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À l’école des fans furieux

Cela démarre à l’école, s’installe sur les bancs des classes, s’incruste dans l’esprit des gamins, les transforme souvent en perroquets répétant ce qu’ils entendent à la maison. Les bagarres, les petites bagarres de galopins surviennent naturellement. Les instituteurs s’en arrachent les cheveux, la réprimande devient, rapidement, prise de position politique… et les parents s’en mêlent inévitablement.
Écoles publiques, écoles privées, le gâchis est le même, il frappe dès le bas âge et n’en réchappent, jusqu’à nouvel ordre, que les bambins de la maternelle ! Non pas que les marteaux piqueurs de la politique aient un quelconque cas de conscience pour s’y engouffrer, mais il faut bien reconnaître qu’entre deux et cinq ans, la réceptivité au discours politique reste bien hypothétique, bien aléatoire…
Mais trêve d’ironie : s’il est une vérité, une réalité qui nous explose chaque jour au visage, c’est celle de la pollution politicienne qui nous asphyxie, qui nous mine, comme la rouille qui ronge le fer.
Et c’est effectivement dès l’école que se manifeste la corrosion. Les jalons sont posés, le travail de sape peut commencer : allègrement, on passe de l’école à l’université, de l’adolescence à l’âge adulte. C’est là où l’affaire se corse, où le piège se referme, un conditionnement qui déterminera le restant de toute une vie, un avenir qui s’annonce comme la copie conforme du présent, lui-même duplicata du passé.
Arrêt sur images : des étudiants se bagarrent dans une université, des canifs sortent des poches, la cafétéria du campus est transformée en ring pour catcheurs ; ailleurs, plus « civilisés », mais tout aussi excités, des universitaires se contentent de pieds de nez, de bras d’honneur. Mais la rancœur est là, la haine aussi, parfois.
À l’Université libanaise, là où les rassemblements dérapent immanquablement, la direction a tranché : plus d’élections d’amicales estudiantines, les élèves iront déverser leur hargne ailleurs.
Triste spectacle assujetti aux desiderata, aux volontés d’idoles politiques. Les revendications d’ordre académique, elles, attendront des temps meilleurs… à la saint-glinglin au rythme où vont les choses.
Désastreuse dérive qui grimpe les échelons au fil des ans, n’épargnant ni ordres professionnels ni administrations publiques. Une évolution somme toute naturelle : ce sont bien les nouveaux diplômés qui iront grossir, demain, les rangs des ingénieurs, médecins, avocats, entrepreneurs ; ce sont bien les étudiants d’aujourd’hui qui transplanteront demain leurs colères, leur soif d’en découdre avec l’adversaire, dans des regroupements déjà pourris par le fléau politicien.
Élections dans les universités, élections dans les ordres professionnels : tous les ans, aux mêmes dates, c’est la ruée vers les gloires éphémères bâties sur les ruptures, sur les divorces partisans. Des batailles homériques, en rangs dispersés et antagonistes, comme s’il y allait de la survie de la planète…
Une insulte à l’intelligence, une gifle assénée aux brillants étudiants, ingénieurs, médecins, avocats dont abonde le Liban et qui sont entraînés, à leur corps défendant, dans des combats qui ne sont pas les leurs.
Conséquence logique : étape après étape, dérapage après dérapage, le ver rongeur poursuit son ascension, atteint les plus hauts sommets de l’édifice, paralyse les institutions : Conseil constitutionnel aux abonnés absents, Conseil supérieur de la magistrature pieds et poings liés, nominations et permutations judiciaires renvoyées aux calendes grecques.
Et cerise sur le gâteau : des ministres s’octroient, en toute légalité, un tiers de blocage « salvateur », des responsables en charge de départements sensibles prennent des initiatives cruciales sans en référer à leurs supérieurs ou à l’instance collégiale.
Ainsi vogue la galère libanaise ballottée au gré de vents contraires, prise au piège d’opinions, de raisonnements qui ne souffrent, qui ne tolèrent aucune contestation.
Je vous l’avais bien dit en introduction : tout commence à l’école, se poursuit à l’université, s’installe dans les ordres professionnels et débouche, immanquablement, sur Babel : autisme et dialogue de sourds garantis .

Cela démarre à l’école, s’installe sur les bancs des classes, s’incruste dans l’esprit des gamins, les transforme souvent en perroquets répétant ce qu’ils entendent à la maison. Les bagarres, les petites bagarres de galopins surviennent naturellement. Les instituteurs s’en arrachent les cheveux, la réprimande...
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