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Diaspora

Du Ghana au Sénégal, la fraternité libano-africaine

Le continent africain regorge de richesses et les Libanais qui s'y trouvent depuis près d'un siècle contribuent fortement à son développement économique, notamment sur sa côte occidentale.

La statue de l’émigré libanais saluant son hôte ghanéen au cours de la cérémonie d’inauguration organisée par l’Union libanaise culturelle mondiale à Accra le vendredi 13 mai 2011.

Les Libanais d'Afrique agissent habituellement à titre individuel, mais de nombreux clubs et associations ont vu le jour, comme ceux dépendant de l'Union libanaise culturelle mondiale (ULCM), qui agit prudemment en ménageant toutes les susceptibilités dues à la diversité libanaise.
Deux événements notables pour le Liban se sont déroulés durant le mois de mai en Afrique de l'Ouest. Le premier s'est tenu du 12 au 16 mai à Accra, capitale du Ghana, sur invitation des membres de l'Union libanaise culturelle mondiale dans ce pays, d'où est originaire le président actuel Eid Chedraoui. Le moment fort de cette rencontre a été l'inauguration, le vendredi 13 mai, d'une superbe statue symbolisant la fraternité libano-ghanéene. Érigée sur une place stratégique du centre-ville, sur la route venant de l'aéroport, elle a fait l'enthousiasme de tous les participants libanais et ghanéens, en présence d'artistes ghanéens chantant et dansant pour l'amitié avec le Liban, ainsi que du consul honoraire de Ghana au Liban, Michel Haddad.
Certains représentants diplomatiques, dont le consul du Liban Youssef Suidan, se sont excusés à la dernière minute, suite à des pressions de certaines factions libanaises tentant d'entraver en vain la réussite de cet événement. Le consul s'est par la suite rendu au dîner offert par l'un des responsable africains de l'ULCM Chakib Rammal dans un grand restaurant libanais de la ville puis a assité deux jours plus tard à la messe célébrée par Mgr Guy Noujaim en l'église maronite, qui a été suivie par l'inauguration de la seconde phase de la construction de l'école attenante. Une grande réception a été également donnée par le président mondial Eid Chedraoui et son épouse Haïfa dans leur chalet du bord de mer à New Ningo, faisant l'enchantement de tous les convives.
Soulignons également l'engagement des responsables du Conseil national ghanéen de l'ULCM, dont le président Fawzi el-Wili et le secrétaire général Nabil Basbous, ainsi que le président pour l'Afrique Mohammad Hijazi et Bachir Bakri al-Mawas, qui n'ont ménagé aucun effort pour la réussite de cette rencontre au cours de laquelle s'est tenu aussi un congrès de l'Union à l'hôtel Golden Tulip hébergeant les participants étrangers. C'est là que nous avons rencontré un pilote mexicain d'Emirates Airlines qui, ému par notre présence, nous a confié que sa grand-mère maternelle était libanaise de la famille Wakim.
Parmi les hôtes libano-ghanéens présents, qui nous ont emmenés en tour pour admirer l'artisanat ghanéen, citons: Maurice Awad (grande figure de l'émigration libanaise qui fera l'objet d'un portrait spécial dans notre prochaine édition), Mounir Awad, Walid Merhebi, Daniel Diab, Georges Chalhoub et Mounif et Ramona Rammal. Des représentants de l'ULCM de plusieurs continents et pays ont participé à cet événement. Sont venus du Brésil: Élie Hakmé, Michel Syriani et Antonio Chahine avec leurs épouses; des États-Unis: Farid Makarem; du Liban: Antoine Kaddissi et Jaenia García; de France: Antoine Menassa, Roger Hani et Edmond Abdel-Massih; de Grande-Bretagne: Saïd Yazbeck; d'Australie: Antoine Ghanem et Stephen Stanton avec leurs épouses; d'Argentine: Juan Saliba; du Canada: Nick Kahwaji, secrétaire mondial de l'ULCM, et sa fille Rachelle.

Jounieh, une des plus belles baies du monde
Le 7e congrès de l'Association des plus belles baies du monde s'est déroulé du 23 au 26 mai au Sénégal dans la région de Fatik, à Toubacouta dans le delta du Sine Saloum (250 km au sud de Dakar), à l'occasion duquel s'est tenu en parallèle un grand congrès régional sur l'environnement. Cinq nouvelles baies étaient candidates à l'inscription à cette association et toutes ont été retenues après délibération de l'assemblée générale. Il s'agit de la baie de Jounieh (Liban), de Horta (Açores), de Fort-de-France (Martinique), de la Baule (France) et de las Rosas en Catalogne (Espagne). Une commission d'experts devra visiter ces baies avant septembre prochain afin de valider les inscriptions. Des représentants de baie venus de tous les continents ont participé au vote: Sénégal, France, Espagne,Turquie, Grèce, Brésil, Portugal, Cambodge, Vietnam, Maroc, Mozambique, Canada, Cap-Vert, Corée du Sud, Monténégro, Philippines.
La première étape a donc été franchie avec succès, nécessitant une bonne préparation. Le Liban a été représenté par l'association RJLiban, qui renoue avec ses premières actions de promotion et de préservation du patrimoine culturel libanais. Car la baie de Jounieh, à l'instar des autres régions du Liban, n'appartient pas aux autorités locales qui souvent n'ont pas la qualification et la perception nécessaires, mais à tous les Libanais. Ce message s'adresse notamment à nos jeunes appelés à défendre leur pays sans tenir compte des clivages empêchant les actions positives en faveur de notre pays. Il était ainsi de notre devoir de trancher en menant cette mission difficile indépendamment des considérations politiques locales entravant le développement économique et touristique du Liban.
Au cours de ce très beau voyage nous menant dans des régions éloignées et très protégées, comme l'île aux Oiseaux au croisement du delta de Sine Saloum et de l'océan Atlantique, le Liban était omniprésent grâce aux métissages engendrés par la beauté africaine. La jolie hôtesse Rama nous raconte que sa cousine Astou s'est mariée récemment avec Pierre Farah, libanais vivant au Bénin et duquel elle vient d'avoir un garçon, Sami. Un haut responsable régional est fier de nous annoncer que sa nièce a épousé un Libanais. Puis il y a eu la rencontre avec l'expert aquacole Abdoul Aziz Badiane, tout ému d'annoncer que sa maman Germaine Youssef Makarem, que nous avons contactée par téléphone, est libanaise!
L'un des points forts de ce voyage aura été la rencontre avec le chef de la troupe Allah laké, au lendemain d'une nuit de folie au cours de laquelle les danseurs et musiciens surgis du fin fond de la brousse sénégalaise ont présenté un époustouflant spectacle haut en couleur. Samba Nbath, de la tribu des Mandingue, nous a raconté l'histoire passionnante de son art millénaire, et l'accord a été conclu pour la production de sa troupe au Liban, avec un échange de tamtam et de pâtisserie libanaise.

Discours de présentation
Dans notre discours prononcé devant une assemblée de 200 personnes en majorité francophone composée à moitié par des Sénégalais participant au congrès, l'accent a été mis sur la beauté du site de Jounieh, son importance historico-religieuse et ses problèmes d'environnement (urbanisation, trafic automobile et pollution de la mer):
«Nous tenons tout d'abord à remercier les organisateurs français et sénégalais, ainsi que tous les participants, en particulier Bruno Bodard et le président Jérôme Bignon, qui nous ont permis d'être présents à ce beau rassemblement international en majorité francophone. Notre première rencontre avec Bruno s'est déroulée il y a un an à Vannes afin de discuter des relations unissant la Bretagne et le Liban depuis le temps des Phéniciens. Et nous nous retrouvons au Sénégal, une terre où nos ancêtres les Phéniciens avaient établi des comptoirs il y a plus de deux mille ans et qui accueille aujourd'hui de nouvelles générations d'émigrés libanais depuis le début du XXe siècle.
Le terrain est donc propice au renforcement des liens avec le pays du Cèdre que nous représentons aujourd'hui, et nous espèrons que l'admission de notre pays et sa jolie baie de Jounieh à l'association des plus belles baies du monde permettra de donner un nouveau souffle aux jeunes en freinant le mouvement d'émigration qui se poursuit...
La baie de Jounieh, en jolie forme de berceau et aux beaux couchers de soleil, se trouve au centre du pays dans la région du Kesrouan, à 20 km au nord de la capitale Beyrouth, et à 15 km au sud de la ville huit fois millénaire de Byblos où a été inventé l'alphabet. En cet endroit, la plaine côtière devient très serrée, ce qui fait que Jounieh est surplombée par une montagne de 600 m d'altitude, sur laquelle trône Notre-Dame du Liban à Harissa. C'est le site touristique le plus visité du pays aussi bien par les touristes chrétiens que musulmans qui vénèrent la Sainte Vierge, seule femme citée dans le Coran. De cet emplacement accessible par la route et par le téléférique, nous avons une très belle vue panoramique sur la baie de Jounieh et le Casino du Liban, construit dans les années 1950.
À l'entrée sud de Jounieh se trouvent les stèles millénaires du fleuve de Nahr el-Kalb, au nombre de 17, gravées par les conquérants de tous les siècles, et au nord un pont romain enjambant le torrent saisonnier de Nahr Ghazir. À 10mn en voiture, on peut visiter la grotte de Jeïta, considérée comme l'une des 7 merveilles du monde. Dans le voisinage immédiat se trouvent une vingtaine d'églises, monastères et couvents, dont le siège du patriarche maronite à Bkerké. À partir de Jounieh, on peut accéder en une demi-heure à la haute montagne de Faraya pour y skier de janvier à mars. Et nous avons au Liban cinq sites classés patrimoine mondial par l'Unesco: Tyr, Byblos, Baalbek, Anjar et la vallée sainte de la Qadischa.
L'urbanisation intensive a atteint la baie de Jounieh, et le vieux village paisible aux maisons à toiture rouge a été transformé durant la dernière guerre de 1975 à 1990 en une vaste agglomération, remplaçant à l'époque le centre-ville de Beyrouth. Cela entraîne aujourd'hui une congestion du trafic automobile, aggravée par l'absence de réseau ferroviaire. Un second problème est dû à l'absence de traitement adéquat des eaux usées et des déchets ménagers, qui provoque certains jours en fonction des courants marins une pollution notable. Tout cela affecte malheureusement l'environnement.
En conclusion, nous voudrions rappeler que Jounieh et le Liban sont un symbole de la coexistence pacifique entre les peuples. De là partaient en bateau les premiers marins phéniciens jusqu'aux côtes d'Espagne, du Portugal et de Bretagne, comme la princesse Europe et son frère Cadmos, ou la princesse Elissa, fondatrice de Carthage. Ils ont été suivis par les évangélisateurs chrétiens, Jésus lui-même, saint Paul, saint Frumentius, et de nombreux moines partis de Tyr, Cana et Jounieh vers la Turquie et la Grèce, l'Éthiopie et l'Égypte, la France et l'Italie.
Avec l'entrée de la baie de Jounieh dans le Club des plus belles baies du monde, nous souhaitons agrandir notre réseau d'amitié en tissant des liens durables et proposer des solutions pour l'amélioration des conditions de vie et des infrastructures touristiques dans notre région. Nous souhaitons également relever le défi et accroître la sensibilisation à la question de la biodiversité. Ceci pourrait provoquer une réaction en chaîne auprès des émigrés libanais influents en Afrique, en Amérique latine et autres continents, pour agrandir le Club des plus belles baies du monde.

Naji FARAH

Cette page (parution les premier et troisième lundis de chaque mois) est réalisée en collaboration avec l’Association RJLiban. E-mail : naji.farah@rjliban.com – www.rjliban.com
Les Libanais d'Afrique agissent habituellement à titre individuel, mais de nombreux clubs et associations ont vu le jour, comme ceux dépendant de l'Union libanaise culturelle mondiale (ULCM), qui agit prudemment en ménageant toutes les susceptibilités dues à la diversité libanaise. Deux événements notables pour le Liban se sont déroulés durant le mois de mai en Afrique de...