 

En France, quelques super-riches prêts à une « contribution exceptionnelle »

 

L'appel de Warren Buffett a traversé l'Atlantique. Depuis quelques jours, certains « super-riches » français affirment être prêts à faire un geste. Mais attention, les super-riches français prennent bien soin de ne pas parler « impôt ». Les super-riches français sont prêts à une « contribution exceptionnelle » pour montrer qu’ils soutiennent l’effort de la France dans sa gestion de la crise.

 

 

Maurive Levy, le patron de Publicis

 

L’appel a été lancé par le patron du groupe Publicis, Maurice Lévy (238e fortune française avec 176 millions d’euros), dans les colonnes du Monde : « il me paraît indispensable que l'effort de solidarité passe d'abord par ceux que le sort a préservés […]. Oui, une contribution des plus riches s'impose à mes yeux. Et pas seulement les dirigeants. Tous ceux qui peuvent par leurs moyens participer à ce nécessaire effort national », écrit-il. Un appel entendu par 16 patrons et très grandes fortunes, dont Liliane Bettencourt (3e fortune française, 15e mondiale, avec 17,5 milliards d’euros), qui ont signé une tribune publiée par Le Nouvel Observateur dans laquelle ils demandent « l’instauration d’une contribution exceptionnelle » pour les contribuables les plus favorisés afin de réduire le déficit budgétaire de la France.

Mais faire payer les riches est-il la solution aux problèmes de dette des Etats ?

L’économiste Thomas Piketty rappelle dans Libération qu’après la crise de 1929 « les gouvernements avaient demandé des comptes à ceux qui s’étaient enrichis tout en conduisant le monde au bord du gouffre », notamment par une « forte hausse des impôts sur les bénéfices et de la fiscalité progressive sur les revenus ». Pour l'économiste français, 80 ans plus tard, les enjeux sont les mêmes. D'aucuns redoutent toutefois qu'en ce qui concerne la France du moins, nations ayant un penchant pour les niches fiscales, d'éventuelles mesures mettant à contribution les super-riches tiennent plus du symbolique que du réellement effectif.

Des gouvernements européens passés à l’acte

En matière de taxation accrue des super-riches, Français et Américains ne sont pas les précurseurs. Au printemps 2009, le collectif allemand « Vermögende für eine Vermögensabgabe » (Les fortunés pour un impôt sur la fortune), composé alors de 23 membres, lançait un appel pour que soit augmenté le niveau d’imposition des plus riches afin de participer à l'amortissement des conséquences de la crise. Le collectif compte désormais plus de 230 membres. Et ce alors qu'en 2007, le gouvernement allemand avait déjà créé une tranche supplémentaire d'impôts sur le revenu à 45 %. Au Royaume-Uni, le gouvernement est passé à l'action en 2010, relevant à 50 % le taux d'imposition de la plus haute tranche de revenus. La même année, l’Espagne faisait passer le taux d’imposition de la dernière tranche de 43 à 45 %.

 

 

Liliane Bettencourt (3e fortune française, 15e mondiale)

a signé l'appel à une « contribution exceptionnelle ».

 

 

En Italie, les appels de ces derniers jours ne soulèvent aucun enthousiasme. Luca Cordero di Montezemolo, président de Ferrari, qui a lancé un appel à une imposition plus forte, n’a pour l’instant pas eu de réponse. Peut-être parce que la pression fiscale est déjà très forte dans la péninsule et qu'elle s’est encore accentuée récemment. Le 12 août dernier, le gouvernement votait, en effet, la création d’une « taxe de solidarité » sur les plus hauts revenus (5 % pour les revenus de plus 90 000 euros par an et 10 % pour ceux de plus de 150 000 euros par an) et le passage du taux d’imposition des revenus financiers de 12,5 % à 20 %.

« Jusqu'alors, tous ou presque semblaient partager l'idée qu'il fallait faire preuve de mansuétude fiscale à l'égard des hauts revenus et des grandes fortunes, présentés comme les forces motrices de la croissance économique. D'où les politiques, initiées d'abord aux États-Unis et en Grande-Bretagne dans les années 1980, puis adoptées par de nombreux autres pays, de fortes réductions des taux d'imposition sur les hauts revenus et de limitation de la fiscalité sur les patrimoines », souligne l'économiste Nicolas Delalande dans la revue Histoire. « Dans la plupart des pays de l’OCDE, le taux d’imposition marginal (qui s’applique à la dernière tranche) est passé de 70 % à 35 %, voire moins », expliquait aussi le directeur du centre de politique et d’administration fiscale de l’OCDE, Jeffrey Owens, au journal La Croix.

La taxation accrue des super-riches, ne serait dès lors et dans le fond, qu'un retour de balancier.

 

 

Ce mois d'août aura été marqué par un fait pour le moins surprenant : la multiplication des appels lancés par les super-riches à être plus taxés. Le milliardaire américain, Warren Buffett, 81 ans, a dégainé le 16 août dernier, en appelant, dans une tribune publiée par le New York Times, le gouvernement américain à augmenter les impôts des super-riches dans le cadre de l'effort...
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