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Elle s’appelle Vérité

Ouf ! serait-on tenté de dire. Un poids dont on est enfin libéré, un boulet qui a longtemps pesé sur les mauvaises consciences, paralysé beaucoup d'institutions, une traînée de poudre qui débouche, quatre ans plus tard, sur l'autoroute de la justice internationale. Le point d'impact a pour nom La Haye, sa résultante inévitable est le trépas de l'impunité.
Des ondes de choc qui réservent plus d'une surprise, des péripéties qui s'annoncent « bouleversantes », mais ne nous excitons pas : le temps sera au temps et la vérité, celle que le verdict proclamera à la face des bourreaux, n'éclatera pas avant de longs mois.
D'ici là, c'est au procureur Bellemare de démêler l'écheveau, fort de ses propres investigations et du dossier touffu présenté par les instances judiciaires libanaises. Justice et vérité : mission accomplie donc pour Beyrouth qui a passé le relais à La Haye. C'est désormais au Tribunal spécial de garantir l'issue logique, celle qui conduira les criminels dans les geôles de l'infamie.
Islamistes ou agents syriens, généraux renégats ou officiers en service commandé ? L'éventail est large, mais le coupable est un : au-delà de l'exécutant, simple pion d'une vaste conspiration, c'est le commanditaire qui nous intéresse, celui qui a donné l'ordre, qui a tout planifié. Bellemare l'a promis : « Tout sera mis en œuvre pour garantir que la vérité émergera. Nous sommes persévérants. Nous irons là où les preuves nous mèneront. »
Tout est dit dans cette phrase, tout est expliqué en quelques lignes. La patience, dit-on, est la mère de toutes les vertus ; le Liban attendra donc le temps qu'il faudra. Tout ce qu'il souhaite tient en un mot : un nom. Il l'obtiendra pour la simple raison que ce sera là l'aboutissement, la consécration de la justice promise.
Historique est l'événement, déterminante est la couverture juridique internationale assurée au Liban, une perche tendue pour un accompagnement en douceur, pour dissiper doutes ou appréhensions.
Le message, clairement exprimé à l'ouverture du procès, sera-t-il entendu par toutes les parties libanaises, par celles-là mêmes qui n'ont pas arrêté de mettre des bâtons dans les roues de la justice libanaise ? Le transfèrement des quatre généraux vers leurs nouveaux quartiers pénitentiaires aux Pays-Bas se fera-t-il sans problèmes, sans remous sécuritaires, des voix s'élevant déjà pour dénoncer une parodie de justice ?
À l'heure des témoignages devant le tribunal, tous seront-ils présents ? Certains ne se draperont-ils pas de leur « dignité bafouée », n'allégueront-ils pas d'une prétendue « politisation du procès » pour se soustraire à la justice ? D'autres, d'ici ou d'ailleurs, de l'intérieur ou d'au-delà les frontières, ne seraient-ils pas tentés, au fil des séances du tribunal, de fomenter des troubles pour  montrer ce qu'il peut en coûter de vouloir à tout prix connaître la vérité ?
Des interrogations légitimes pour un événement historique : le passé tragique, fait d'attentats terroristes, d'assassinats ignobles, nous a appris qu'on ne saurait être trop prudent, qu'on ne pourrait être trop confiant.
Et les questions s'enchaînent : pourquoi le blocage politique actuel, ce malaise pervers, malsain qui ligote le gouvernement, empêche le Conseil constitutionnel de se reformer, les magistrats d'accomplir la tâche pour laquelle ils sont pressentis ?
Pourquoi cette soudaine irruption du sordide problème des Caisses, l'étalage de passe-droits communautaires qui « ghettoïse » un peu plus sunnites et chiites, les installe dans le vase clos de l'intolérance, de l'instabilité ? Pourquoi ces incidents sécuritaires répétés, ces atteintes quotidiennes à l'État de droit, ces missiles suspects qui fragilisent la paix fragile au Sud ?
Pourquoi l'étalage, aujourd'hui même, des divisions intermaronites, la montée des tensions dans la rue chrétienne ? Pourquoi la campagne menée contre le patriarcat, sous la bannière de la laïcité, de l'abolition du confessionnalisme, alors même qu'explosent les intégrismes chiite et sunnite ?
Suspecte, bien suspecte convergence de facteurs  déstabilisateurs, d'indices préoccupants, alors que démarre le procès de La Haye, alors que 100 jours seulement nous séparent des législatives.
Ultime question : qui veut garder l'État en otage, perpétuer le climat d'insécurité, torpiller le modèle de tolérance et de coexistence ?
La réponse viendra, un jour ou l'autre, de La Haye. Elle aura pour nom Vérité ■
Ouf ! serait-on tenté de dire. Un poids dont on est enfin libéré, un boulet qui a longtemps pesé sur les mauvaises consciences, paralysé beaucoup d'institutions, une traînée de poudre qui débouche, quatre ans plus tard, sur l'autoroute de la justice internationale. Le point d'impact a pour nom La Haye, sa résultante...
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