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À l’épreuve du miroir

Tel père, tel fils, telle génération, telle succession, telle médiatisation, telle désinformation. Un cercle vicieux qui dure depuis des décennies, un pays figé, bloqué dans ses certitudes, dans ses négations. La conséquence en est naturellement désastreuse : l'identité n'est plus porteuse d'unité, elle devient source de division, d'antagonisme.
L'identification se fait alors en fonction de l'appartenance partisane ou communautaire, elle se détermine au gré d'intérêts égoïstes qui transcendent l'intérêt national, qui dynamitent les causes pour lesquelles on prétend combattre.
Et c'est ainsi que l'on voit les jeunes reproduire, adopter aveuglément les schémas, les slogans qui ont empoisonné la vie de leurs parents, s'étriper sur les campus universitaires devenus lieux de règlements de comptes, vecteurs d'intoxication cérébrale.
Et c'est ainsi que l'on continue de voir les mêmes chefs politiques ou leurs héritiers, légitimes ou spirituels, tenir les mêmes discours, lancer les mêmes anathèmes, enfoncer les mêmes clous dans les mêmes espaces vides.
Une dérive exploitée à fond par certains médias qui ne carburent qu'à la provocation, qu'à l'incitation aux discordes confessionnelles, qui n'ont de raison d'être que dans la fabrication des nouvelles les plus ahurissantes.
On les avait déjà vus à l'œuvre à la veille de la guerre de 1975, on les avait vus attiser les conflits durant les longues années de folie meurtrière, et les voilà aujourd'hui qui reviennent au galop, jetant de l'huile sur le feu, utilisant les mêmes méthodes abjectes, usant du même fiel, du même poison pour accréditer les scénarios les plus terrifiants, pour légitimer les crimes à venir, pour pérenniser l'impunité.
« Le Liban est en danger et ce danger guette tous les citoyens, qu'ils soient chrétiens ou musulmans » : le cri d'alarme lancé depuis Bkerké, le week-end écoulé, reflète une réalité qu'il n'est plus possible d'occulter. C'est la raison pour laquelle les assises chrétiennes, convoquées en toute urgence, ont précisé qu'« il n'existe pas de solution pour une seule communauté sans les autres ni pour une communauté aux dépens des autres ».
Nulle incitation aux dissensions, nulle campagne pernicieuse, d'ordre confessionnel ou communautaire, ne devraient être tolérées, nul propos humiliant ou provocateur ne devrait être tenu dans le climat tendu actuel.
Comment comprendre alors la dernière sortie de Michel Aoun, au collège des Apôtres à Jounieh, quasiment offensante à l'égard d'une communauté ? « Le chiite, a-t-il dit, est le seul avec qui nous n'avons pas de problème ; en 1943, 1957, 1958, 1975, le problème était avec le sunnite. Le sunnite, qui m'a insulté pour mon soutien à la Résistance, a renié son patrimoine, sa culture et son histoire... il n'a pas une cause comme nous et les chiites. »
Hallucinant ! Une telle personnalisation du contentieux relève carrément du règlement de comptes dans le prolongement des attaques contre le sunnisme politique cloué au pilori pour son passé « arabiste » alors qu'il se retrouve aujourd'hui à l'avant-garde de la lutte pour un Liban souverain, libre, indépendant.
Triste, bien triste de n'envisager l'avenir, de ne le construire qu'en farfouillant dans les poubelles de l'histoire, d'un passé honteux fait d'un communautarisme haineux, un passé qui ne peut être qu'au passif de tous les protagonistes du drame libanais.
Mais les fonds de commerce les plus lucratifs prolifèrent forcément dans les arsenaux confessionnels : les longues années de guerre en ont donné la preuve la plus cinglante, en ont constitué le plus actif des ferments.
Désinformation, incitation à la discorde confessionnelle, propos diffamatoires : le Liban des 18 communautés, le Liban-message glorifié par Jean-Paul II, n'a nul intérêt, aujourd'hui, à se regarder dans le miroir...
Tel père, tel fils, telle génération, telle succession, telle médiatisation, telle désinformation. Un cercle vicieux qui dure depuis des décennies, un pays figé, bloqué dans ses certitudes, dans ses négations. La conséquence en est naturellement désastreuse : l'identité n'est plus porteuse d'unité,...
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