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Assez !

La cible est double : le Tribunal spécial pour le Liban et, dans son prolongement, l'État de droit sans lequel il n'y a point de justice. En arrière-plan, insidieusement parfois, cyniquement bien souvent, l'objectif se révèle encore plus pernicieux : garantir le fait accompli infamant de l'impunité, agir de manière à ce que les coupables (les suspects jusqu'à nouvel ordre, pour être plus précis) continuent de vaquer à leurs activités, qu'elles soient criminelles ou ordinaires... après recyclage accéléré.
Une effarante descente aux enfers, une indignité marquée au fer rouge, des politiciens « pragmatiques » osant affirmer, sans sourciller, qu'il vaut mieux « fermer sa gueule », cloîtrer sa mémoire, renier pères, frères, époux ou fils, insulter leur mémoire, que de courir le risque de voir s'ouvrir la boîte de Pandore, de voir en sortir les haines communautaires, les « justiciers » des temps modernes armés de leur hargne venimeuse, d'outils de mort et de terreur.
Tout a été dit, les cartes ont été étalées sans états d'âme et chaque mot prononcé est désormais l'aveu d'une culpabilité froidement assumée, celle que la justice, le revolver sur la tempe, est invitée à ignorer.
En clair, le chantage se résume en ces termes : soit vous mettez un x sur votre quête de justice, toute légitime qu'elle puisse être, soit vous vous retrouvez avec une guerre civile, un chaos généralisé, sur les bras. L'oubli, le reniement donc, contre la préservation d'une paix civile...armée jusqu'aux dents.
Des années, de longues années de souffrances, d'espoirs, de rêves fous qu'on veut effacer d'un trait de plume, d'un sillon de balle meurtrière, voilà à quoi se réduit l'équation, celle que des esprits malades, des esprits déments essayent de « vendre », menaces d'apocalypse à l'appui.
Triste destin que celui du Liban toujours confronté à des défis existentiels, toujours sommé de choisir entre deux maux : soumission ou suicide, assujettissement ou tueries sans fin.
Mais le drame, le vrai drame, c'est qu'aujourd'hui la menace est plus interne qu'externe, c'est que le ver est véritablement dans le fruit, qu'il ronge ce qui reste d'un modèle tant loué, mais aussi tant attaqué : un Liban pluriel, démocratique, celui de l'expérience unique sans cesse remodelée, sans cesse réexaminée, aux antipodes des systèmes politiques qui l'entourent, systèmes faits d'autocraties, de dictatures, de théocraties aveugles assises sur des opinions muselées..
L'heure, aujourd'hui, n'est plus aux contorsions stériles, aux acrobaties grotesques, l'heure n'est plus aux faux-semblants, aux mensonges légalisés. C'est la politique de l'autruche, le souci de préserver une façade lézardée qui ont conduit à la situation actuelle, au complot en cours visant à phagocyter l'État, à le soumettre au « bon plaisir » des nouveaux justiciers.
C'est la frilosité des uns et des autres, c'est leur silence assourdissant face aux campagnes calomnieuses et aux insultes qui ont donné des ailes aux pourfendeurs des instances constitutionnelles, qui ont pavé la voie à leur tentative féroce de neutraliser, une fois pour toutes, l'État de droit et la justice, qu'elle soit locale ou internationale.
Le Liban joue aujourd'hui sa survie, celle d'un pays qui s'évertue à préserver sa différence dans une région minée par la pensée unique et par l'intégrisme. Céder au chantage, comme celui qui s'est manifesté, samedi, à l'arrivée de Jamil Sayyed à l'aéroport Rafic Hariri, c'est signer l'arrêt d'une mort programmée... celle du Cèdre aux 18 branches ■
La cible est double : le Tribunal spécial pour le Liban et, dans son prolongement, l'État de droit sans lequel il n'y a point de justice. En arrière-plan, insidieusement parfois, cyniquement bien souvent, l'objectif se révèle encore plus pernicieux : garantir le fait accompli infamant de l'impunité, agir de manière à ce que les...
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