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Liban - Témoignage

Immersion dans les colonies de la paix

Depuis bientôt 26 ans, Offre-Joie réunit des enfants de tous bords à Kfifane. Cette année, en attendant l’arrivée d’une trentaine de petits Irakiens, la colonie s’engage sur un chantier à Tripoli.

Une pause bien méritée.

À quelque chose, malheur est bon. Le retard des enfants irakiens qui devaient être accueillis lundi à l’aéroport de Beyrouth n’a pas entaché la motivation pour le projet d’Offre-Joie, amorcé il y a plusieurs semaines. Les petits Libanais et Irakiens vivant à Beyrouth ont repris le chemin de Kfifane, au-dessus de Batroun, pour attendre leur arrivée. Devant ce retard, les responsables d’Offre-Joie reprennent les choses en main et orientent les aînés du groupe vers Tripoli où un chantier a déjà démarré.
Chaque matin, le car se faufile dans les ruelles de l’ancienne ville pour les mener jusqu’à la ligne de démarcation entre les quartiers de Tebbaneh et Jabal Mohsen, marqués par les affrontements entre alaouites et sunnites, un lieu où les habitants connaissent bien les volontaires d’Offre-Joie.
Dans cette région du nord-est de la ville, la pauvreté tend vers la misère. Un peu partout, les déchets jonchent le sol. Les immeubles, encore marqués de dizaines d’impacts, laissent deviner des conditions de vie précaires. Dans la rue, pelles et balais à la main, les jeunes nettoient, déblaient, reconstruisent. Sur les murs, les fresques vieillies par le temps, déchirées par les balles, retrouvent leurs couleurs. Les dessins des enfants décrivent les valeurs portées par Offre-Joie à travers des personnages. L’escalier séparant les deux quartiers est reconstruit. Depuis les hauteurs des balcons, les visages curieux admirent la scène tandis que les enfants accourent, de haut comme de bas, pour venir à la rencontre des bénévoles.
« L’autre jour, deux enfants des quartiers ennemis se sont rencontrés dans l’escalier séparant les deux zones et se sont promis que lorsque le terrain de football serait terminé, ils y reprendraient les matchs », raconte Melhem Khalaf, l’un des fondateurs d’Offre-Joie.
Dans le quartier, chacun apporte sa pierre à l’édifice. À l’heure du déjeuner, les membres d’Offre-Joie sont accueillis chez l’habitant. Le petit commerce de la rue principale fournit les boissons rafraîchissantes dans la chaleur de l’après-midi. Les jeunes, eux, tendent de l’eau par les fenêtres, tandis qu’une partie de football improvisée bat son plein sur la cour d’en face. L’escalier, considéré comme la frontière entre les deux zones, retrouve les jeux des enfants des deux camps. Les sourires se multiplient, les photos aussi. Le langage, qui aurait pu être un obstacle dans d’autres circonstances, n’est ici en rien une barrière dans un contact qui se fait essentiellement avec les gestes et le cœur.
« De tous les aspects de la journée, c’est ce rapport avec la population que j’apprécie le plus », confie Nabila, une étudiante venue de France pour effectuer la colonie en compagnie de sa meilleure amie.
« Durant ces journées, je me suis vraiment sentie utile. On voit des enfants à moitié habillés, très simples qui, malgré la misère, vous accueillent avec le sourire, vous reçoivent chez eux, se regroupent autour de vous... », décrit Emmanuelle.
En tissant des liens avec les enfants, les jeunes sont aussi confrontés à la réalité du quotidien. « Le plus troublant est de voir comment les gens ici vivent au milieu des déchets de façon réellement habituelle. Notre rôle est aussi de venir les aider, d’améliorer leurs conditions de vie », affirme Aïcha. « C’est très éprouvant mais, au bout du compte, on est fiers du travail accompli », ajoute Ghina, sa petite sœur.
En l’espace d’une journée, ce quartier, où la pauvreté et la violence règnent la majeure partie de l’année, semble avoir goûté à nouveau à la paix. Ce n’est qu’en fin d’après-midi, une fois les travaux terminés, que le minibus d’Offre-Joie, autour duquel un petit attroupement anime la rue, quitte les lieux.
18 heures. De retour à Kfifane, le quotidien poursuit sa cadence. Les enfants jouant au football dans la cour de pierres blanches terminent une journée de joie. C’est là que les aînés ont grandi, à la manière des enfants qui participent aujourd’hui à ces colonies de la paix. Ils sont logés dans l’école Notre-Dame de la Victoire, où des jeunes de tout le Liban ont réhabilité et construit les locaux de leurs propres mains. Les enfants, âgés de 7 à 12 ans et encadrés par des moniteurs, suivent le leitmotiv de l’association : construire des ponts et se rencontrer.
Les repas et les jeux forment un ensemble de rituels propres à Offre-Joie. Chaque activité transmet une régularité aux enfants, mais aussi des repères qu’ils intériorisent et peuvent reproduire à l’extérieur. Le soir, au cours de la prière œcuménique, chacun prend la parole et propose une prière de sa confession que le groupe reprend en chœur. C’est à travers ces moments fédérateurs que les enfants apprennent les valeurs de l’association que sont l’amour, le respect et le pardon.
22h30. Les enfants rejoignent leurs dortoirs. Les moniteurs, eux, préparent déjà l’organisation du lendemain. Dans quelques jours, des dizaines de cris venus d’Irak animeront un peu plus la cour de l’école Notre-Dame de la Victoire. Certains seront peut-être étonnés de découvrir ce qui les attend. Mais le plus important est ailleurs : à Kfifane comme à Tripoli, les jeunes n’œuvrent pas seulement pour la paix et le respect. Ils construisent, à leur échelle, le Liban de demain.
À quelque chose, malheur est bon. Le retard des enfants irakiens qui devaient être accueillis lundi à l’aéroport de Beyrouth n’a pas entaché la motivation pour le projet d’Offre-Joie, amorcé il y a plusieurs semaines. Les petits Libanais et Irakiens vivant à Beyrouth ont repris le chemin de Kfifane, au-dessus de Batroun, pour attendre leur arrivée. Devant ce retard, les...

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Merci Maitre Khalaf pour les lecons que vous nous donnez Bonne colonie et bonne route

Roger Obeid

13 h 12, le 02 août 2011

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Commentaires (2)

  • Merci Maitre Khalaf pour les lecons que vous nous donnez Bonne colonie et bonne route

    Roger Obeid

    13 h 12, le 02 août 2011

  • Offre-Joie est une fierté nationale. Depuis 26 ans, cette association est toujours présente dans les moments les plus difficiles qu'a traversés le Liban dans le but de maintenir le dialogue. Voici maintenant qu'Offre-Joie traverse les frontières du pays du cèdre pour aller prêter main forte aux enfants Irakiens si démunis. Nous pouvons être fiers d'avoir au Liban des organismes comme Offre-Joie, dirigés par des hommes d'action et des visionnaires à la fois comme Melhem Khalaf dont l'objectif principal est de réunir, de bâtir. En un mot : d'offrir la joie.

    ABINAKLÉ Chaouki

    05 h 47, le 02 août 2011

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