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Nos Lecteurs ont la Parole

Le monde ne vous a pas attendu...

Par Paola SALWAN
« ... Le développement complet d'un pays, le bien-être du monde et la cause de la paix demandent la participation maximale des femmes à égalité avec les hommes, dans tous les domaines. »
Cher homme de mon pays, 
vous remarquerez tout d'abord que je ne spécifie pas votre religion, le communautarisme ne m'intéressant que peu, 
L'envie me prend, depuis la lecture de votre opinion dans L'Orient-Le Jour, de vous transmettre, avec beaucoup d'amitié, d'amour, de fraternité, ce petit message, en vous remerciant d'avance d'avoir l'amabilité de lire ces quelques lignes qui, je l'espère vivement, ne seront pas mal interprétées et vous inciteront, au moins, à la réflexion (cher ami, notez bien le même ton paternaliste que j'adopte, le même que vous avez cru bon d'utiliser en vous adressant aux femmes de votre pays, comme si elles étaient si obtuses qu'il serait impossible de leur parler normalement). 
Laissez-moi répondre point par point à l'affligeant article dont vous nous avez gratifiés. Premièrement, vous partez du postulat que toutes les femmes chrétiennes de votre pays ont été éduquées à l'européenne : rien n'est plus faux, cher monsieur. La femme libanaise, chrétienne ou non, est multiple. Peut-être le sauriez-vous si vous sortiez parfois de votre ghetto achrafiote bourgeois. Deuxièmement, laissez-moi vous rappeler quelque chose : les femmes, libanaises ou non, chrétiennes ou non, n'ont pas attendu d'être éduquées à l'européenne ou à la zimbabwéenne non seulement pour se considérer mais encore pour être l'égale de l'homme en droits et en humanité. La Déclaration universelles de droits de l'homme, ça vous dit quelque chose ? Article premier, mon bon monsieur, article premier : « Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité. » 
Ce n'est pas moi qui l'ai dit, c'est Charles Malek. 
Vous nous parlez de la sainte Famille du Christ. Je ne me prétends pas théologienne, mais je me contenterai de vous rappeler les femmes fortes de la Bible, telles que Tamar, Ruth, la Vierge Marie, mais ce n'est même pas la question. La véritable question, c'est que vous érigez votre point de vue en vérité absolue et que vous vous permettez de pontifier à l'envi sur les commandements de la Famille du Christ, avec des majuscules, s'il vous plaît. Mon Christ lavait les pieds des prostituées et faisait taire les moralisateurs de votre espèce, et j'aime à l'imaginer ayant autre chose à faire que de consigner les femmes à la maison en hurlant au scandale si par malheur il leur arrivait d'être heureuses par elles-mêmes et pour elles-mêmes. 
À présent si vous le voulez bien, parlons de votre arrogance et de votre insécurité. Avez-vous peur à ce point des femmes qui travaillent ? Pourquoi ? Avez-vous peur de perdre votre place dans la société ? Il semblerait que vous considériez les femmes non pas comme des êtres humains doués d'intelligence mais bel et bien comme de charmants animaux de compagnie dont la seule et unique vocation est de faire des enfants, de prendre soin de votre personne et, surtout, surtout, de se taire (en portant les émeraudes que vous vous proposez de lui offrir, bien sûr). Cela me peine sincèrement de crever votre bulle, mon cher ami, mais le monde ne vous a pas attendu pour reconnaître à la femme ses droits inaliénables. Vos commentaires réactionnaires sur la place de la femme et de l'homme dans la famille ne méritent même pas que l'on s'y attarde, et je vous répondrai donc par le droit international, obligations juridiquement contraignantes auxquelles votre pays, et MON pays, mon cher ami, mon propre pays, s'est soumis. Je vous rappellerai donc la Convention sur l'élimination de toutes formes de discrimination à l'égard des femmes que le Liban a ratifiée, et qui assure aux femmes leurs droits inaliénables, tel que le droit à une vie privée, le droit à la participation économique et politique, le droit à la santé, le droit à ne pas être discriminées et j'en passe. Je ne mens pas, je vous jure qu'un tel texte existe, au même titre que la Déclaration de Beijing sur les droits sexuels (Honte! Honte ! Un tel mot est sorti de ma bouche) et la santé reproductive, et au même titre que tous les textes des droits de l'homme, qui s'applique aux femmes également, j'en ai bien peur. 
Écoutez-nous bien, mon frère, entendez-vous ce tonnerre qui gronde ? Ce sont vos sœurs libanaises, de toutes confessions, formes, couleurs, et politiques confondues qui vous chargent. Notre esprit est à nous. Notre corps est à nous. Et personne, et surtout pas des personnes paternalistes de votre espèce ne nous fera taire. 
À bientôt, vous nous verrez certainement en train de manifester pour que le Liban nous donne le droit de donner notre nationalité, de notre pays à nos enfants, entre autres choses, bien sûr.
Je serais vous, je déménagerais.
« ... Le développement complet d'un pays, le bien-être du monde et la cause de la paix demandent la participation maximale des femmes à égalité avec les hommes, dans tous les domaines. »Cher homme de mon pays, 
vous remarquerez tout d'abord que je ne spécifie pas votre religion, le communautarisme ne m'intéressant que peu, 
L'envie me prend, depuis la lecture de votre...

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